Application de la limite de vitesse à une plus grande flotte, augmentation de la surveillance aérienne, agrandissement du secteur de limite de vitesse: le gouvernement du Canada annonce de nouvelles mesures de prévention des empêtrements et des collisions. Ces mesures surviennent après la découverte de six carcasses de baleines noires de l’Atlantique Nord, une espèce en voie de disparition. De plus, trois baleines noires ont été observées empêtrées dans des cordages utilisés pour la pêche au cours des dernières semaines.

Ralentir, pour diminuer les risques

Le ralentissement des navires protège les baleines des collisions de deux façons : en réduisant le risque de blessures graves ou mortelles en cas de collision et en augmentant les chances qu’une baleine ait le temps de réagir pour éviter la collision. Dorénavant, les bateaux de plus de 13 mètres devront naviguer à une vitesse maximale de 10 nœuds, alors que cette mesure ne touchait que les navires de 20 mètres et plus auparavant. Le secteur de ralentissement a également été élargi.

Toutefois, le ralentissement des navires n’est pas sans avoir des impacts majeurs sur ceux effectuant la livraison dans des régions éloignées, comme le N/M Bella-Desgagnés qui approvisionne les communautés de la Côte-Nord inaccessibles par la terre. De plus, les embarcations touristiques aux abords de la Gaspésie, qu’ils soient des croisières internationales ou des embarcations d’observation de la faune doivent ralentir à 10 nœuds.

Cette vitesse n’est pas choisie au hasard. À plusieurs endroits dans le monde, la mesure de réduction de vitesse à 10 nœuds a permis de réduire considérablement le risque de collision et surtout les morts liées aux collisions. Cette mesure est entre autres utilisée à l’entrée du canal de Panama, une des voies maritimes les plus fréquentées au monde.

Baleines empêtrées à retrouver

Depuis le 29 juin, trois baleines noires ont été repérées en fâcheuse situation. Elles sont empêtrées dans des cordages utilisés pour la pêche. Depuis, l’équipe spécialisée en dépêtrement de baleines noires, le Campobello Whale Rescue Team, est sur le qui-vive. Mais dans l’immensité du golfe du Saint-Laurent, retrouver une baleine noire empêtrée, mais nageant librement, est extrêmement difficile. Les vols de surveillance aérienne sont passés de deux par semaine à deux par jour. Une des trois baleines a été revue le 9 juillet, mais l’heure tardive à laquelle elle a été repérée n’a pas permis de poser une balise sur le cordage à sa traine. Avec une balise, il serait possible de suivre ses déplacements et d’ainsi la retrouver et intervenir plus facilement.

Dans un message aux médias, Pêches et Océans Canada affirme être encouragé par la surveillance aérienne du 9 juillet, où un total de 90 baleines noires de l’Atlantique Nord ont été observées nageant librement dans le golfe. Ces baleines noires se trouvaient surtout dans la zone statique de fermeture de pêche, où aucun engin fixe non surveillé, c’est-à-dire où les pêcheurs laissent l’installation quelques heures à quelques jours avant de la retirer, ne peut être installé depuis la fin avril.

Mesures costaudes devant des risques économiques

Les mesures ne répondent pas seulement à des impératifs de survie d’une espèce. Elles répondent aussi à des impératifs économiques liés à l’exportation des produits de la mer vers les États-Unis, le principal marché de l’est du Canada. En 2017, ces exportations valaient 4,3 milliards de dollars. Or, les États-Unis ont adopté une loi sur la protection des mammifères marins, qui stipule que tous les pays exportant des produits de la mer chez eux doivent prouver qu’ils ont des mesures de protection des mammifères marins comparables aux leurs. D’ici la fin juillet, le Canada doit remettre un premier rapport concernant ses efforts de mitigation des impacts de ses pêches sur les mammifères marins. Le 1er janvier 2022, la loi entrera en application et si les États-Unis considèrent que le Canada n’a pas pris de mesures considérables, le pays pourrait perdre son principal marché pour le homard et le crabe des neiges.

Les règlements encadrant actuellement les pêcheries au Canada peuvent paraitre très contraignantes pour les pêcheurs, mais elles permettent de placer le pays comme un des états avec le plus de pêches certifiées durables. Les mesures actuelles de protection des baleines noires vont en ce sens.

Actualité - 11/7/2019

Marie-Ève Muller

Marie-Ève Muller s’occupe des communications du GREMM depuis 2017 et est porte-parole du Réseau québécois d'urgences pour les mammifères marins (RQUMM). Comme rédactrice en chef de Baleines en direct, elle dévore les recherches et s’abreuve aux récits des scientifiques, des observateurs et observatrices. Issue du milieu de la littérature et du journalisme, Marie-Ève cherche à mettre en mots et en images la fragile réalité des cétacés.

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