Avec une population totale estimée à moins de 350 individus, les baleines noires de l’Atlantique Nord sont une des espèces de cétacés les plus menacées au monde. Leur survie aujourd’hui ne tient qu’à un fil, et dépend de notre capacité à partager l’espace maritime avec ces géantes.

[En savoir plus sur les baleines noires de l’Atlantique Nord]

Dodues et assez lentes, les baleines noires – aussi appelées baleines franches ou baleines de Biscaye – ont été chassées intensivement pendant des siècles, presque jusqu’à l’extinction. Aujourd’hui, la baleine noire de l’Atlantique Nord, qui vit principalement le long de la côte Est des États-Unis et du Canada, fait face à de nouveaux dangers: les empêtrements dans les engins de pêche et les collisions avec les bateaux. Ces dernières années, les changements climatiques semblent modifier les habitudes des proies de la baleine noire de l’Atlantique Nord, entrainant un changement migratoire de l’espèce. Alors qu’elle passait l’été dans la baie de Fundy, elle s’aventure de plus en plus dans le golfe du Saint-Laurent, entraînant une hausse des mortalités.

Depuis 2017, 34 carcasses ont été retrouvées dans les eaux étasuniennes ou canadiennes. Une mortalité exceptionnelle que n’arrivent pas à compenser les rares naissances comptabilisées dans le même intervalle. Désormais, les baleines noires font l’objet d’une surveillance particulière et de mesures de protection spéciales. Cela suffira-t-il à sauver cette espèce au bord de l’extinction ?

Tout au long de l’année 2021, retrouvez sur cette page l’actualité des baleines noires.

Dans nos archives, retrouvez les évènements des années 2017, 2018, 2019 et 2020, et continuez à suivre toute l’actualité pour l’année 2022.

Actualités 2021

La femelle baleine noire Snow Cone a récemment donné naissance à un baleineau. La paire a été aperçue en Géorgie, aux États-Unis, le 2 décembre 2021, générant une certaine surprise au sein de la communauté scientifique. Cette femelle avait été repérée plus tôt dans l’année trainant une grande quantité de cordage de pêche. Quatre opérations de désempêtrement ont eu lieu au cours de l’année afin de libérer la baleine de ses entraves. Malgré les interventions, du cordage est resté coincé en travers de sa bouche.  La présence de ces cordages représente un risque pour le bien-être et la survie du duo. Il s’agirait du deuxième baleineau de Snow Cone. Son premier veau, né en 2020, est cependant décédé après quelques mois de vie suite à une collision avec un bateau.

Cette nouvelle naissance est aussi la deuxième de la saison. Le premier veau de la saison 2021-2022 est celui de la femelle Slalom, aperçu pour la première fois aux côtés de sa mère en Caroline du sud.

Au cours de l’été 2021, les chercheurs du NOAA ont identifié 187 baleines noires de l’Atlantique Nord dans le golfe du Saint-Laurent, équivalant environ à 40% de la population totale. Ce processus est rendu possible grâce à des microphones sous-marins, appelés hydrophones, ainsi qu’à la photo-identification des individus, basée sur des photographies collectées entre 2015 et 2019 par surveillance aérienne. La plupart de ces baleines noires demeurent dans la région pendant l’été et l’automne, y effectuant des comportements sociaux et alimentaires, et la majorité d’entre elles reviennent presque chaque année. L’observation des baleines noires a également permis de noter certains comportements, par exemple, que les individus présents dans le golfe ne parcourent généralement pas de grandes distances en une seule journée. De plus, certaines baleines noires fréquentent tant le nord que le sud du golfe, particulièrement les femelles enceintes.

Le nombre de baleines noires de l’Atlantique Nord identifiées représente une proportion importante de la population, considérant qu’avant 2010, il était rare de trouver ces baleines dans le golfe du Saint-Laurent. Auparavant, ces géantes noires fréquentaient, entre autres, la baie de Fundy, région qu’elles ont de plus en plus délaissée dans la dernière décennie. Il est essentiel d’effectuer un suivi serré du mouvement et de la distribution des baleines noires dans l’environnement afin d’assurer leur conservation. Si on ne sait pas où elles se trouvent, la mise en place de mesures de protection efficaces n’en est que plus ardue.

Lien vers l’étude scientifique : (2021) Leah M. Crowe, Moira W. Brown, Peter J. Corkeron, Philip K. Hamilton, Christian Ramp, Stephanie Ratelle, Angelia S. M. Vanderlaan, Tim V. N. Cole. In plane sight: a mark-recapture analysis of North Atlantic right whales in the Gulf of St. Lawrence. Endangered Species Research, 46: 227-251.

Un premier veau de baleine noire de l’Atlantique Nord a été vu aux côtés de sa mère au large de la Caroline du sud le 10 novembre dernier, 5 jours avant la période officielle de mise bas de l’espèce. Le duo n’ayant été aperçu qu’une seule fois par des plaisanciers, l’identité de la nouvelle maman demeure pour l’instant indéterminée. Malgré cela, il s’agit d’une merveilleuse façon de commencer la saison!

En savoir plus : New Baby Alert – First Right Whale Calf of the Season Spotted! (WDC, 15 novembre 2021)

Depuis 2010, les baleines noires de l’Atlantique Nord se retrouvent fréquemment hors de leurs aires d’alimentation estivales traditionnelles : le plateau néo-écossais, comprennent le golfe du Maine et la baie de Fundy. En réalité, le réchauffement des eaux profondes de ces régions nuit à Calanus finmarchicus, un petit copépodes constituant une proie de choix pour les baleines noires. Celles-ci auraient donc délaissé ces zones au profit, entre autres, du golfe du Saint-Laurent.

Une équipe de chercheurs a montré que ce changement de distribution coïncide avec une baisse draconienne du nombre annuel de naissances. La reproduction, la mise bas et les soins néonataux sont des activités particulièrement énergivores. Si les baleines noires de l’Atlantique Nord ne peuvent pas se nourrir adéquatement, elles ne peuvent pas se reproduire avec succès. Les chercheurs spéculent donc que les nouvelles aires d’alimentation ne satisfont pas les besoins nutritifs des baleines noires de l’Atlantique Nord. Leur faible taux de natalité actuel représente un risque grandissant pour la survie de l’espèce, qui se trouve désormais en danger critique d’extinction.

Tout est détaillé dans cet article :Les baleines noires de l’Atlantique Nord, ces réfugiées climatiques (Baleines en direct, 8 novembre 2021)

L’étude originale est ici: (2021) Erin L. Meyer-Gutbrod, Charles H. Greene, Kimberley T.A. Davies, et David G. Johns. Ocean regime shift is driving collapse of the North Atlantic right whale population. Oceanography, 34(3): 22-31.

D’après un rapport publié en février par l’organisme Oceana Canada, les navires respecteraient très peu les limites de vitesse volontaires proposées par Transport Canada afin de limiter les risques de collisions avec les baleines noires.  En effet, au cours des périodes de migration des baleines, au printemps et à l’automne, les navires qui passent le détroit de Cabot sont soumis à une limitation volontaire à 10 nœuds nautiques. Cette vitesse permettrait de réduire les risques de collisions fatales avec les baleines noires de l’Atlantique. Pourtant, durant la période d’étude, seul le tiers des traversées du détroit de Cabot ont été effectuées à la vitesse suggérée. Dans 42% des cas, les navires allaient à une vitesse excédant les douze nœuds nautiques.

Un problème similaire se fait sentir aux États-Unis, où, d’après un rapport publié en juin, 87,5% des navires traversant des zones de restriction saisonnières en Caroline du Nord et en Géorgie ne respectent pas les limites de vitesse, même si celles-ci sont obligatoires. Dans la zone de navigation reliant Cape May à la Floride, seulement 15% des navires respectent les limites de vitesse volontaires. Les cargos seraient les navires les moins respectueux des limites obligatoires ou suggérées, représentant 42% des cas de non-coopération dans les zones où la vitesse est suggérée, et 50% des cas de non-coopération dans les zones où la limite est obligatoire.

Malgré tout, la création par le gouvernement du Canada d’une période de ralentissement volontaire de la vitesse dans le détroit de Cabot semble avoir aidé à ralentir la circulation: avant que la période ne commence, c’est près de 90% des bateaux qui naviguaient à une vitesse de plus de dix nœuds nautiques, contre 66% au cours de la période de restriction. Ainsi, les traversées dangereuses ont diminué, mais seulement d’un peu plus de 20%, ce qui n’est pas suffisant, selon Oceana Canada.

L’organisme souhaite que Transport Canada impose une limite de vitesse obligatoire plutôt que volontaire, qui s’étendrait tout au long de la saison estivale, plutôt que seulement lors des deux périodes de migrations au printemps et à l’automne. L’organisme réclame également que cette mesure s’applique à l’ensemble des navires, incluant ceux mesurant moins de 13 mètres, qui ne sont actuellement pas concernés par les recommandations du gouvernement. Dans les zones où les limites de vitesse sont déjà obligatoires, Oceana Canada propose de consacrer davantage de ressources à l’application des lois et à la surveillance.

Lire les rapports : The Edge of Extinction: Protecting North Atlantic Right Whales

Speeding Toward Exctinction : Vessel Strikes Threaten North Atlantic Right Whales

Depuis 2018, une flotte de trois planeurs ratisse le golfe du Saint-Laurent dans le but de repérer les baleines noires et d’éviter les collisions avec les navires. Cet été, un nouveau robot rejoint la flotte existante.

Ces robots sous-marins sont équipés de capteurs permettant à la fois de détecter la présence des baleines, de déterminer la quantité de nourriture accessible et de mesurer la température de l’eau. Le nouveau robot transportera un hydrophone sophistiqué, qui identifiera les sons émis par les baleines noires et transmettra leur position à l’organisme Ocean Tracking Network, responsable du projet.

Les planeurs sont jaune banane, mesurent environ un mètre et demi et peuvent passer trois mois sous l’eau, récoltant des données en tout temps. Cette technologie, jumelée à plusieurs autres initiatives , contribue à dresser un portrait représentatif de la répartition des baleines noires sur le territoire.

Pour en savoir plus sur les méthodes développées afin d’éviter les collisions: 5 initiatives prometteuses pour éviter les collisions avec les baleines (Baleines en direct, 05/01/2021)

Mardi 13 juillet, un mâle baleine noire de cinq ans empêtré dans du cordage de pêche a été repéré à l’est de l’ile Miscou, au Nouveau-Brunswick. D’après les informations transmises par Pêches et Océans Canada (MPO), la baleine, identifiée par le numéro #4615 au catalogue du New England Aquarium, serait en plus grièvement blessée. Un émetteur satellite a pu être fixé au cordage afin de suivre la baleine. Ainsi, une opération de désempêtrement pourrait être tentée «si les conditions météorologiques et les conditions de mer le permettent», précise le communiqué du MPO.

Cette nouvelle vient briser une longue séquence d’espoir pour les baleines noires qui fréquentent le Saint-Laurent. Depuis 2019, on ne comptait aucune observation de baleine noire fraichement empêtrée en eaux canadiennes.

De son côté, la femelle baleine noire Snow Cone, qui a déjà fait l’objet de trois opérations de désempêtrement et qui continue à trainer des cordages de pêche, a été revue, également aux alentours de l’ile Miscou au Nouveau-Brunswick. «L’équipe de sauvetage des baleines de Campobello a été en mesure d’enlever une corde supplémentaire de l’animal le 8 juillet. D’autres cordages restent accrochés à l’animal, mais la corde autour de la nageoire pectorale a pu être desserrée», relate le MPO.

Bonne nouvelle cependant: la baleine semble en bonne condition physique et capable de s’alimenter malgré la présence des cordages. À l’heure actuelle, l’origine de l’engin de pêche est inconnue.

Mise à jour: en date du 21 juillet 2021, la baleine noire #4615 n’a pas été retrouvée. Snow Cone, quant à elle, a été revue durant la fin de semaine du 17 et 18 juillet, mais n’a pas été localisée dans les jours suivants par l’équipe en mer, qui espérait tenter un désempêtrement.

Les baleines noires de l’Atlantique Nord mesureraient en moyenne un mètre de moins qu’il y a quarante ans. Ainsi, certaines baleines âgées de 10 ans aujourd’hui font la même taille que des baleines âgées de 1 ou 2 ans dans les années 1980. Cette troublante découverte est issue d’une étude réalisée par plusieurs chercheurs étasuniens. D’après les auteurs, ce retard de croissance est attribuable aux empêtrements dans des engins de pêche, qui entrainent des dépenses énergétiques supplémentaires.

En savoir plus: Decreasing body lengths in North Atlantic right whales

La saison des naissances 2020 était déjà considérée comme exceptionnellement bonne pour les baleines noires de l’Atlantique Nord, avec un total de 17 naissances et 16 veaux documentés en bonne santé début mars.  Mais le chiffre est encore plus enthousiasmant. Grâce à un heureux hasard, les biologistes ont appris qu’un 18e veau était né, loin des regards!

Le 20 mai 2021, Amy Tudor, une naturaliste de croisières aux baleines, a eu la surprise de croiser la route d’une baleine noire et de son veau à partir d’un traversier à l’entrée de la baie de Fundy, en Nouvelle-Écosse. Et elle a pu leur tirer le portrait! Grâce à ses photos, les spécialistes ont reconnu la femelle surnommée Lobster (#3232) dans le catalogue tenu par le New England Aquarium. Surprise! cette baleine de 19 ans n’était pas comptabilisée parmi les heureuses mamans de la saison. Son veau s’ajoute donc aux naissances de la saison, portant à 18 le nombre de naissances documentées.

Lobster, qui tire son nom de la callosité en forme de homard sur le devant de sa tête, a donné naissance à son premier baleineau en 2015, à l’âge de treize ans. Cette année-là, déjà, elle était restée très discrète et n’avait été aperçue qu’une seule fois en compagnie de son petit. Il semble que Lobster se soit montrée tout aussi insaisissable cette année! Cette aventure montre la difficulté de surveiller et de documenter ces géantes des mers.

La zone de mise bas la plus connue pour les baleines noires de l’Atlantique Nord se trouve le long des côtes sud-est des États-Unis, au large de la Floride et de la Géorgie. Mais ce n’est pas la première fois que des baleineaux sont observés en premier lieu plus au nord, au large de Cape Cod par exemple. Lobster a-t-elle mis bas dans une autre zone de reproduction, plus au Nord, inconnue des chercheurs, ou n’a-t-elle simplement pas été observée lors des survols aériens de surveillance des naissances? Pour l’instant, le mystère demeure.

En savoir plus : 18th Right Whale Mother Discovered Off Brier Island, Nova Scotia (Anderson Cabot Center for Ocean Life, 03/06/2021)

 

Tentative de désempêtrement de Snow Cone. © MPO Sciences

Pour la première fois cette année, une opération de désempêtrement a été lancée dans les eaux canadiennes pour venir en aide à une baleine noire de l’Atlantique Nord trainant du cordage de pêche dans son sillage. La baleine en question est Snow Cone, une femelle qui avait déjà fait l’objet de deux interventions aux États-Unis en mars dernier. Cette fois-ci encore, bon nombre de cordages ont pu être enlevés, sans toutefois libérer complètement la baleine.

Pour en savoir plus, lisez notre article sur cette opération à haut risque menée au large du Nouveau-Brunswick par la Campobello Whale Rescue Team, appuyée par les équipes de Pêches et Océans Canada (MPO).

Dimanche 25 avril, Pêches et Océans Canada a repéré la première baleine noire de l’Atlantique Nord de l’année 2021 sur le territoire canadien. Alors qu’un très grand nombre de baleines noires sont encore présentes dans la baie de Cape Cod, aux États-Unis, cette baleine noire solitaire a pris une très légère avance sur ses compagnes pour venir se nourrir dans le golfe du Saint-Laurent.

La baleine, qui n’a pas encore été identifiée, a été photographiée au nord des Îles-de-la-Madeleine grâce à un avion de surveillance de Pêches et Océans dans le cadre du programme de surveillance active autour de cette espèce en danger.

Cette observation déclenche les premières mesures de restriction pour la pêche et la navigation de la saison, afin de réduire les risques d’empêtrements et de collisions. Une première zone de pêche d’environ 2000 km² a ainsi été fermée, et les pêcheurs ont été priés de récupérer les engins de pêche fixes comme ceux utilisés pour le crabe des neiges . Cette zone sera fermée à l’activité de pêche pendant 15 jours, mais si la baleine est repérée de manière régulière dans la même zone, celle-ci restera fermée pour l’intégralité de la saison.

Suivez les détections de baleines noires ici : https://dfo-mpo.gc.ca/species-especes/mammals-mammiferes/narightwhale-baleinenoirean/alert-alerte/index-fra.html

Et de 17! La baleine noire #3593 a été repérée il y a quelques jours avec un veau. C’est une surprise pour les scientifiques qui suivent la population de baleines noires de l’Atlantique Nord: #3593 n’a été observée que quelques fois depuis sa première apparition en 2005… et n’avait pas été vue depuis 2015! On ignorait jusqu’ici son sexe et on ignore encore son âge… et où elle passe ses étés!

Pour 2021, on compte désormais 17 nouveaux-né dont la paire mère-veau a été formellement identifiée, et 16 sont présumés encore en vie à l’heure où nous écrivons. On peut ajouter à ce compte le tout premier veau de la saison, dont la carcasse, porteuse de marques d’hélices et de collision, a été retrouvée en novembre 2020, mais dont la mère n’a pas pu être identifiée. On peut aussi comptabiliser le jeune veau baleine noire aperçu en décembre aux Canaries, même si sa survie semble peu probable.Un total de 19 naissances, semblerait-il.

Ces chiffres font de la saison de reproduction actuelle l’une des meilleurs en 10 ans.

Le point sur les naissances 2021 est ici.

Après avoir été repérée en difficulté lors d’un survol aérien, la baleine noire baptisée Snow Cone (#3560), une femelle reproductrice de 16 ans, a été partiellement libérée d’un empêtrement dans des cordages de pêche par l’équipe du Center for Coastal Studies Marine Animal Entanglement Response.

L’équipe du CSS pense que cela faisait déjà plusieurs mois que la baleine était empêtrée. Même si elle a été repérée au large du Massachusetts, il est difficile de savoir où l’incident a eu lieu. Les intervenants ont retiré plus de 100 mètres de cordages, sans réussir à ôter les cordes coincées dans la bouche, qui l’empêchent probablement de s’alimenter correctement. L’équipe espère rejoindre la baleine dans les prochains jours pour terminer le travail de dépêtrement.
C’est une année difficile pour Snow Cone. Cette baleine avait donné naissance une première fois la saison dernière, mais
le petit est décédé tragiquement suite à une double collision avec des navires.

Source : CSS

Avec presque un mois d’avance, la baleine noire Millipede (#3520) et son veau sont arrivés dans la baie de Cape Cod, dans le Massachusetts, une zone d’alimentation abritée et très prisée par l’espèce.

D’habitude, les premières baleines noires de l’Atlantique Nord pointent le bout de leurs fanons fin mars ou début avril, mais Millipede était visiblement pressée d’arriver.

La paire avait été repérée la dernière fois début février, au large de Little Talbot Island, en Floride. Ensemble, la mère et son petit ont donc parcouru en un mois 1200 milles nautiques le long des côtes. Un voyage dangereux pour cette espèce particulièrement victime de collisions et d’empêtrements dans les engins de pêche.

Pour preuve des dangers qui guettent ces baleines, l’histoire de la lignée Millipede. Née en 2005, sa mère se prénomme Naevus (#2040) et sa grand-mère Wart ( #1140). Wart a vécu empêtrée dans des engins de pêche pendant au moins trois ans avant d’être libérée par l’équipe de CCS Marine Animal Entanglement Response en 2010. Naevus, la fille de 1990 de Wart, a été documentée empêtrée dans du cordage en aout 2010 dans le golfe du Saint-Laurent, dont elle s’est elle-même délivrée quelques mois plus tard. Millipede, elle, a survécu à une collision avec un navire alors qu’elle était âgée de moins d’un an. Elle doit son nom aux cicatrices laissées par l’hélice sur son flanc droit. Son premier petit, né en 2013, n’a pas été revu dans les mois qui ont suivi sa naissance, et il est peu probable qu’il ait survécu au voyage vers le nord. On souhaite donc bonne chance à son veau de 2021 !

Source : Center for Coastal Studies

En l’espace de quelques semaines, deux carcasses de baleines noires de l’Atlantique Nord ont été retrouvées au large des côtes étasuniennes. La première est la carcasse de l’un des veaux de l’année, celui de la femelle Infinity, et la deuxième est celle d’un mâle adulte surnommé Cottontail, qui avait déjà été repéré empêtré à l’automne.

Ces décès rappellent douloureusement les deux principaux dangers qui guettent les baleines noires: les collisions avec des navires et les empêtrements dans les engins de pêche.

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En prévision du retour au printemps des baleines noires dans l’espace maritime canadien, le gouvernement canadien vient d’annoncer les mesures mises en place pour 2021.

Que ce soit du côté de Transports Canada ou de Pêches et Océans Canada, une grande partie des mesures prises en 2020 ont été reconduites. Les modifications apportées par rapport à l’année dernière visent principalement à améliorer la cohabitation entre les baleines noires et les pêcheurs, en ajustant au mieux les périodes et zones de fermeture de secteur de pêche en fonction de la présence de baleines et en assouplissant la règlementation dans les zones de faible profondeur.

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«Les carcasses observées ne représentent que 36% de tous les décès estimés entre 1990 et 2017.» C’est la conclusion d’une nouvelle étude statistique réalisée conjointement par les équipes de NOAA Fisheries et le New England Aquarium. Ainsi, entre 1990 et 2017, la mortalité réelle serait 2,8 fois plus importante que la mortalité observée.

La mortalité liée aux empêtrements serait particulièrement sous-estimée. «Il y avait des différences substantielles entre le pourcentage de décès déterminés comme étant lié à un empêtrement pendant la nécropsie (49%) et le pourcentage de décès cryptiques entrainés par de graves blessures liées à un empêtrement (87%).»


En savoir plus:
Pace, RM, Williams, R, Kraus, SD, Knowlton, AR, Pettis, HM. Cryptic mortality of North Atlantic right whales.
Conservation Science and Practice. 2021;e346. https://doi.org/10.1111/csp2.346

La saison de reproduction bat son plein chez les baleines noires de l’Atlantique Nord, actuellement présentes dans leur aire de reproduction au large de la Géorgie et de la Floride.

Au 22 janvier 2021, 14 veaux en bonne santé avaient été comptabilisés par les chercheurs. Avec un tel nombre, il s’agit de la meilleure saison des naissances depuis 2016. Une vraie note d’espoir pour l’espèce!

Dans cet article, nous faisons le point sur ces naissances tant attendues et scrutées avec espoir.

 

 

La baleine noire de l’Atlantique Nord baptisée « Minus One », (numéro 2430 au catalogue) photographiée avec son jeune veau, le 11 janvier 2021 près de la plage de Ponte Vedra en Floride. © FWC under NOAA permit 20556-01

 

 

Bilan des mortalités

Depuis 2017, les baleines noires de l’Atlantique Nord traversent ce que l’on appelle un «évènement de mortalité exceptionnelle»: le nombre de carcasses retrouvées chaque années est particulièrement élevé et menace sérieusement la survie de l’espèce. Pour cette raison, le nombre de décès, de naissances et d’empêtrements est très surveillé.

Au cours de cet évènement, les autorités dénombrent 34 carcasses identifiées et 15 individus sérieusement blessés par un empêtrement ou une collision et dont la survie n’est pas certaine.

(Chiffres mis à jour le 23 novembre 2021)

Décès (carcasses identifiées)

Année Décès aux États-Unis Décès au Canada Total
2017 5 12 17
2018 3 0 3
2019 1 9 10
2020 2 0 2
2021 (en cours) 2 0 2
13 21 34

D’après NOAA

Empêtrements et blessures sérieuses

Le pays mentionné correspond au lieu de la première observation de l’animal empêtré ou blessé et peut ne pas être représentatif du lieu où l’empêtrement s’est effectué.

2017: 2 empêtrements (1 au Canada, 1 aux États-Unis)

2018: 5 empêtrements (2 au Canada, 3 aux États-Unis)

2019: 1 empêtrement (Canada)

2020: 3 empêtrements et une collision (États-Unis)

2021 (en cours): 2 empêtrements et 1 collision (États-Unis)

Naissances

Saison (hiver de l’année…) Nombre de veaux comptabilisés
2009 39
2010 19
2011 22
2012 7
2013 20
2014 11
2015 17
2016 14
2017 5
2018 0
2019 7
2020 10
2021 20

Chiffres issus du North Atlantic Right Whale Consortium 2020 Annual Report Card. Pettis, H.M., Pace, R.M. III, Hamilton, P.K. 2021.

 

Liens et ressources

En savoir plus sur l’espèce:
Fiche d’identification de la baleine noire de l’Atlantique Nord

Reconnaitre les individus et découvrir leur histoire:
Catalogue de photo-identification des baleines noires de l’Atlantique Nord

Où sont les baleines noires en ce moment?
Cartes interactives des observations de baleines noires:
WhaleMap et Attentif aux baleines

Surveillance et prévention au Canada:

Découvrir les activités de suivi et de surveillance des baleines noires au Canada mises en place par Pêches et Océans Canada

Comprendre les mesures de gestion des pêches 2021 pour protéger la baleine noire mises en place par Pêches et Océans Canada

Découvrir les mesures de ralentissement en prévention des collisions mises en place par Transports Canada

Ressources en anglais:

Résumé de l’événement de mortalité inhabituelle (chiffres 2017-2021) par NOAA – Fisheries

Retrouver les détails de la saison des naissances 2021 compilés par NOAA-Fisheries

Rapport annuel de l’état de la population par le North Atlantic Right Whale Consortium (NARWC) – Annual report card

Rapport annuel 2020 par Anderson Cabot Center for Ocean Life

Reportages et documentaires :

Entangled (2020) – un film de David Abel et Andy Laub

Les baleines noires (2017) – Reportage Découverte sur Tou.Tv

Deep Trouble (2017) – Podcast en 6 épisodes produit par CBC

Médias sociaux:

New England Aquarium Right Whale Research Program (Facebook)

Center for coastal studies (Facebook)

Grands dossiers - 5/3/2021

Laure Marandet

Laure Marandet est rédactrice pour le GREMM depuis l'hiver 2020. Persuadée que la conservation des espèces passe par une meilleure connaissance du grand public, elle pratique avec passion la vulgarisation scientifique depuis plus de 15 ans. Ses armes: une double formation de biologiste et de journaliste, une insatiable curiosité, un amour d'enfant pour le monde animal, et la patience nécessaire pour ciseler des textes à la fois clairs et précis.

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