Un des défis de l’observation des baleines réside dans les longues plongées des animaux. La vie des baleines se déroule loin de nos yeux, sous l’eau. Et parfois, la plongée peut se prolonger…
Parlez-en à Renaud Pintiaux qui se poste devant le Saint-Laurent à partir de rochers aux Bergeronnes. Le 10 janvier, il patiente quatre heures avant d’enfin repérer deux grands souffles très au large. Les baleines expirent et inspirent quelques fois avant de disparaitre durant une quinzaine de minutes. Les deux rorquals, probablement des rorquals bleus, font ainsi des plongées pendant lesquelles le regard de Renaud balaie l’horizon pour trouver où les animaux ressortiront.
Les rorquals bleus plongent habituellement durant 10 à 15 minutes, parfois jusqu’à 30 minutes. Même si la majorité de leurs plongées se déroulent dans les cent premiers mètres à partir de la surface, les rorquals bleus peuvent atteindre 200 m de profondeur là où les fonds marins le permettent.
Heureusement pour Renaud, tandis que les deux immenses rorquals plongent, quelques bélugas passent au large, suivis d’imposantes mouvées de phoques du Groenland. Puis, un rorqual commun fait une apparition près des rochers. Il semble se diriger vers Tadoussac avant d’arquer le dos et de sonder. Renaud décide de se rendre à la base de plein air des Bergeronnes située à quelques kilomètres de là, au cas où le rorqual commun ferait surface devant. Près d’une demi-heure plus tard, la caméra en main, Renaud y patiente. Victoire! La baleine sort à la limite de la batture.
Les rorquals communs plongent habituellement moins longtemps que les rorquals bleus, avec des plongées moyennes de 5 à 15 minutes. Toutefois, celui-là semble bien vouloir tester les records de son espèce en réapparaissant aux 25 minutes! Comment connait-on les habitudes de plongée des baleines? Des chercheurs et chercheuses ont installé au fil des ans des balises sur le dos des cétacés. Ces outils enregistrent plusieurs informations comme la vitesse, la durée, la profondeur. En ayant de bons échantillons dans plusieurs régions, les scientifiques parviennent à avoir un portrait des plongées.
Au large de Sept-Îles le 10 janvier, une haute colonne blanche trahit la présence d’une baleine au large. Le 13 janvier, deux colonnes apparaissent côte à côte. Il y a donc au moins deux individus.
Sur les glaces dérivent des centaines de phoques en repos: des phoques du Groenland. Ils commencent à être observés à plusieurs endroits tant de la rive nord que de la rive sud, comme à Baie-des-Sables ou à Matane. Les phoques du Groenland n’ont rien à envier aux baleines. S’ils plongent souvent durant 2 minutes, ils peuvent parvenir à le faire durant 30 minutes!
Autour de la baie de Gaspé, les yeux tournés sur l’eau ont beau être nombreux, les observations rapportées se font rares. Une résidente de Cap-aux-Os en télétravail a tout de même eu le plaisir de se faire interrompre lors d’une réunion par le passage de deux rorquals à bosse. Bons plongeurs, les rorquals à bosse peuvent retenir leur souffle jusqu’à 30 minutes, même s’ils font généralement des plongées plus courtes, entre 8 et 15 minutes.
Les petits rorquals aussi peuvent rester sous l’eau de nombreuses minutes. Si leurs plongées durent habituellement de 2 à 10 minutes, ils peuvent rivaliser avec les communs et les bleus en retenant leur respiration 20 minutes! C’est le cas d’un petit rorqual nageant devant Godbout depuis le 10 janvier. «Il nage très près de la rive, vient à la surface à quelques reprises, puis reste longtemps en plongée», constate un observateur.
Ces jours-ci, le défi dans l’observation des bélugas est de ne pas les confondre avec les plaques de glace dérivantes. À Saint-Irénée, une observatrice s’étonne de réussir à en apercevoir une paire le 7 janvier. Si les bélugas se déplacent plus en aval dans le Saint-Laurent durant l’hiver, il arrive à l’occasion d’en voir dans Charlevoix et en Haute-Côte-Nord. Le 9 janvier en matinée, un petit groupe de bélugas passe devant Les Escoumins. Bien habitués à la vie arctique, les bélugas du Saint-Laurent semblent avoir une préférence pour les eaux ayant un bon couvert de glace, de 70 à 90% de couverture. C’est que la glace amoindrit les intempéries et donc la force des tempêtes plus fréquentes durant l’hiver. Au fil des ans, la couche de glace sur le Saint-Laurent tend à s’amoindrir. Les conséquences ne touchent pas que les bélugas : bien des communautés riveraines voient leurs rives s’éroder sans la protection offerte par la banquise. Ne retenons pas notre souffle pour découvrir les prochaines conséquences de la perte des glaces! Pour renverser la tendance de la perte des glaces, tous les efforts doivent être mis pour lutter contre les changements climatiques.
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