Les mammifères marins nous fascinent car nous sommes bien loin d’avoir percé tous leurs mystères! Chaque rencontre avec ces géants des mers est unique et parfois, amène à des récits surprenants. Caractéristiques physiques atypiques ou comportements singuliers, allons à la rencontre de ces baleines pas comme les autres. Bienvenue dans notre cabinet de curiosité dédié aux cétacés!
Baleine 52 surnommée la plus solitaire des baleines
Un chant de rorqual, d’une fréquence de 52 Hertz, a été entendu pour la première fois dans les eaux du Pacifique Nord en 1989. À quelle espèce cette vocalise singulière appartient-elle? Les rorquals bleus possèdent une fréquence entre 15 et 20 Hertz, et les rorquals communs entre 15 et 30 Hertz. Beaucoup se sont demandé si cette particularité isolerait ce curieux rorqual, surnommé « Baleine 52 », des autres espèces. Sa fréquence de vocalise l’empêche-t-elle de communiquer avec les autres?
Le scientifique Christopher Clarke de University Corneill affirme le contraire en 2015 lors d’un reportage de la BBC. Les rorquals bleus, rorquals communs et rorquals à bosse, peuvent entendre la fréquence de baleine 52! À vrai dire, ses vocalises ne seraient pas si anormales que ça. Le chant de Baleine 52 présente en grande partie les mêmes caractéristiques que le chant d’un rorqual bleu. Elle aurait juste sa propre vocalise, certes bien singulière.
Au fur et à mesure des années, les vocalises de Baleine 52 sont passées à 47Hz. Une diminution a également été mesurée chez les vocalises des rorquals bleus, en réponse au fort trafic maritime de la côte californienne. Ces observations laissent croire que Baleine 52 serait un rorqual bleu ou un rorqual hybride adapté à son environnement. Cependant cela reste une hypothèse, Baleine 52 n’ayant plus été entendue depuis 2012.
La doyenne des baleines
La baleine boréale peut vivre plus de 200 ans! Cette découverte incroyable a été réalisée suite à la pêche d’une baleine boréale par une communauté autochtone en Alaska en 2007. Lors de sa prise, une tête de harpon datant du 19ème siècle a été retrouvée dans son épaule! Les baleiniers de l’époque ne chassant pas les veaux, cela voudrait dire qu’elle était déjà adulte à l’époque. Après une datation au Carbone 14, les résultats ont annoncé que la baleine avait en réalité 211 ans. La baleine australe n’ayant pas de prédateurs naturels, elle aurait développé des adaptations génétiques qui seraient à l’origine de cette longévité.
Des baleines « fantômes »
Et si Moby-Dick, le cachalot blanc vedette du conte, n’était pas juste imaginaire? Certaines baleines se distinguent de leurs congénères par leur blancheur hors du commun. Tout comme les animaux terrestres, les baleines peuvent être albinos!
L’albinisme est un phénomène rare dans le règne animal, mais des baleines blanches -autre que les bélugas qui ne sont pas albinos- ont déjà été rencontrées! Déjà au XIXème siècle, un cachalot blanc était bien connu des baleiniers dans l’océan Pacifique au large du Chili. Nommé Mocha Dick, il est possible qu’il ait inspiré l’histoire de Moby Dick. Plus récemment, Migaloo, un rorqual à bosse mâle albinos a été observé pour la première fois en Australie en 1991! Régulier dans les eaux australiennes, il est même devenu une vedette.
Autre que l’albinisme, il existe des anomalies de décoloration chez les baleines telle que le leucisme. Dans ce cas-ci, la mélanine, qui est le pigment responsable de la coloration du corps, est dégradée. Différents cas de leucisme ont été répertoriés chez les épaulards, rorquals à bosse, rorquals communs, ou encore la baleine grise!
Les baleines peuvent aussi avoir des problèmes de dos…
Avez-vous déjà vu des bélugas avec un dos déformé? Il arrive dans le fleuve Saint-Laurent de croiser des individus ayant des scolioses, une malformation de leur colonne vertébrale visible! Pascolio, Néo ou encore Kamouraska sont des bélugas facilement reconnaissables en ayant cette malformation visible.
Si certaines de ces déformations sont d’origine génétique comme certains bélugas, d’autres peuvent malheureusement être accidentelles. C’est le cas de Moon, un rorqual à bosse habituée des eaux de la Colombie-Britannique au Canada. Le 7 septembre 2022, une équipe de B.C Whale, qui a remarqué que sa colonne vertébrale avait la forme inhabituelle en S. Moon aurait subi une collision avec un bateau, et ne pouvait plus que se déplacer à l’aide de ses nageoires pectorales. Elle a été vue une dernière fois en Colombie-Britannique le 11 octobre, avant d’être aperçue au large d’Hawaii, le 1er décembre 2022. Malgré sa condition, elle a réussi à effectuer 4800 kilomètres de migration en 8 semaines! Une résilience incroyable malgré la sévérité de ses blessures. Malheureusement, elle était en mauvais état une fois revue à Hawaii, et depuis plus aucune nouvelle de Moon.
Il est important de noter que les collisions avec les navires représentent malheureusement l’une des premières causes de mortalité des baleines dans le monde.
Tryphon le cachalot vedette du Saint-Laurent
Il est le premier cachalot photographié dans le Saint-Laurent par l’équipe du GREMM en 1991. Tryphon était fidèle de la Côte-Nord, et revenait presque chaque année accompagné d’autres cachalots! Pourtant, l’estuaire du Saint-Laurent est peu profond, alors que les cachalots peuvent aller chercher leurs proies jusqu’à 1000 m de profondeur. Il se pourrait que ces cachalots accompagnant Tryphon étaient de jeunes mâles se séparant de leur groupe, recherchant de nouvelles aires d’alimentation pour éviter la concurrence avec de plus vieux mâles.
Malheureusement en 2003, Tryphon s’est empêtré dans des câbles de casier de crabes à Sept-Îles. Il n’a pas réussi à survivre à son empêtrement et a été retrouvé quelques jours plus tard à Rimouski. Depuis sa mort, la présence de cachalots est rare dans le Saint-Laurent.
Un narval égaré dans le Saint-Laurent
En 2016, un individu particulier est observé au milieu des bélugas. Une peau mouchetée de couleur grise, et une longue dent torsadée sortant de temps à autre de l’eau : pas de doute, il s’agit d’un narval! Ces derniers vivent en Arctique à plus de 1000km du Saint-Laurent. Comment s’est-il rendu jusqu’ici? Serait-ce la fuite d’un prédateur, la poursuite d’éventuelles proies, ou son tempérament d’explorateur? Dans tous les cas, ce petit narval s’est fait adopter par un groupe de bélugas mâles dans le Saint-Laurent. Observé jusqu’à 2022 avec le même groupe, il n’a pas été revu depuis. Ouvrez l’œil, peut-être le croiserez-vous!
C’est la fin de ce cabinet de curiosité, mais cela ne veut pas dire qu’il n’existe pas d’autres faits surprenants! Le monde des cétacés regorge de mystère, qui sait quels autres il nous reste à découvrir!