Du tourisme à la géographie, le parcours de Mélissa Tremblay l’a menée jusqu’au Groupe de recherche et d’éducation sur les mammifères marins (GREMM), où elle a occupé plusieurs fonctions avant de devenir responsable de la centrale d’appel du Réseau québécois d’urgences pour les mammifères marins.

Dans le cadre de la journée internationale des femmes et des filles en sciences ce 11 février, nous avons voulu connaitre l’opinion de Mélissa sur le sujet. Elle considère avoir trouvé sa place et pense qu’on peut intéresser les jeunes filles tôt dans leur vie au domaine des sciences. Son parcours est inspirant!

Comment vois-tu la place des femmes en sciences et comment les encourager à s’engager davantage dans le domaine scientifique?

À première vue, tout au long de mes études en sciences, je ne me rappelle pas avoir eu le sentiment d’être sous-représentée comme femme et de devoir travailler plus dur qu’un homme pour obtenir des stages ou faire ma place. Je me concentrais surtout pour démontrer mon intérêt à mes professeurs et avoir de bonnes notes. Néanmoins, j’ai lu un article en 2019, dans la revue Québec Science, qui m’avait choquée. On y mentionnait que les femmes ne formaient que 20% de la main-d’œuvre dans le domaine des sciences et des technologies. Avec du recul, j’ai eu des opportunités intéressantes de travail et de stage tout au long de mon parcours, mais je me souviens d’avoir refusé des postes, car j’allais me retrouver entourée d’hommes et ça m’intimidait. Ça m’a peut-être parfois arrêtée, mais autour de moi, il y a beaucoup de femmes en sciences que ça n’a pas arrêtées, qui font du terrain et qui ont des postes clés.

Si l’on m’avait dit étant jeune que je travaillerais en science et que j’aimerais ça, je ne l’aurais pas cru. Mon parcours vers les sciences est très atypique, ça a pris du temps avant que je développe un intérêt en ce sens. Je me demande parfois: «Si on m’avait offert des jeux scientifiques étant jeune, en plus des jouets de cuisinette, des fours ou des maisons de poupées, est-ce que j’aurais découvert mon intérêt pour les sciences plus rapidement ?»

C’est évident qu’il y a du travail à faire au sein de notre société pour encourager les femmes en sciences, comme présenter plus de parcours inspirants aux jeunes filles pour leur démontrer qu’elles peuvent elles aussi apporter de nouvelles connaissances à la société. On peut aussi augmenter le nombre de bourses destinées aux femmes en sciences. Cependant, je crois aussi que de travailler pour améliorer la conciliation du travail et de la famille encouragerait beaucoup d’entre elles à s’engager et à rester dans le domaine.

Parle-nous un peu de ton parcours

Mon parcours est assez atypique, ma première carrière a commencé en tourisme. J’ai été guide touristique, mais j’avais une part de moi qui voulait travailler dans un parc, en environnement et en conservation. Je lisais beaucoup sur le sujet, et j’ai donc décidé de retourner à l’université faire un certificat en écologie, où je me suis découvert un côté scientifique bien développé. J’ai continué en faisant une majeure en géographie, ce qui m’a permis d’avoir un baccalauréat en sciences. J’ai trouvé un emploi au GREMM par la suite. À l’époque, je savais à peu près faire la différence entre un poisson et une baleine (rires).

Ç’a été un vrai coup de foudre, autant pour Tadoussac que pour la job. J’ai beaucoup lu sur les mammifères marins. Dès mon premier été, en plus d’être naturaliste, j’ai été assistante de recherche, et fait quelques heures au Réseau. L’année d’après, j’ai commencé à faire l’appariement des bélugas. Ça fait maintenant 10 ans que je suis au GREMM et 5 ans que je suis du côté des sciences, mais je continue de faire des activités d’interprétation, car j’aime partager avec les gens.

Comment as-tu vécu cette découverte du monde des mammifères marins ?

La première baleine que j’ai vue, c’était un rorqual bleu. Il avait montré sa queue plus grosse que le Zodiac. J’avais 12 ans, j’étais restée pétrifiée. Par la suite, quand j’ai commencé à travailler au GREMM, j’ai découvert que le milieu marin était fascinant. J’allais en croisière à tous mes congés, parfois deux fois par jour, pour voir les animaux et leurs comportements. J’étais intriguée par ce qui se passait en dessous de l’eau et en même temps éblouie.

Parle-nous d’un souvenir lié à ton emploi au Réseau

Je me suis déplacée à Pointe-aux-Outardes pour prélever des échantillons sur une carcasse de béluga. Il y avait beaucoup de passants, je leur expliquais ce qu’on faisait, mais en même temps j’avais le pied sur la mâchoire pour qu’on réussisse à la casser pour récupérer les dents pour des analyses. Ce n’était pas ma première intervention, mais une des plus marquantes. Ce genre de cas me permet aussi de mieux orienter les bénévoles dans leurs interventions, en les ayant vécues moi aussi.

Être responsable d’un centre d’appels pour des urgences liées aux mammifères marins a son lot d’émotion. Il y a des moments drôles, d’autres sont tristes, certains cas sont intrigants.

Quels sont les défis auxquels tu es confrontée ?

Quand tu reçois un appel, dans 70% du temps, la réponse sera de faire de la sensibilisation. Plus on éduque les gens sur les comportements normaux des animaux, plus ils voudront les protéger. C’est un challenge, surtout quand les témoins sont émotifs. Ils vont parfois penser qu’on ne fait pas grand-chose en tant que tel, mais il faut savoir que toutes les informations que l’on recueille vont enrichir nos bases de données et nous aider à mieux comprendre les différentes populations de mammifères marins.

 

Avec la collaboration d’Anthony François

Actualité - 11/2/2021

Anthony François

Anthony François est responsable du programme d’intervention d’urgences pour les mammifères marins. Il est arrivé au GREMM en 2017, comme répondant au Centre d'appels d'urgences pour les mammifères marins et comme assistant de recherche. Biochimiste et biologiste de formation, il réalise l’importance de la vulgarisation scientifique et de la sensibilisation du public au cours de sa maitrise.

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