Peut-on compter les baleines à partir de photos prises de l’espace? Deux chercheurs de Perth, en Australie, tentent d’effectuer un inventaire des rorquals à bosse migrant le long de la côte ouest australienne, en utilisant des images satellites prises 600 kilomètres au-dessus de la Terre. Cette nouvelle technique pour compter les baleines s’avère prometteuse.

Les inventaires sont indispensables pour faire le suivi des populations et mettre en place des mesures de conservation pour les populations en péril. Ils sont habituellement effectués visuellement par des humains à partir d’un bateau, d’un avion ou d’un site terrestre. Ces techniques sont souvent onéreuses, complexes et manquent parfois de précision.

Les chercheurs Michele Thums et Curt Jenner ont donc décidé de tester une nouvelle technique pour compter les baleines. Ils ont commandé deux images satellites, qu’ils ont ensuite parcouru pendant de longues journées afin de se familiariser avec ce que ressemblent les baleines vues de l’espace. Leur constat: les images satellites utilisées, étant d’une très haute résolution (résolution de 30 cm et environ 40 pixels couvrant une baleine), permettent de distinguer les baleines avec une assez grande certitude. Cependant, le processus demande beaucoup de temps. Ils effectuent actuellement une analyse coût-avantage de la technique, afin de vérifier si un programme de suivi à long terme des rorquals, par images satellites, serait viable. Ils essaient également de développer un logiciel permettant de repérer plus rapidement les baleines dans les images satellites en noir et blanc.

Au début des années 2000, des tentatives d’inventaire de baleines par images satellites s’étaient révélées décevantes. Des scientifiques avaient de nouveau tenté l’expérience en 2012, utilisant une image prise par le satellite WorldView-2 pour compter les baleines franches australes au-dessus de la péninsule de Valdès en Argentine et les résultats avaient été prometteurs.

Des tests avaient aussi été faits par Pêches et Océans Canada en 2012, utilisant des images archivées de 2009 prises par GeoEye-1 et WorldView-1, afin de compter les bélugas du Saint-Laurent. Les chercheurs avaient choisi les images selon la distribution des bélugas observés lors des relevés effectués en aout 2009 et les conditions météo des journées pour lesquelles des images étaient disponibles. Vous pouvez voir ci-contre un exemple d’agrandissement d’une image satellite où les chercheurs ont identifié un groupe de bélugas. « Cette image ayant été prise lors d’une journée calme dans l’estuaire, il est peu probable que ces objets blancs soient autre chose que des bélugas », mentionne Jean-François Gosselin, biologiste à Pêche et Océans Canada. « Mais à une période ou un endroit où il y a des morceaux de glaces ou des vagues, l’identification devient moins certaine. C’est difficile de distinguer des bélugas, avec cette qualité d’image, dans des secteurs où il y a des vagues et clapotis comme à l’embouchure du Saguenay. C’est donc un problème pour un relevé de bélugas du Saint-Laurent, où ces zones sont fréquentes. Et pour le prix des images satellites, on peut faire 6 relevés visuels », poursuit-il. Pour l’instant, Pêches et Océans Canada continue donc de faire ses relevés visuellement. « Avec des images plus précises et des couts plus abordables, les images satellites pourraient éventuellement remplacer les relevés aériens, on n’était pas très loin avec les images de 2009 », indique M. Gosselin

Au cours des dernières années, des satellites d’observation de la Terre plus performants ont été mis en orbite, entre autres le WorldView-3 lancé en aout 2014. Grâce aux images satellites qui deviennent de plus en plus précises et au développement de logiciels permettant de distinguer automatiquement les baleines, compter les baleines vues de l’espace pourrait devenir monnaie courante.

Actualité - 25/2/2017

Béatrice Riché

Après plusieurs années à l’étranger, à travailler sur la conservation des ressources naturelles, les espèces en péril et les changements climatiques, Béatrice Riché est de retour sur les rives du Saint-Laurent, qu’elle arpente tous les jours. Rédactrice pour le GREMM de 2016 à 2018, elle écrit des histoires de baleines, inspirée par tout ce qui se passe ici et ailleurs.

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