Cet article fait partie d’une série de portraits de gens impliqués de près ou de loin avec les baleines sur la Côte-Nord. Dans le cadre du projet de documentation de la Route des baleines du GREMM, partez à la rencontre de ces personnages colorés, qui définissent le visage de la région. Découvrez leurs récits qui vous ferons vivre ou revivre les histoires merveilleuses du fleuve Saint-Laurent et de ses géantes créatures marines! 

Jacques Gélineau observe et collecte des données sur l’identification des baleines, surtout les rorquals bleus, depuis 1997, entre autres pour le compte de la Station de recherche des iles Mingan. Écologiste et environnementaliste, le personnage coloré est un fervent défenseur de la nature.

Jacques habite sur la plage, dans une petite maison face au golfe. «Une vue à 180 degrés», dit-il! Sa parcelle de dune devant la mer est un véritable ilot de biodiversité.

Tôt le matin, directement par la fenêtre de son salon, il observe les souffles au loin et parfois les queues des baleines à bosse. C’est le moment de prévoir son itinéraire pour observer les baleines! Son Zodiac lui permet d’examiner les rorquals sur l’eau, de façon complètement autonome, depuis maintenant près de 30 ans. Il connait le secteur de Sept-Îles et de Port-Cartier mieux que quiconque.

«C’est le summum de l’évolution, les baleines. Un animal à sang chaud, adapté à des conditions hostiles comme le Saint-Laurent, c’est impressionnant» – Jacques Gélineau

La baie de Sept-Îles est un lieu d’alimentation exceptionnel pour l’écosystème marin. La bathymétrie favorise l’emprisonnement du krill, un peu comme une fosse d’alimentation pour les baleines. Mais ça change tous les jours, selon les marées, le vent, etc. «C’est pour ça que ça prend une présence assidue sur l’eau, pour bien comprendre les animaux, car ils sont assez imprévisibles», explique Jacques.

Inspiré dès l’enfance par Jacques-Yves Cousteau, il est fasciné par le milieu marin. C’est en arrivant en Côte-Nord en 1982 que Jacques voit ses premières baleines à Havre-Saint-Pierre.

«C’est le summum de l’évolution, les baleines. Un animal à sang chaud, adapté à des conditions hostiles comme le Saint-Laurent, c’est impressionnant», dit-il. Pendant 15 ans, il retourne voir «ses» baleines régulièrement!

Puis, en 1997, il s’initie au travail de la Station de recherche des iles Mingan (MICS pour Mingan Island Cetacean Study en anglais), où il construisit la tour d’observation en tant que menuisier. Richard Sears, fondateur et chercheur du MICS, lui donne en retour un petit Zodiac, pour qu’il puisse commencer à tenir un inventaire des mammifères marins, sous sa supervision.

Plusieurs centaines d’animaux ont été à ce jour photographiés, identifiés et catalogués par Jacques. Ses observations acharnées à travers les années lui amènent aujourd’hui une meilleure compréhension des baleines dans la région, une relation unique entre lui et ces mammifères marins.

«Le golfe, c’est leur garde-manger. Quand elles arrivent au printemps, elles sont maigres. Puis à l’automne, elles sont bien dodues et pleines d’énergie pour offrir des spectacles aux observateurs, comme les claquements de queues en surface en fin de saison.»

Grand amoureux de la nature, Jacques Gélineau a pour principal objectif de protéger la «Terre Mère», dit-il. Les baleines sont pour lui une façon de saisir l’état de santé de la planète, étant les grandes représentantes de plusieurs maillons trophiques.

«Quand les baleines arrivent, on peut s’imaginer que tout va bien en dessous».

Travaillant de main avec le MICS, Jacques souhaite amener une meilleure compréhension des baleines grâce à ses observations. «Seulement la rigueur et les données empiriques permettront de mieux comprendre les cétacés», dit Jacques.

«C’est comme étudier la pointe d’un iceberg sans jamais pouvoir voir ce qu’il y a dessous. On est seulement capable de les observer à la surface, l’eau étant quasi opaque tellement elle est productive. 5% du cycle de leur vie est consacré à respirer à la surface… C’est 95% qu’on ne peut simplement pas témoigner avec nos yeux. On ne peut que l’estimer», explique-t-il.

L’inventaire des cétacés est impressionnant et sa maison, remplie d’images, de bibelots de baleines, de cartes de navigation, d’objectifs photo, de trépieds et de ses photographies. La passion l’habite, mais surtout le désir palpable de pouvoir aider les cétacés à subsister sur notre planète.

Le rorqual bleu étant le plus vulnérable, il jouit d’une attention particulière concernant l’inventaire et l’identification individuelle de son espèce. La plupart des animaux observés disposent de cicatrices diverses sur le corps, provenant dans certains cas d’activités anthropiques, comme des collisions, dit-il dans son rapport présenté à l’Institut Nordique de Recherche en Environnement et en Santé au Travail (INREST) en 2017, avec qui il a collaboré en 2017.

Jacques essaie du mieux qu’il peut de comprendre comment coexister avec les géants.

«La protection des cétacés, c’est surtout une cohabitation définie entre les utilisateurs de la voie fluviale et eux», dit-il.

Jacques est en quelque sorte un interprète, participant à traduire le dialogue entre l’humain et les baleines du Saint-Laurent. Il y voit de grandes opportunités d’entente entre les compagnies de la région et les cétacés. Depuis des années, Jacques rapporte ses observations à Baleines en direct pour la chronique des Observations de la semaine.

Merci pour ta contribution et ta bienveillance !

Observations de la semaine - 31/10/2019

Anne-Marie Asselin

Anne-Marie Asselin a rejoint l’équipe de Baleines en direct comme rédactrice à l’été 2019. Avec une maitrise en environnement, gestion des océans et zones côtières, et un baccalauréat en écologie marine, c’est un honneur pour elle de pouvoir apprendre et partager les récits des mammifères marins et de l’écosystème du Saint-Laurent. Aussi fondatrice et rédactrice en chef de l’Organisation Bleue, elle croit que la communication environnementale et la vulgarisation scientifique sont essentielles à la protection de nos océans et de notre fleuve.

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