Le mercredi 25 octobre, une carcasse de rorqual à bosse s’est échouée à Saint-Maxime-du-Mont-Louis, en Gaspésie. Il s’agissait d’un mâle d’entre deux et quatre ans, qui a pu être identifié. Il s’avère qu’il avait fréquenté l’estuaire du Saint-Laurent pendant l’été!

Cela faisait déjà quelques jours que l’équipe du Réseau québécois d’urgences pour les mammifères marins (RQUMM) suivait la carcasse qui dérivait dans le secteur. Une fois que la carcasse a été retrouvée, une nécropsie partielle a pu être réalisée par le RQUMM et le Réseau canadien pour la santé de la faune (RCSF-Québec). Grâce aux photos obtenues, l’animal a finalement été identifié par l’équipe du Groupe de recherche et d’éducation sur les mammifères marins (GREMM)

Cherche et trouve

Il s’agit de H970, un rorqual à bosse qui avait été repéré dans le golfe, en Minganie et à Sept-Îles ainsi que dans l’estuaire en 2021, 2022 et 2023. Tim Perrero, responsable du recensement des grands rorquals au GREMM, explique que lorsqu’il s’agit de carcasse, ce n’est pas toujours évident d’identifier l’animal : «C’est plutôt rare qu’on arrive à identifier les baleines qui s’échouent, car les carcasses sont souvent trop décomposées.»  

Malgré cette sombre découverte, Tim souligne que l’avantage d’avoir été capable d’identifier l’animal est qu’on pourra en apprendre plus sur l’espèce : «Bien que ce soit triste qu’un animal qui fréquente notre secteur soit retrouvé mort, c’est tout de même positif qu’on ait réussi à l’identifier, puisqu’on va peut-être savoir pourquoi il est mort. La plupart du temps, les individus ne sont tout simplement jamais revus, ce qui laisse en suspens la question de savoir ce qui est arrivé. Est-ce que c’est parce qu’ils sont morts ou parce qu’ils ont délaissé le secteur et pour quelle·s raison·s ? »

C’est grâce à la photo-identification que l’équipe du GREMM a pu reconnaître l’animal. Cette technique de recherche consiste à utiliser les marques naturelles, telles que la pigmentation, la coloration, des cicatrices ou la forme d’une nageoire comme points de repère pour identifier une baleine. Alors que suivre les baleines avec des tags nécessite des ressources importantes et comporte des risques autant pour les baleines que pour les humains, la photo-identification ne requiert que des photos et… un œil attentif aux détails.

Éclairer la voie

Le déroulement de la nécropsie n’a pas été de tout repos. L’emplacement de la dépouille ne permettait pas d’utiliser de la machinerie lourde, qui aurait été nécessaire pour effectuer une nécropsie complète sur un animal d’une telle envergure. Pour compliquer les choses, l’endroit n’était accessible qu’à marée basse. C’est donc au petit matin et sous les lueurs d’un éclairage installé pour l’occasion que l’équipe de nécropsie s’est attelée à la tâche. Après tout, la marée n’allait pas attendre qu’ils aient terminé pour remonter! Sans compter qu’avec les courants, il est aussi possible que la carcasse se déplace aussi rapidement qu’elle est venue. 

La carcasse du rorqual à bosse a été mesurée et échantillonnée pour des analyses de son état de santé. Il a été déterminé que l’animal était un mâle âgé entre deux et quatre ans mesurant 10,7 mètres. Ce qui concorde avec les données du GREMM, dont la première observation de ce rorqual à bosse dans le Saint-Laurent date de 2021.

Lors de la nécropsie, il a été impossible de déterminer les causes de la mort de l’animal. Elle ne présentait aucune évidence d’empêtrement dans des cordages ou encore de collision avec un navire. Malgré tout, il n’est pas possible de le confirmer avec certitude, puisque les scientifiques n’ont pas pu analyser la carcasse complète. Émilie L. Couture, vétérinaire, clinicienne enseignante et agente de recherche, juge aussi qu’il est difficile d’évaluer la condition du rorqual au moment de sa mort en raison de son état de décomposition et de manque d’information. 

Une formation hors du commun

Malgré toutes les informations obtenues, autant grâce à la photo-identification qu’avec la nécropsie, il est probable que les causes de la mort de l’animal demeurent un mystère. Toutefois, avoir été capable d’identifier l’animal, en plus de prendre des mesures et des échantillons à des fins d’analyses, démontre l’efficacité et le dévouement des équipes impliquées dans cette opération. Il s’agit également d’une excellente opportunité d’apprentissage pour les membres de ces équipes. Ce n’est pas tous les jours qu’on a la chance de coordonner et d’effectuer une nécropsie sur une grande baleine! À l’avenir, lorsqu’une espèce en péril s’échouera sur les berges, les équipes seront mieux équipées pour répondre. Après tout, pour qu’un couteau soit aiguisé, il faut l’affuter régulièrement!

Urgences Mammifères Marins - 30/11/2023

Andréanne Forest

Andréanne Forest est rédactrice en chef de Baleines en direct depuis mai 2022. Après des études en environnement et en biologie, elle se tourne vers la communication scientifique dans l’objectif de rendre la science à la fois accessible et amusante. Andréanne souhaite mettre en lumière la démarche d’acquisition de connaissance tout en transmettant le désir d’apprendre.

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