«Les mortalités enregistrées en 2019 n’ont rien pour nous rassurer», rappelle Robert Michaud, directeur scientifique du Groupe de recherche et d’éducation sur les mammifères marins et coordonnateur du Réseau québécois d’urgences pour les mammifères marins. En 2019, 17 carcasses de bélugas du Saint-Laurent ont été retrouvées, dont une en dehors de l’aire de distribution habituelle, soit en Nouvelle-Écosse.
En 2018, 12 carcasses avaient été retrouvées contre 22 en 2017 et 14 en 2016. Avec 17 carcasses, on se retrouve dans les nombres moyens des dernières années.
Encore une fois ce n’est pas le nombre de carcasses qui préoccupe les chercheurs. C’est plutôt le type de mortalité et la proportion élevée de femelles parmi les mortalités enregistrées qui inquiètent. Stéphane Lair, professeur titulaire à la Faculté de médecine vétérinaire de l’Université de Montréal précise que «cinq des six bélugas adultes examinés à la Faculté de médecine vétérinaire pour examens post-mortem étaient des femelles, ce qui suggère encore une fois cette année que chez les adultes, les femelles ont un taux de mortalité supérieur à celui des mâles (en assumant que l’échantillon est représentatif des mortalités totales).»
La problématique des dystocies
Un autre élément a marqué l’année : trois carcasses de femelles, dont celle de DL0584, présentaient un fœtus visible au niveau de la fente génitale. Les nécropsies ont permis de savoir qu’elles se sont échouées suite à des complications lors de la mise bas, qu’on appelle une dystocie. « Cette occurrence inhabituellement élevée de dystocie, qui est documentée depuis maintenant une décennie dans cette population, est troublante et représente sans aucun doute une menace à sa conservation. Les causes potentielles de ces dystocies restent incertaines. Des travaux visant à mieux comprendre le lien potentiel entre ces dystocies et la contamination par certains contaminants comme les retardateurs de flammes polybromés sont en cours par une équipe composée de chercheurs de différentes universités », commente Stéphane Lair.
En fait, la moitié des femelles trouvées en 2019 sont mortes de dystocie. On compte aussi deux nouveau-nés parmi les carcasses.
La suite de cette série noire n’est pas de bon augure pour le rétablissement de la population des bélugas du Saint-Laurent.
Les bénévoles du RQUMM ont grandement facilité la réalisation du programme de suivi des carcasses. Le suivi se poursuit à nouveau en 2020. Si vous observez un béluga mort ou en difficulté, comme tout autre mammifère marin, appelez le 1-877-722-5346.