Un fossile de baleine découvert récemment a révélé un pan important de cette grande question concernant l’évolution des baleines. Les ancêtres des baleines à fanons, initialement dotés de dents, auraient développé, afin de se nourrir de très petites proies bien abondantes dans les océans, un système de succion. Ce système se serait peu à peu transformé en système de filtration dans lequel les fanons agissent comme filtres.

Le fossile, surnommé Alfred, a été découvert en 2014 dans l’état de Washington, aux États-Unis. Il est âgé de 25 millions d’années et il appartient à un groupe de baleines éteint, les aetiocetids. Les dents d’Alfred présentent des marques horizontales bien particulières. Pour les chercheurs, ces rayures s’expliquent par le frottement des dents contre les proies ou les sédiments aspirés à l’intérieur de sa bouche.

Cet animal possédait donc des dents — aucune trace de fanons chez Alfred —, mais il était passé à un mode d’alimentation intermédiaire entre la morsure et la filtration: la succion. Il aspirait ses proies en sortant sa langue puis en la rentrant rapidement afin de créer un courant rapide vers l’intérieur de la cavité buccale, comme le font les bélugas. Les dents, de moins en moins utilisées, auraient fini par disparaitre, ouvrant la voie à l’apparition de fanons depuis la gencive.

Les différentes espèces de baleines ont évolué au fil de millions d’années en exploitant différentes ressources pour minimiser la compétition et optimiser leur consommation. Aujourd’hui, les baleines à fanons se nourrissent de petits animaux vivants en banc: poissons, krill et copépodes. Ils engouffrent de grandes quantités de ces petites proies en une seule bouchée avec de l’eau de mer. Les fanons filtrent cette « soupe », conservant seulement les proies à l’intérieur de leur gueule.

Aussi, grâce à la technologie 3D, les scientifiques ont pu déterminer, à partir des ossements de son crâne, qu’Alfred mesurait seulement 3 m de long; une taille bien moins impressionnante que celle des baleines à fanons d’aujourd’hui. L’hypothèse suggérée est que, comme les fanons prennent énormément de place dans la bouche, l’évolution de la succion à la filtration aurait pu nécessiter une augmentation de la taille de ces animaux.

Les baleines en questions - 11/1/2017

Marie-Sophie Giroux

Marie-Sophie Giroux s’est jointe au GREMM en 2005 et y a travaillé jusqu’en 2018. Elle détient un baccalauréat en biologie marine et un diplôme en Éco-conseil. Chef naturaliste, elle supervise et coordonne l’équipe qui travaille au Centre d’interprétation des mammifères marins et rédige pour Baleines en direct et Portrait de baleines. Aux visiteurs du CIMM ou aux lecteurs, elle adore « raconter des histoires de baleines ».

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