Quand on se trouve au bord du Saint-Laurent ou que l’on y navigue, on n’est jamais à l’abri d’une surprenante rencontre. Il peut s’agir d’un poisson-lune, glissant sous la surface, au large de l’embouchure de la rivière Pontbriand, de dauphins à nez blanc sautant hors de l’eau au nord-ouest de l’ile d’Anticosti, d’une mouvée d’une centaine de phoques gris faisant clapoter la surface face à Tadoussac, ou encore de la vision fugitive d’un narval, observé aux jumelles depuis le camping de Saint-Siméon.

Dimanche 18 juillet au petit matin, une riveraine de Cloridorme s’interroge en observant un animal au large. «J’ai d’abord pensé à une dorsale de baleine, mais c’est plus triangulaire et ça ne bouge pas pareil». Surprise: ce n’est pas une nageoire dorsale, mais un aileron de requin, plus précisément celui d’un requin pèlerin, en pleine activité d’alimentation. «Il a tourné en rond un long moment devant chez nous, puis le soir, il était visible au quai de Cloridorme», raconte la Gaspésienne. Sans doute venait-il souligner à sa façon la Semaine des requins.

Phoques gris au large de Tadoussac © GREMM
Dauphin à bec blanc © FH
Requin pélerin à Cloridorme © Johanne Masse
Poisson-lune dans le golfe © FH

Des invités dans l'habitat des baleines

Lors d’une expédition en planche à pagaie dans l’archipel des iles Mingan, une guide de plein air s’enthousiasme des multiples rencontres avec des mammifères marins. «Dimanche, entre Grosse ile au Marteau et Havre-Saint-Pierre, on a eu une belle rencontre: plusieurs petits rorquals se sont trouvés tout autour de nous, et l’un d’eux est même sorti à 15 mètres d’un participant». Une belle surprise, mais que faire dans cette situation?, s’interrogent les pratiquants de SUP. Pour se préparer à naviguer dans l’habitat des baleines, une formation en ligne gratuite a été mise sur pied. Elle vous donnera les bases pour conjuguer plaisir de naviguer, respect des mammifères marins et application de la réglementation.

Car parfois, les situations sont complexes. En pleine sortie sur le fjord du Saguenay dimanche, au niveau de l’anse de Roche, un kayakiste entend soudain un souffle en arrière de son embarcation. Un immense dos blanc se dresse à quelques mètres de son kayak, plonge sous la surface noire puis une face blanche apparait sous le kayak, scrutant l’humain qui se trouve sur son territoire.

La rencontre est émouvante pour le kayakiste. Malheureusement, l’accumulation de ces rencontres peut être néfaste pour le béluga, qui risque de délaisser des activités essentielles comme l’alimentation, la reproduction ou le soin aux petits pour interagir avec les embarcations. C’est pourquoi, même si le béluga s’approche, il est important de s’éloigner activement, comme l’a fait le kayakiste ce jour-là. Au bout de quelques minutes, la baleine blanche a repris son chemin en direction de la baie Sainte-Marguerite.

Les bélugas sont présents presque quotidiennement dans le fjord du Saguenay cette semaine. «Généralement, ce sont des petits groupes, qui montent ou descendent en fonction des marées, et longent la rive d’en face, vers l’anse Saint-Etienne», affirme un riverain de L’Anse-de-Roche. «Mais dimanche, il y a eu un très gros groupe qui faisait la largeur du Saguenay, avec plusieurs petits dos gris au milieu. Malheureusement, plusieurs bateaux passaient au travers ou s’arrêtaient proche pour les regarder.» Rappelons donc encore une fois que, pour protéger les bélugas, il faut leur laisser de la place!

Des arrivées remarquées

De la place, il y en a en masse dans le parc marin du Saguenay-Saint-Laurent, et les baleines sont au rendez-vous! Au moins une dizaine de rorquals communs s’alimentent dans l’estuaire, dont plusieurs ont été identifiés : Ti-Croche, Boomerang, Piton, Bp972… Deux rorquals à bosse connus, H944 et H930, ont été observés pour la première fois lundi, rejoignant H858 «Queen», H859, H887 ou encore Gaspar et son veau dans les eaux du fleuve. «J’en suis à 15 baleines à bosse photographiées depuis le début de la saison», précise le photographe Renaud Pintiaux. Et il n’est pas toujours nécessaire d’aller sur l’eau pour les voir: depuis un camping des Bergeronnes, samedi matin, plusieurs grands souffles et larges dos noirs étaient visibles au lever du jour.

Dans l’archipel de Mingan, outre les marsouins et les phoques gris en quantité – et la présence croissante de jeunes macareux moines fraichement sortis du nid –, les observateurs notent beaucoup de petits rorquals. Les grands rorquals restent rares, toutefois. La Station de recherche des iles Mingan a cependant rencontré et biopsié une nouvelle baleine à bosse jusqu’ici inconnue, au large de Havre-Saint-Pierre. À Longue-Pointe-de-Mingan, une paire mère-veau a été aperçue près de la côte. Les chercheurs pensent aussi avoir vu un souffle en «V», caractéristique des baleines noires, mais n’ont pu avoir une confirmation visuelle.

Au nord de la Gaspésie, René Roy s’étonne: «Les animaux sont très regroupés, très localisés. J’ai fait des milles et des milles sans rien voir, et au large de Rivière-au-Renard, on retrouve 12 baleines à bosse, 15 communs, un requin pèlerin, du thon rouge, tout ça au même spot! Et toujours pas de rorqual bleu!»

Du noir et du bleu dans les eaux du golfe

Grâce aux relevés aériens et acoustiques réalisés par les équipes de Pêches et Océans Canada, on note une forte présence de baleines noires à l’est de la baie des Chaleurs, incluant fort probablement les deux baleines noires empêtrées. Celles-ci sont activement recherchées par les équipes d’intervention pour tenter de les débarrasser de leurs cordages. Cette carte interactive nous apprend également la présence d’un ou plusieurs rorquals bleus au cœur du golfe, dans le couloir situé entre la pointe gaspésienne et l’ile d’Anticosti.

Où sont les baleines cette semaine?

Ces données ont été rapportées par notre réseau d’observatrices et observateurs. Elles donnent une idée de la présence des baleines et ne représentent pas du tout la répartition réelle des baleines dans le Saint-Laurent. À utiliser pour le plaisir!

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Observations de la semaine - 22/7/2021

Laure Marandet

Laure Marandet est rédactrice pour le GREMM depuis l'hiver 2020. Persuadée que la conservation des espèces passe par une meilleure connaissance du grand public, elle pratique avec passion la vulgarisation scientifique depuis plus de 15 ans. Ses armes: une double formation de biologiste et de journaliste, une insatiable curiosité, un amour d'enfant pour le monde animal, et la patience nécessaire pour ciseler des textes à la fois clairs et précis.

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