Depuis 8h le matin, l’assistant de recherche du Groupe de recherche et d’éducation sur les mammifères marins (GREMM), Mathieu Marzelière, scrute l’horizon à partir du Centre d’interprétation et d’observation de Pointe-Noire. De sa plateforme, il distingue l’embouchure du Saguenay, le petit village de Tadoussac, et, s’il tourne légèrement le regard vers la droite, l’immensité du Saint-Laurent. Les deux traversiers qui font l’aller-retour entre Baie-Sainte-Catherine et Tadoussac naviguent à un rythme régulier, scandent les heures d’attente du technicien.
L’apparition d’un dos blanc accapare soudain son attention. Avec sa caméra sur trépied, il tente de capturer le béluga, puis les dizaines d’autres qui apparaissent à sa suite. Les clichés s’ajouteront à la collection du programme de photo-identification du GREMM, qui envoie pour la première fois depuis des décennies ses assistants de recherche sur les rives de Pointe-Noire et de Baie-Sainte-Marguerite en plus de sur la mer.
Avec ou sans bélugas
La première observation de Mathieu marque le début d’un «contact», laps de temps d’environ deux heures pendant lequel il photographie un troupeau de bélugas. Sur leurs flancs, on distingue parfois des marques distinctives ou des cicatrices permettant de les identifier. Chaque demi-heure, Mathieu s’adresse à son dictaphone pour indiquer la taille du troupeau de bélugas, leur âge, leur distance ou même la présence de bateaux. «Ça nous permet de remettre en contexte nos identifications de bélugas et de déterminer comment ils utilisent leur habitat», explique-t-il. «Dans l’embouchure du Saguenay, ils apparaissent surtout en déplacement», remarque-t-il.
Qu’il fasse chaud ou froid, il est au rendez-vous, équipé d’un épais manteau ou d’une couche de crème solaire supplémentaire selon les conditions météorologiques. Les bélugas, eux, ne le sont pas toujours, ou sont parfois indiscernables : les remous créés par le vent ou les reflets du soleil se confondent aisément avec leur blancheur. Et parfois, ils sont simplement trop loin pour qu’on puisse les distinguer. «Passé 300 mètres, ça devient difficile de les identifier, même avec une lentille de 600 mm», précise Mathieu.
Deux heures ont passé depuis sa première observation; plus de bélugas à l’horizon. L’assistant de recherche met fin à son «contact» et complète un relevé détaillé des données qu’il a recueillies, relevant le regard de temps à autre pour surveiller l’arrivée d’un nouveau béluga.
De la mer vers la terre
Lorsque Mathieu photographie des bélugas, c’est généralement à bord du Bleuvet, le bateau de recherche du GREMM. À cause de la houle, il doit veiller à rester stable sur ses jambes, s’assurant ainsi des clichés où on peut aisément distinguer les animaux. De la rive, les défis diffèrent. «Ici, on attend que les bélugas viennent vers nous plutôt que d’aller à leur rencontre», constate Laurence Tremblay, une autre assistante de recherche au GREMM qui travaille à Pointe-Noire.
Si l’attente peut être longue, elle en vaut généralement la peine. À Baie-Sainte-Marguerite, leur collègue a déjà assisté à la venue d’une centaine de bélugas. «Lorsqu’ils arrivent, on est très occupés!» indique-t-elle en souriant. «On dispose de seulement 20 à 30 minutes pour les photographier tandis qu’ils passent près de mon poste d’observation, puis il faut attendre qu’ils quittent la baie pour qu’ils passent à nouveau assez près». Les bélugas ont tendance à s’attarder dans l’immense baie pour socialiser, mettre bas ou allaiter, des observations exceptionnelles qui ne doivent toutefois pas détourner l’assistante de recherche de son appareil photo.
Bélugas dans les bureaux
16h. Le visage rougi par le soleil, Mathieu range son matériel et quitte Pointe-Noire pour prendre le traversier qui se rend Tadoussac, où se trouvent les bureaux du GREMM. Son travail de photo-identification n’est cependant pas tout à fait fini. Quelques jours par semaine, il s’installe devant l’ordinateur pour classer les photos et ajuster leur taille. Elles sont ensuite envoyées à Marie-Hélène D’Arcy, chef d’équipe du programme de photo-identification qui «matche» des bélugas depuis plus de 20 ans. Pour Marie-Hélène, les photos prises de la terre ne posent pas de défi supplémentaire pour l’identification des bélugas. «Le plus grand défi, c’est plutôt la quantité de photos à traiter», croit-elle.
Si le GREMM débute la photo-identification à partir de la rive, l’équipe qui soutient le projet semble déjà avoir fait ses preuves, que ce soit dans les bureaux ou à bord du Bleuvet.
Les pré-identifications du mois d'aout
La pré-identification consiste à réaliser un premier tour des photos de bélugas afin d’en identifier quelques-uns du premier coup d’œil.
- Artsea, adoptée par les clientes des magasins Simons
- Blanchon, adoptée par Yolande Simard Perrault
- Bleuoutremer, adoptée par Bleuoutremer
- Céline, adoptée par Leslie B. Durst
- Corsaire, adoptée par les lecteurs du magazine GEO
- DL9039, en cours d’adoption par les élèves de la polyvalente Chanoine-Armand-Racicot
- Hector, adopté par les Cowboys Fringants et leurs fans
- John A. Macdonald, adopté par l’hôtel Fairmont Macdonald
- Leucas, confié au premier ministre du Canada
- Mirapakon, adopté par les enduits Mirapakon