L’acoustique marine utilise les sons pour investiguer le milieu sous-marin. Il y a l’acoustique active et l’acoustique passive.

L’acoustique active

L’acoustique active permet de «voir» sous l’eau à plusieurs centaines de mètres de profondeur là où il n’y a même plus de lumière. Des échosondeurs émettent des sons qui vont se propager et heurter les obstacles, incluant les organismes vivants. À partir de l’écho qui est retransmis par ces obstacles, on peut extraire leur position, leurs propriétés et construire ainsi une image de leur répartition dans l’eau ou du relief sous-marin. À différentes fréquences, les échosondeurs peuvent distinguer les échos provenant des poissons de ceux provenant du zooplancton. Le krill par exemple a un écho plus fort à 120 kHz qu’à 38 kHz, fréquence à laquelle le capelan a un écho plus fort. Le zooplancton plus petit que le krill a un écho plus fort à des fréquences supérieures à 120 kHz.

Voici un échogramme (38 kHz) enregistré à bord de l’Alliance de Parcs Canada en marge de la baie de Tadoussac le 4 août 2009. Trois rorquals à bosse photographiés au moment du passage du bateau étaient dans la région de la masse jaune et rouge (petits poissons).

L’étude de la propagation des sons dans l’eau peut aussi permettre de déterminer ses caractéristiques telle sa température moyenne. Des sons plus puissants de basse fréquence peuvent servir pour repérer des sous-marins modernes sur de grandes distances ou pour explorer les structures du sous-sol, notamment pour l’exploration pétrolière.

Voyez en vidéo un projet de télémétrie sur les rorquals de l’estuaire et de recensement acoustique des proies

L’acoustique passive

Saviez-vous que le son voyage environ quatre fois plus vite dans l’eau que dans l’air? Et qu’il voyage beaucoup plus loin? L’acoustique passive est à l’écoute des sons sous-marins. Pour capter ces sons, les chercheurs placent des hydrophones (des microphones étanches) sous la mer. Mais les baleines peuvent émettre des sons qui sont inaudibles pour l’humain, c’est-à-dire des infrasons et des ultrasons. Les hydrophones peuvent les détecter, mais pour que l’on puisse entendre les sons de moins de 60 Hz et de plus de 16 000 Hz, ils doivent être transformés. Ils sont soit accélérés, soit ralentis.

Voici à quoi ressemble un son de basse fréquence accéléré quatre fois émis par un rorqual bleu.

À l’aide d’un réseau d’hydrophones placés sous l’eau, on peut même arriver à positionner la source de bruit donc la position des baleines. À long terme, il est ainsi possible de dresser un portrait de la fréquentation du territoire et de comprendre des liens avec certains facteurs climatiques et océanographiques. Enfin cette technique permet d’étudier le bruit ambiant de la mer, dont les sources naturelles (tel le bruit des tremblements de terre) et les sources d’origine humaine (tels les bateaux), et donc d’évaluer le niveau de pollution sonore et ses effets sur les différentes espèces marines.

L’acoustique passive à l’aide de planeurs téléguidés

Comment pouvons-nous repérer les baleines alors qu’elles passent la majeure partie de leur vie sous l’eau et loin des côtes? Grâce à la surveillance acoustique! Les baleines émettent toute une gamme de sons pouvant être utilisés pour détecter où elles se trouvent à quel moment.

La détection acoustique de baleines peut se faire au moyen de réseaux d’hydrophones fixes ou encore de planeurs autonomes équipés de système de surveillance acoustique passive (SAP) et de planeurs munis d’appareils de conductivité, température, profondeur (CTD). Des satellites reçoivent et transmettent les données.

Au Canada, l’Ocean Tracking Network (OTN) et le Marine Environmental Observation, Protection and Response Network (MEOPAR) dirigent l’utilisation de véhicules sous-marins autonomes (VSA) pour la collecte de données sur les mammifères marins. En plus d’hydrophones, l’OTN et le MEOPAR utilisent deux principaux types de planeurs :

  • Planeurs océaniques : Ces planeurs, qui transmettent des données en temps quasi réel, glissent sur la surface de l’océan grâce à l’énergie solaire et des vagues.
  • Planeurs Slocum : Capables de modifier leur flottabilité et de se submerger pour dresser des profils de conductivité, température, profondeur dans la colonne d’eau, ces planeurs sont programmés pour remonter à la surface à toutes les deux à quatre heures.
Un planeur ressemble à un petit avion jaune dans l'eau
Les planeurs Slocum peuvent modifier leur flottabilité et se déplacer de haut en bas dans la colonne d’eau jusqu’à une profondeur de 1000 mètres. © CEOTR/CC BY 4.0

Les cétacés émettent des sons pour différentes raisons, y compris pour communiquer et pour détecter des proies. Ce sont ces sons qu’enregistrent les planeurs. Après l’enregistrement d’un son, le planeur analyse automatiquement le spectrogramme pour identifier l’espèce entendue et transmet les données à un satellite.

Au moyen de cette technologie, le MEOPAR travaille à transmettre les données satellites aux divers navires qui se sont inscrits pour recevoir en temps quasi réel des avertissements du projet WHaLE par l’entremise du système marin d’information automatisé. Les navires peuvent alors adopter des mesures d’atténuation pour minimiser le risque de collision avec des baleines en ralentissant dans des zones à forte concentration de cétacés ou en changeant de cap. Le projet est déjà en cours ici dans le golfe du Saint-Laurent, dans le nord-ouest de l’océan Atlantique et dans le nord-est du Pacifique.

De plus, les chercheurs ont été capables de définir différents habitats privilégiés par les baleines à fanons.

Les planeurs enregistrent aussi les sons aigus émis par le krill et d’autres proies, ce qui permet aux chercheurs de prévoir les habitudes migratoires d’un de leurs prédateurs : la baleine. Il s’agit d’une étape importante dans la détermination de stratégies de gestion, dont l’imposition de limites de vitesse dans le golfe du Saint-Laurent.

Pour connaître la diète d’une espèce de cétacé, les chercheurs peuvent récolter un échantillon de fèces ou analyser le contenu de l’estomac d’une carcasse. Ces deux techniques ont toutefois des limites; elles renseignent seulement sur ce que la baleine a ingéré dans les quelques repas précédents. Deux techniques permettent de se faire une meilleure idée de ce que mangent les baleines : l’analyse des isotopes stables d’azote (N) et de carbone (C) et celle des acides gras contenus dans les fanons et autres tissus des baleines.

Des témoins à questionner

Quand un rorqual s’échoue sur les rives du Saint-Laurent, l’équipe de Véronique Lesage (IML-MPO) se rend sur les lieux pour récupérer des «témoins» importants qui seront ensuite «questionnés» en laboratoire : des fanons et des échantillons de peau, gras et muscle. De plus, un programme de biopsie des grands rorquals permet d’obtenir des échantillons de peau et de gras sur des animaux vivants. Ces «témoins» révèleront le régime alimentaire des rorquals et son évolution dans le temps.

Les isotopes stables

Cette analyse consiste à mesurer l’abondance des isotopes stables 13C et 15N relativement aux formes plus courantes de ces éléments, 12C et 14N. Ces «signatures» permettent d’obtenir des informations sur le type de proies ingérées (ex. plancton ou poisson) et sur la région où l’animal s’est alimenté (ex. estuaire ou golfe). Les mesures obtenues dans les échantillons de peau et de muscle reflètent ce que le rorqual a mangé dans les deux derniers mois. Le fanon, lui, est une véritable archive des 10 à 15 années ayant précédé la mort de l’animal: plus on s’éloigne de la gencive, plus on remonte dans le temps!

Les acides gras

Il existe une grande diversité de chaînes d’acides gras dans les écosystèmes marins. Chaque espèce animale a une signature en acides gras qui lui est propre et qui dépend de son alimentation. En comparant les acides gras qu’on retrouve dans la couche de graisse d’une baleine avec ceux qu’on retrouve dans ses proies potentielles, on peut savoir les espèces qu’elle a consommées.

Les secrets génétiques, les polluants accumulés et même l’alimentation sont des informations qui peuvent être recueillies grâce à un minuscule morceau de peau et de gras. Il suffit d’armer une arbalète avec une fléchette munie d’un dard. On prélève ainsi quelques milligrammes de peau et de gras, sans immobiliser la baleine et sans la déranger plus de quelques secondes. Dans le Saint-Laurent, le MICS utilise cette technique depuis 1990 pour identifier le sexe des rorquals à bosse, des rorquals bleus , des rorquals communs et des petits rorquals. Le GREMM fait des biopsies sur des bélugas depuis 1994 pour identifier le sexe et les liens familiaux et depuis 1998 sur les rorquals communs pour déterminer, entre autres, d’où viennent ces géants.

Un béluga reçoit une fléchette en biopsie. © GREMM

Est-ce que ça fait mal?

Avant d’être effectuées, les biopsies de bélugas ont fait l’objet d’une évaluation prudente par le GREMM. Il s’agit tout de même d’obtenir un petit morceau de peau et de gras d’un animal vivant faisant partie d’une population menacée. Après avoir pesé le pour et le contre, le GREMM a décidé d’aller de l’avant en 1994, tout en suivant de près les risques possibles de cette intervention. Après trois années de données, Véronik de la Chenelière, lors de sa maîtrise à l’Université McGill et supervisée par le GREMM, a analysé en détails les risques et les bénéfices de cette technique. Dans son mémoire, elle propose une démarche pour aider la prise de décision dans le cas de projets de recherche sur des populations protégées. Cette démarche, assez générale, pourra aider les chercheurs dans leur étude des populations protégées. Elle a conclu que les biopsies représentent peu de risques pour les bélugas du Saint-Laurent, mais qu’elles peuvent apporter des bénéfices importants à cette population puisque le projet vise la protection des bélugas.

La progestérone est une hormone stéroïde sécrétée par l’ovaire chez les femelles mammifères. Il a été démontré qu’en analysant le sang, la salive, les sécrétions oculaires, les fèces ou la couche de gras sous-cutanée de certaines espèces de cétacés, dont les petits rorquals, les rorquals communs et les épaulards, il est possible de déterminer le stade de maturité ou la période du cycle reproductif chez les femelles. On peut ainsi arriver à trouver l’âge auquel les femelles deviennent matures sexuellement ou même faire passer des tests de grossesse aux baleines! Des questions de cet ordre peuvent aider les biologistes à mieux comprendre l’état des populations. L’avantage de cette méthode est qu’elle ne nécessite qu’un petit échantillon qui peut être recueilli assez facilement sur des animaux vivants dans leur milieu naturel.

Des chercheurs et chercheuses sont même parvenus à doser la progestérone à partir des souffles des baleines! La méthode d’analyse est relativement nouvelle, mais elle est très prometteuse.

Le souffle des baleines contient la réponse à de nombreux mystères. Il renferme souvent des cellules mortes qui portent des informations sur l’ADN ainsi que sur les hormones, les lipides, les protéines et les microbes présents dans les voies respiratoires des baleines. Les scientifiques sont ainsi en mesure de non seulement diagnostiquer des maladies, mais également de garder une trace de ce que contiennent les voies respiratoires d’une baleine en santé. L’échantillonnage du souffle peut également être utilisé pour détecter une grossesse chez certaines espèces.

Deux méthodes principales sont employées pour recueillir un échantillon de souffle :

À l’aide d’une perche

Des échantillons de souffle de baleine peuvent être prélevés à l’aide d’une boite de Pétri fixée à l’extrémité d’une longue perche, positionnée au-dessus du ou des évent(s). © Katy Foster/NOAA Fisheries (Permis n° 21368)

Avec cette méthode conventionnelle, une boite de Pétri est fixée à une longue perche que quelqu’un tient, depuis un navire, au-dessus d’une baleine en train d’expirer. Avant d’approcher une baleine, l’équipe de recherche recueille des données sur l’animal et enregistre sa séquence respiratoire afin de mieux prévoir ses intervalles de surface. Bien que cette méthode soit satisfaisante pour le recueil d’échantillons, elle nécessite que le navire soit assez proche de la baleine, ce qui risque de provoquer une augmentation de ses hormones de stress.

À l’aide d’un petit drone

Pour les baleines au souffle puissant, un drone permet de collecter du souffle sans avoir besoin d’approcher l’embarcation de l’animal. L’utilisation d’un drone est une méthode comparativement moins invasive qui consiste en un véhicule aérien sans pilote, souvent appelé drone, une charge utile (souvent une caméra ou une autre pièce d’équipement fixée sur le drone) et une station terrestre. Grâce aux progrès des technologies aériennes et à leur convivialité, le marché regorge de drones de toutes formes et de toutes tailles. Cependant, un drone conçu pour recueillir les échantillons de souffle d’un géant océanique ne peut pas se contenter d’être n’importe quel drone; il doit être imperméable et avoir la capacité de résister à la forte poussée ascendante qui accompagne le souffle d’une baleine. De plus, l’utilisation d’un drone en mer n’est pas forcément une tâche aisée. Cela demande des compétences, de l’exactitude et de la précision, en particulier lorsque l’on travaille avec des mammifères marins. De plus, le décollage et l’atterrissage depuis une plateforme mobile (un bateau, dans ce cas) exigent une formation appropriée des membres de l’équipe et une coordination entre eux.

Les opérateurs de drone qualifiés travaillent en équipe d’au moins deux personnes : un pilote responsable et un observateur. Pour les opérations en mer, l’observateur a souvent aussi la responsabilité de lancer le drone et d’aider à le récupérer.

Pour prélever un échantillon de souffle, le drone est équipé d’une boite de Pétri fixée sur le dessus ou le devant de l’appareil. Avant d’approcher une baleine, l’équipe de recherche recueille des données sur l’animal et enregistre sa séquence respiratoire afin de mieux prévoir ses intervalles de surface. Une fois que tout est en place et prêt à fonctionner, l’UAS est piloté au-dessus de l’eau et dirigé vers la baleine lorsqu’elle se trouve en surface, pour obtenir un échantillon de son souffle.

Une fois les échantillons prélevés à l’aide de l’une ou de l’autre des méthodes, ils sont stockés à -80 degrés Celsius afin d’assurer qu’ils restent utilisables pour les analyses.

Remarque : Des permis spéciaux sont exigés pour faire voler un drone à proximité de mammifères marins à des fins de recherche

Il n’est pas facile de compter des baleines! Pour y arriver les scientifiques effectuent des inventaires aériens. Du haut des airs, les baleines sont bien visibles quand elles viennent respirer en surface. Elles n’y restent toutefois qu’un très bref moment puisqu’elles passent entre 40 et 80% de leur vie sous la surface.

Méthode pour compter les baleines :

  • On survole une partie du territoire où vivent les baleines en suivant un parcours précis (systématique ou aléatoire, selon la méthode retenue) préférablement au cours d’une journée sans vent offrant une excellente visibilité.
  • Au cours de ces inventaires, il peut y avoir des relevés visuels, photographiques ou une combinaison des deux. Lors des relevés visuels, des observateurs relèvent la présence de baleines. Pour les relevés photographiques, un appareil photographique prend des clichés à intervalles réguliers.
  • De retour au laboratoire, on compte les baleines visibles sur les clichés.
  • Pour obtenir un estimé du nombre de baleines dans une région géographique donnée, il faut d’abord ajuster le nombre de baleines dénombrées sur les clichés pour tenir compte des secteurs non couverts par le survol.
  • Il faut ensuite corriger le nombre obtenu pour tenir compte des animaux qui étaient en plongée, donc invisibles à la caméra et au regard au moment du passage de l’avion.


Chaque baleine est unique. Observez les marques naturelles comme la pigmentation, la coloration et la forme de la nageoire dorsale. Remarquez aussi la présence de difformités ou de cicatrices.

La photo-identification a été utilisée, depuis les années 1930, sur plusieurs espèces, depuis les éléphants jusqu’aux gorilles en passant par les phoques, les girafes et les guépards. Elle est aujourd’hui utilisée par les chercheurs dans le Saint-Laurent pour étudier les bélugas, les rorquals communs, les rorquals bleus, les rorquals à bosse, les petits rorquals, les cachalots et les baleines noires. Elle leur permet de suivre les déplacements, l’organisation sociale et les comportements des baleines, et d’estimer leur abondance. Suivre les baleines grâce à des tags ou à leur empreinte génétique demande plus de ressources et comporte plus de risques pour les animaux et les chercheurs. La photo-identification est préférée puisqu’elle est moins invasive, mais elle reste un exercice en patience et en observation.

Chaque heure passée en mer avec les baleines se traduit par plusieurs heures de travail en laboratoire. Les photos sons analysées avec soin, comparées avec celles de plusieurs individus et finalement appariées selon une série de critères rigoureux. Avec le temps, la technique a évolué : laissant de côté les pellicules de film noir et blanc, les photos numériques sont aujourd’hui utilisées. Retravaillées ou traitées par ordinateur, ces photos nous révèlent plus rapidement les visages des géants!

Pour le moment, aucun programme informatique ne fournit un résultat aussi précis que la reconnaissance visuelle humaine des photos. Le travail demande donc beaucoup d’heures et de patience! Pour découvrir le travail d’appariement (le match) des bélugas en détail, lisez ces deux carnets de laboratoire: L‘appariement de bélugas: un travail «matchement» intéressant et sa suite.

Le «match» de béluga permet de reconnaitre les bélugas individuellement.

À moins de mesurer un spécimen échoué sur la plage, il est presque impossible de mesurer une baleine en train de nager dans l’océan. Toutefois, les biologistes ont besoin de ces informations — la longueur, la largeur, la hauteur, la circonférence, la masse, etc. — pour avoir une idée de l’état de santé d’un animal.

Prendre des mesures précises de la morphologie des cétacés présente plusieurs défis : ils sont immergés dans l’eau, fréquemment en mouvement et leur corps, loin d’être plat comme une crêpe, est tout en courbe.  Les chercheurs ont donc développé plusieurs méthodes pour y arriver : certaines se font en présence de l’animal, comme la photogrammétrie, alors que d’autres ne requièrent pas la présence de l’animal, comme la mesure de la taille de la bouse produite par un éléphant pour connaitre sa masse.

Transformer des photos en mesure

Au 19e siècle, Aimé Laussedat, colonel et professeur de géométrie français, découvre qu’il est possible de mesurer des distances à l’aide de photographies de paysages. Les mesures d’un objet ou d’un animal peuvent être calculées à partir de photographies lorsque le ratio de la longueur focale de la lentille et la distance entre la caméra et l’objet sont connus. Cette méthode est encore utilisée de nos jours, par exemple pour mesurer des cachalots macrocéphales en surface. Les chercheurs doivent combiner la méthode d’Aimé Laussedat avec un lasermètre (range finder) pour connaitre la distance entre la caméra et l’objet.

Les biologistes peuvent aussi utiliser des lasers parallèles pour obtenir directement une échelle de mesure. Grâce aux lasers, la mesure est projetée sur l’animal. De cette façon, plus besoin d’un lasermètre ou d’analyses complexes. Cette méthode est utilisée sur des cétacés faisant surface.

Depuis quelques années, la photogrammétrie est combinée avec une caméra haute résolution perchée sur un drone afin de capter des images des baleines sans faire intrusion dans leur quotidien. Les drones sont peu bruyants et stables en vol, ce qui leur permet de voler près de l’eau sans perturber les baleines. Grâce à cette méthode peu intrusive, plus besoin d’utiliser des sédatifs pour immobiliser les animaux, de les toucher et d’amener de l’équipement encombrant sur le terrain.

L’équipage du Bleuvet, le bateau de recherche du GREMM, utilise des images prises à l’aide d’un drone, combinées à la photogrammétrie, pour mesurer l’état de santé des bélugas du Saint-Laurent. La plaque sert à étalonner les photos. © GREMM

Les photos sont-elles fiables?

Pour décrire les mammifères marins, les biologistes combinent les données obtenues par photogrammétrie avec des modèles morphologiques. Mathématiquement, ils transforment l’animal en une série de cônes tronqués pour estimer les mesures de l’animal.

La prochaine étape est de s’assurer que les modèles sont fiables : est-ce que les résultats s’approchent de la réalité? Pour ce faire, on calcule la différence entre les données du modèle mathématique et celles des mammifères en chair et en os (soit en captivité ou des carcasses échouées). Si la variation est petite, on peut considérer que les mesures obtenues par photogrammétrie sont aussi efficaces qu’un mètre ou une balance!

diagrammes de phoques coupés en rondelle pour des calculs de taille.
Les biologistes utilisent les cônes tronqués pour calculer le volume du pannicule du phoque de Weddell (Leptonychotes weddellii). Cette couche de gras protège les mammifères marins du froid dans les eaux glaciales. Le pannicule fournit une indication de la balance énergétique de l’animal. © Shero et coll.

Pour en savoir plus

Comment mesurer la longueur d’une baleine? (Baleines en direct, 01/11/2017)

Avec les bélugas… et leur tour de taille (Baleines en direct, 27/07/2018)

Quand une baleine meurt, sa carcasse est souvent transportée par les courants et les marées, et elle peut échouer sur la plage. Les scientifiques étudient ces carcasses afin de connaître les polluants et les maladies qui menacent la santé des baleines.Le long du Saint-Laurent, signalez les échouages de mammifères marins au Réseau québécois d’urgences pour les mammifères marins au 1-877-7baleine (1-877-722-5346). S’il s’agit bien d’un mammifère marin, une équipe est envoyée sur place pour évaluer l’état de la carcasse et prendre des mesures et des échantillons.

Le vétérinaire Stéphane Lair et son équipe se préparent à une nécropsie d’un béluga. © Josiane Cabana

Si c’est un béluga et que la carcasse est fraiche, elle sera envoyée par camion à la Faculté de médecine vétérinaire de l’Université de Montréal , à Saint-Hyacinthe. Une nécropsie détaillée et des analyses chimiques permettront d’en apprendre beaucoup sur les causes de décès de l’animal et son exposition à la pollution.

Les baleines ne passent que 10 à 20 % de leur temps à la surface. C’est souvent tout ce dont les scientifiques disposent pour les étudier. Dans le Saint-Laurent, les scientifiques utilisent la télémétrie satellite et la télémétrie radio. Ces techniques permettent d’étudier les baleines dans leur monde, sous la surface de l’eau.

Idéal pour comprendre les détails de la vie d’une baleine et suivre ses déplacements sur de courtes distances.

Télémétrie radio

Janie Giard et Robert Michaud, du GREMM et Véronique Lesage, de l’Institut Maurice-Lamontagne (Pêches et Océans Canada), étudient plusieurs espèces de rorquals à l’aide d’enregistreurs de données munis d’émetteurs radios. Certains émetteurs, comme ceux développés par les chercheurs du Woods Hole Oceanographic Institution pour un projet sur les bélugas en collaboration avec le GREMM, sont munis d’un dispositif qui enregistre les sons. Ces émetteurs permettent d’étudier les comportements vocaux des bélugas et leur exposition au bruit ambiant.

Deux techniques sont utilisées pour poser la balise sur le dos des baleines : avec l’aide d’une perche ou d’une arbalète.

Télémétrie satellite

Idéal pour étudier les déplacements d’une baleine sur une grande distance et pour obtenir des résumés d’information sur ses activités pendant de longues périodes. Toutefois, elle comporte de nombreux défis:

  • La pose d’émetteurs sur des animaux en liberté ne faisant surface que brièvement et qui sont souvent difficiles à approcher;
  • Les coûts élevés de ce type de balises et de l’abonnement à un système de communication satellite;
  • Le développement de prototypes ne blessant pas les baleines;
  • Et les aléas auxquels est soumise une balise fixée sur un corps lisse et hydrodynamique se déplaçant à grande vitesse dans l’eau et interagissant avec d’autres corps et obstacles!

 

Une équipe composée de chercheurs de Pêches et Océans Canada, du MICS et du Alaska Sealife Center utilise depuis 2009 la télémétrie sur les rorquals bleus du Saint-Laurent pour documenter, du printemps à l’automne, les déplacements des animaux, leur utilisation des secteurs connus, et en découvrir de nouveaux, y compris des aires d’hivernage.