Samedi le 13 mai, accompagné par Katy Gavrilchuk et David Gaspard, membres de l’équipe de la Station de recherche des îles Mingan, nous sortons du charmant petit port de pêche d’Anse-à-Brillant dans la baie de Gaspé pour aller faire du repérage pré-saison. Nous profitons d’une belle journée ensoleillée et d’un vent calme pour aller explorer le secteur nord de la pointe gaspésienne qui est habituellement plus difficile d’accès. Nous contournons donc le Cap Gaspé et c’est tout juste de l’autre coté, à 6 milles marins au nord des falaises de Forillon, que nous faisons notre première rencontre de la journée. C’est le rorqual à bosse H638 Splinter qui nous gratifie d’une belle gerbe d’eau avec sa grosse nageoire caudale.

Après quelques minutes d’observation et de documentation, nous poursuivons notre route à environ quatre milles de la côte. C’est au large de L’Anse-à-Valleau que des scintillements lointains, à la surface de l’eau, attirent l’attention de David. Nous déroutons donc vers le nord de quelques centaines de mètres pour voir de plus près et soudain, deux grosses dorsales noires apparaissent sur l’eau devant l’embarcation. C’est en se regardant ébahis que nous crions « GLOBI » à l’unissons.

Durant une trentaine de minutes nous observons une quinzaine de globicéphales noirs de l’Atlantique en trois petits groupes distincts qui finalement se rassemblent pour n’en former qu’un seul. Il est plutôt rare de rencontrer cette espèce océanique dans les eaux Gaspésiennes. C’est émouvant de les voir interagir entre eux, particulièrement les jeunes qui évoluent parmi le groupe et avec leur mère. C’est une espèce grégaire qui vit en groupes familiaux. On peut les suivre facilement puisque leur gros melon les rend moins hydrodynamiques que les autres espèces de dauphins. Leur comportement est étonnant et a fait l’objet de plusieurs études par les chercheurs, notamment pour les échouages collectifs. Nous nous sentons bien privilégiés d’une telle rencontre.

Pour le retour au port, nous choisissons un tracé d’environ huit milles au large de la côte, ce qui nous permet de rencontrer un deuxième rorqual à bosse qui nous montre bien sa sous-caudale pour fin d’identification (H778-Cigale). Quelques minutes plus tard, on aperçoit au loin le grand souffle d’un rorqual bleu. Il s’agit de B036 Pulsar, un mâle connu depuis longtemps du MICS et que j’avais déjà rencontré en 2013 au large des Escoumins.

Par la suite, c’est en arrivant à l’entrée de la baie de Gaspé que nous observons notre troisième rorqual à bosse de la journée. Il s’agit de H840 que je rencontre pour la première fois et qui avait été observé par mes compagnons l’an dernier dans le secteur Mingan.

C’est à regret que nous gagnons notre port d’attache en fin de journée après avoir parcouru 111 milles nautiques.

Lorsque qu’on a la chance de naviguer le Saint-Laurent, nous prenons vraiment conscience qu’il est un milieu exceptionnel, encore bien vivant, et qu’on a le devoir de le protéger.

Splinter le rorqual à bosse soulève l’eau avec sa nageoire caudale.
Splinter soulève l’eau avec sa nageoire caudale. © René Roy
Groupe de globicéphales noires nageant près de la surface.
La nageoire dorsale des globicéphales se trouve rapprochée de la tête par rapport à la queue. © René Roy
Un globicéphale noir et son veau.
Un jeune globicéphale et un mature. Les adultes mesurent de 4 à 6 mètres, mais peuvent parfois atteindre 8 mètres! © René Roy
Groupe de globicéphales noires nageant près de la surface.
À la manière des dauphins, le mouvement de nage des globicéphales s’effectue par bonds successifs . © René Roy
Groupe de globicéphales noires nageant près de la surface.
Les globicéphales peuvent plonger de 5 à 10 minutes. © René Roy
Le rorqual bleu pulsar soufflant à la surface de l'eau.
Pulsar, le rorqual bleu. © René Roy
La queue du rorqual à bosse Cigale.
Cigale (H778), un rorqual à bosse. © René Roy
Carnet de terrain - 16/5/2017

René Roy

René Roy est un cétologue amateur, passionné de la mer et des baleines, résidant à Pointe-au-Père, dans le Bas-Saint-Laurent. Depuis plusieurs années, il entreprend des expéditions de photo-identification pour le compte de la Station de recherche des iles Mingan (MICS), principalement en Gaspésie. Il est également bénévole pour le Réseau québécois d’urgences pour les mammifères marins.

 On peut voir ses photos sur Facebook

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