Une grande colonne s’élève haut dans les airs. «Rorqual commun ou rorqual bleu?» se demande notre collaboratrice de Franquelin le 1er octobre au matin. Pas moyen de déterminer l’espèce, l’animal est trop loin de la côte. À l’inverse, pour une observatrice juchée sur un promontoire à Portneuf-sur-Mer, le 3 octobre, pas de doute, les grands souffles qu’elle a devant les yeux sont ceux de cinq rorquals bleus à la peau tachetée bleu pâle. C’est grâce à cette «robe» que le rorqual bleu observé au large de Bar Harbor dans le Maine le 24 septembre a été reconnu: la femelle B353. Depuis 1979, le MICS qui a mis au point la méthode d’identification des individus à partir des patrons de pigmentation de la peau gère un catalogue de plus de 400 rorquals bleus pour le Saint-Laurent.

Ces souffles sont les témoignages de leur respiration et celle-ci se déroule rapidement, à peine 1 à 2 secondes. L’air chaud à 37°C se condense au contact de l’air extérieur plus froid et forme un nuage. En plus de la différence de température, l’air expiré étant comprimé, la différence de pression entre les poumons et l’air ambiant provoque également la condensation ou vapeur. Dans cette masse d’air expulsée, on trouve aussi des gouttelettes d’eau et d’huile provenant des voies respiratoires supérieures ou du dessus de l’évent. Les caractéristiques des souffles varient selon l’espèce en fonction de sa taille et de la structure de l’évent, le nez des baleines, situé sur la tête. L’évent du rorqual bleu mesure entre 40 et 50 cm environ. De puissants muscles se trouvent à l’avant des narines et forment un bourrelet de chair en forme de «V» bien visible. Ces muscles sont reliés à des bouchons fibreux qui s’insèrent dans les narines lorsque les muscles sont relâchés et empêchent l’eau d’entrer dans l’évent. Le souffle du rorqual bleu est visible de très loin, sur plusieurs kilomètres, et peut s’élever à plus de six mètres de hauteur. Le souffle du rorqual à bosse est aussi large que haut. C’est l’indice découvert par un excursionniste de Percé qui se dirigea d’un côté de l’île Bonaventure pour y trouver trois rorquals à bosse le 5 octobre, lors de sa dernière excursion de l’année.

De voir ces grands soufflent ne permettent pas systématiquement d’identifier l’espèce; attention aux interprétations hâtives. Plusieurs facteurs influencent la hauteur et la forme du souffle comme le vent, la luminosité et l’humidité de l’air ambiant. Le souffle des petits rorquals, généralement peu visible, devient plus évident avec la chute des températures. La hauteur du souffle dépend aussi de l’activité de l’animal. Il sera plus discret quand la baleine est au repos ou peu active, ou bien lorsque ses plongées sont courtes et peu profondes.

Observations de la semaine - 6/10/2015

Marie-Sophie Giroux

Marie-Sophie Giroux s’est jointe au GREMM en 2005 et y a travaillé jusqu’en 2018. Elle détient un baccalauréat en biologie marine et un diplôme en Éco-conseil. Chef naturaliste, elle supervise et coordonne l’équipe qui travaille au Centre d’interprétation des mammifères marins et rédige pour Baleines en direct et Portrait de baleines. Aux visiteurs du CIMM ou aux lecteurs, elle adore « raconter des histoires de baleines ».

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