Le beau temps, les brises et la fraicheur d’automne, que demander de plus pour ce mois de septembre? Peut-être des rorquals bleus toujours bien présents, une ribambelle de mammifères marins en Gaspésie, des baleines noires dans le golfe et des bélugas, petits et grands, à Tadoussac!

Contre les vents et les marées sur la Côte-Nord

Les forts vents du sud-ouest, qu’on surnomme suroits, ont rendu difficile la distinction des mammifères marins, souvent cachés par les vagues qui déferlent sur les côtes. Une habituée de la région a bravé les rafales en fin de semaine au cap de Bon-Désir. Elle a pu y apercevoir « quelques phoques, deux petits rorquals et plusieurs marsouins communs qui essayaient difficilement de venir respirer à travers les vagues houleuses ». Malgré les vents, la Haute-Côte-Nord a été choyée cette semaine en termes de mammifères marins : marsouins communs, bélugas, petits rorquals, rorquals à bosse, rorquals communs et rorquals bleus ont parsemé les flots agités.

Des bélugas et des petits rorquals ont été vus plusieurs fois par jour depuis Tadoussac. Les petits rorquals semblent toujours se régaler à l’embouchure du fjord du Saguenay, avec des comportements d’alimentations de surface sensationnels et des caudales qui fendent les flots, rapportent des visiteurs de la région! « On voyait bien le rose sous leur bouche, et ces beaux petits rorquals sont impressionnants même si ce sont les plus petites des baleines à fanons ici », ajoutent-ils.

Les phoques gris et les phoques communs viennent ajouter une touche de mignonnerie au paysage. Même lors des observations les moins fructueuses, il se font remarquer le long des côtes, se régalant goulûment eux aussi de poissons.

Rencontres avec les emblèmes du Saint-Laurent

Les bélugas surprennent même là où l’on s’attend à les voir. Une famille en visite dans la région a vécu une rencontre inoubliable avec des « ombres blanches »au Centre d’interprétation et d’observation de Pointe-Noire.Plusieurs groupes de femelles bélugas et de nombreux jeunes se sont succédé pour leur plus grand plaisir. Un membre de la famille partage : « Soleil radieux, mer bleue et découverte sous nos yeux interloqués d’un aquarium à ciel ouvert remplis de petites baleines. Notre fille de deux ans découvre pour la première fois ces mammifères marins dont nous lui parlons depuis des semaines. »

Des naturalistes aguerries ont aussi témoigné de comportements étonnants d’un groupe de bélugas aperçu dans le fjord du Saguenay : « Avec les vagues, dur à dire ce qu’ils faisaient, mais  ils semblaient s’éclabousser, tourner et nager les un sur les autres ».  «  Ça met de bonne humeur de les voir! », ajoute l’une d’entre elles.

Des rorquals bleus en visite dans l'estuaire

Ce ne sont pas deux mais bien trois rorquals bleus qui ont été vus dans le parc marin du Saguenay–Saint-Laurent la même journée! Parmi eux, les scientifiques du Groupe de recherche et d’éducation sur les mammifères marins (GREMM) ont pu identifier deux mâles, B261 (Bird of Prey), connu depuis 1991 et B112 (Torishinto), connu depuis 1993, ainsi que la femelle B197 (Pleiades). Lors d’une journée d’accalmie, un naturaliste et photographe animalier a eu l’occasion de voir Bird of Prey. « Depuis notre première rencontre avec lui il y a plusieurs jours maintenant, il a montré un peu la caudale à 3 reprises! »

Le dos constellé d'un rorqual bleu © Renaud Pintiaux
La caudale d'un rorqual bleu © Renaud Pintiaux

Seulement 15 % des rorquals bleus qui visitent l’estuaire montrent leur queue, qui peut atteindre 6 à 7 mètres de large! Néanmoins, celle-ci n’est pas fréquemment utilisée pour reconnaitre les individus. C’est plutôt le patron moucheté et unique du rorqual bleu qui est privilégié pour l’identifier. Étant donné la quantité de nourriture que doit ingurgiter un seul rorqual bleu, on peut se demander si le Saint-Laurent ne foisonne pas de nourriture ces temps-ci : un véritable smörgåsbord de zooplanctons et de poissons !

Acrobaties en eau saumâtre dans Charlevoix

Du côté de Saint Siméon et Port-au-Persil, un rorqual à bosse a effectué des dizaines de sauts la fin de semaine dernière. Pendant près d’une heure, la baleine aux grandes ailes a multiplié les acrobaties dans la baie en face du village. Un riverain raconte cette spectaculaire rencontre :  « Un rorqual à bosse, fortement soupçonné d’être H944 (Katana), a fait plus de 75 breachs. J’ai cessé de compter à ce moment-là. » On parle d’un breach lorsque au moins 40% du corps de l’animal est visible hors de l’eau. Une des nombreuses hypothèses proposée pour expliquer les sauts de baleines serait qu’elles chercheraient à communiquer avec leurs congénères sur de longues distances. De nombreux phoques gris, des petits rorquals et une dizaine de marsouins s’ajoutent à ce tableau.

Changements et continuités

Si les observations de mammifères marins se font plus rares cette semaine dans la région de Baie-Comeau, une résidente mentionne des phoques gris, de petits groupes de deux à trois marsouins communs ainsi qu’un petit rorqual toujours bien au rendez-vous. À Sept-Îles, ce sont de plus gros cétacés qui ont pu être aperçus. Une Nord-Côtière a eu le privilège de voir deux rorquals bleus et trois rorquals communs. À cela s’ajoutent plusieurs thons rouges de l’Atlantique! La population de thons rouges, une espèce classée en voie de disparition par l’Union internationale pour la conservation de la nature, est en augmentation dans le Saint-Laurent, car elle se reconstitue après des décennies de surpêche. Ce poisson peut atteindre trois mètres de long et peser plus de 800 kilogrammes. Un mangeur de maquereau, de lançon et de hareng, il est un imposant concurrent aux autres mammifères et oiseaux marins du secteur.

Plusieurs baleines noires de l’Atlantique Nord ont été de passage en Minganie, mais aussi plus au sud, en Gaspésie. Les baleines noires ont été très présentes cette année dans le golfe, alors que les rorquals à bosses et rorquals communs se font discrets. La Station de recherche des Îles Mingan (MICS) a par ailleurs déjà identifié une quarantaine de ces géantes durant l’été!

Frénésie gaspésienne

L’action reprend en Gaspésie après le calme qui y régnait à la fin du mois d’aout. Au large de Matane, un cétologue amateur a repéré deux rorquals bleus. Des marsouins, des dauphins à flancs blancs, des petits rorquals, des rorquals communs et des rorquals à bosses ont quant à eux été vus en grand nombre dans le coin de Gaspé.

Des nouvelles du Grand Nord

Une observation remarquable, certes loin de nos eaux familières, mais qui mérite mention. Une québécoise a eu la chance d’observer des baleines à bec communes en alimentation dans les eaux arctiques de la mer du Labrador. Les scientifiques savent que ce cétacé furtif visite parfois le Saint-Laurent, mais les seules observations sont d’animaux échoués vivants. La baleine à bec est une grande plongeuse : voir un tel comportement d’alimentation à la surface est chose rare!

À demain les baleines

Où que l’on soit sur les berges du Saint-Laurent, l’observation depuis la rive comble de bonheur les riverains et riveraines. Un passionné partage son observation sur les rochers de la Pointe de l’Islet: « À la jumelle, sans regarder l’heure, à scruter les deux respirations d’un petit rorqual avant le prochain plongeon après avoir spotté la première à l’œil nu. Difficile de quitter ce lieu, il faut décider “d’une dernière” et on rentre. À demain les baleines.»

Où sont les baleines cette semaine? La carte des observations

Ces données ont été rapportées par notre réseau d’observatrices et observateurs. Elles donnent une idée de la présence des baleines et ne représentent pas du tout la répartition réelle des baleines dans le Saint-Laurent. À utiliser pour le plaisir! Cliquez sur les icônes de baleine ou de phoque pour découvrir l’espèce, le nombre d’individus, des informations supplémentaires ou des photos de l’observation. Pour agrandir la carte, cliquez sur l’icône du coin supérieur droit. La carte fonctionne bien sur Chrome et Firefox, mais pas aussi bien sur Safari. Pour faire apparaitre la liste des observations, cliquez sur l’icône du coin supérieur gauche.

Merci aux collaborateurs et collaboratrices!

Merci aux observateurs et observatrices qui partagent avec nous leur amour pour les mammifères marins! Vos rencontres avec les cétacés et les pinnipèdes sont toujours un plaisir à lire et à découvrir.

Ce sont vos yeux, sur l’eau ou depuis la berge, qui permettent à cette rubrique de voir le jour.

Anik Boileau
Odélie Brouillette
Marie-Andrée Charlebois
Thalia Cohen Bacry
Kevin Crottier-Maltese
Laetitia Desbordes
Louis-Pierre Ducharme-Tremblay
Clément et Maureen Horteur
Kathleen Luyat
Matthieu Marzelière
Yael Medav
Chloé Pazart
Claire Payne
Renaud Pintiaux
Pascal Pitre
Diane Ostiguy
René Roy
Guillaume Savard
Andréanne Sylvain
Marielle Vanasse

Et à tous les autres!

Merci aussi aux équipes qui partagent leurs observations :

Centre d’éducation et de recherche de Sept-Îles (CERSI)
Groupe de recherche et d’éducation sur les mammifères marins (GREMM)
Réseau d’observation des mammifères marins (ROMM)
Réseau québécois d’urgence pour les mammifères marins (RQUMM)
Station de recherche des Îles Mingan (MICS)

Vous souhaitez vous aussi partager vos observations?

Vous avez observé des mammifères marins dans le fleuve Saint-Laurent? Qu’il s’agisse d’un souffle au large ou de quelques phoques, écrivez-nous et envoyez-nous vos photos à [email protected]!

Observations de la semaine - 12/9/2024

Thalia Cohen Bacry

Thalia Cohen Bacry est rédactrice scientifique pour le GREMM après avoir été naturaliste en 2023. Diplômée de UBC, elle a complété une maîtrise en études internationales à l’Université Laval et poursuit un apprentissage dans plusieurs domaines, dont la géographie, les sciences politiques et le comportement animal. Fascinée depuis toujours par la protection de l’environnement, elle a grandi en Savoie, entourée des lacs et des montagnes, avant d’immigrer au Canada et de découvrir des espaces encore plus grands et plus sauvages. Intrépide, curieuse, et persévérante elle aime apprendre, observer, et analyser afin de sensibiliser à la sauvegarde de nos océans et ainsi contribuer à leur protection.

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