Le 13 juillet 2018, 14h45, au large de l’ile Miscou au Nouveau-Brunswick, un survol aérien de la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA) fait l’observation d’une baleine noire trainant du cordage équivalent à 4 fois sa longueur. Rapidement, les équipes du Marine Animal Response Society (MARS) sont avisées de la situation. La NOAA a pu fournir plusieurs détails sur la façon dont la baleine est empêtrée. Ces détails précieux permettent aux équipes de dépêtrement de mettre en place un plan d’intervention adéquat, mais aussi d’avoir les informations permettant d’identifier l’animal s’il est revu.

La difficulté principale dans ce genre de cas est que nous avons affaire à un animal sauvage mobile et en détresse qui peut avoir des comportements imprévisibles. Retrouver une baleine empêtrée suite à une observation initiale peut être un très gros défi. Malgré les efforts conjoints de Pêches et Océans Canada et de la NOAA, la baleine noire n’a pas pu être revue depuis le 13 juillet.

Toutefois, des baleines noires sont toujours observées dans plusieurs secteurs de pêches. Pêches et Océans Canada annonce à ce sujet de nouvelles fermetures de zones de pêches. La mesure sera appliquée à compter du 20 juillet et sera effective jusqu’à nouvel ordre.

Retour sur le cas de Kleenex

Le 12 avril dernier, des membres du Center for Coastal Studies ont observé, au large de l’ile Miscou également, Kleenex, une baleine noire empêtrée depuis maintenant 3 ans. Ce cas illustre bien la difficulté de retrouver la trace des baleines empêtrées qui garde la capacité de nager librement. Une tentative de dépêtrement avait permis de couper une partie du cordage avant que la baleine ne disparaisse. Elle aurait été revue à deux reprises au courant du mois de juin, puis le 12 juillet par le Northeast Fisheries Science Center Aerial Team. Suite à ces observations, ils décrivent un animal dont les conditions de santé sont déclinantes et un empêtrement n’ayant pas évolué depuis la dernière tentative du mois d’avril.

Les réseaux d’observation sont priés de garder un œil concernant ce cas et documenter tout changement dans la configuration de l’empêtrement ainsi que dans l’état de santé de Kleenex.

Des empêtrements aux tristes conséquences

Les baleines noires, du fait de leur mode d’alimentation et de leur physiologie, sont particulièrement sensibles aux empêtrements. Des études montrent que plus de 80% de la population présente des marques d’empêtrement. Le fait de trainer des parties d’engin de pêche peut causer la diminution des capacités locomotrices et d’alimentation de la baleine, l’amenant à augmenter significativement sa dépense énergétique, parfois même jusqu’à mourir de faim. De plus, dépendamment de la sévérité de l’empêtrement, le stress apporté à la baleine au niveau physiologique, mais aussi comportemental, peut conduire à une diminution du système immunitaire et de ce fait la rendre plus sensible au développement d’infections chroniques.

Comme dans le cas de Kleenex, les empêtrements peuvent causer une augmentation de la présence de poux de baleine, aussi appelés cyamides, sur la peau de l’animal. Ces crustacés vont généralement se loger sur la peau dans des zones où le flux d’eau est réduit, et notamment dans les zones de blessures. Ce phénomène est observé de façon plus prononcée lorsque les baleines ne sont pas capables de maintenir une vitesse de nage optimale suite aux empêtrements et les taux de cyamides peuvent être utilisés pour avoir des indications sur l’état de santé des baleines.

En savoir plus

  • (2011) Cassoff R. M., Moore K. M., McLelland W. A., Barco S. G., Rotstein D. S. Moore M. J. Lethal entanglement in baleen whales. Diseases of Aquatic Organisms. 96 : 175-185.
  • (2004) Pettis H. M., Rolland R. M., Hamilton P. K., Brault S., Knowlton A. R., Kraus S. D. Visual health assessment of North Atlantic right whales (Eubalaena glacialis) using photographs. Revue Canadienne de Zoologie. 82 : 8-19.
Actualité - 18/7/2018

Anthony François

Anthony François est responsable du programme d’intervention d’urgences pour les mammifères marins. Il est arrivé au GREMM en 2017, comme répondant au Centre d'appels d'urgences pour les mammifères marins et comme assistant de recherche. Biochimiste et biologiste de formation, il réalise l’importance de la vulgarisation scientifique et de la sensibilisation du public au cours de sa maitrise.

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