Par Mathieu Marzelière
Voilà ! La saison de terrain 2019 du GREMM est officiellement lancée. Cette première semaine était consacrée au projet de «tagage» (pose de balise), projet de Pêches et Océans Canada auquel nous collaborons sur le terrain. Il vise à mieux comprendre la vie acoustique des bélugas, leurs mouvements et réactions comportementales pendant et après l’exposition au bruit et l’effet que le bruit a sur leur alimentation.
Mais la météo n’a été de la partie que le jeudi! N’empêche, ce fut une journée fructueuse pour l’équipe sur le Bleuvet, composée cette journée-là du capitaine Michel Moisan, des assistants de recherche Sophie Bédard et Mathieu Marzelière et de la chercheuse Véronique Lesage de Pêches et Océans Canada.
Après une matinée à rechercher des groupes de mâles dans les secteurs aval du parc marin du Saguenay–Saint-Laurent, nous décidons de changer de cap et d’essayer plus en amont en remontant vers Rivière-du-Loup.
Vers 12h30, non loin des iles du Pot à l’Eau-de-Vie, nous rencontrons une multitude d’oiseaux qui fréquentent ce secteur en cette période de l’année (petits pingouins, guillemots marmettes, bihoreaux, grands hérons, etc.). Et sous leurs envolées, notre premier groupe de bélugas de 2019! Il s’agit d’un petit groupe d’une quinzaine d’individus blancs et gris en «milling». Le «milling» est une nage presque stationnaire, où les bélugas plongent en profondeur et remontent presque à la même place. Ce comportement serait associé à l’alimentation.
L’un des bélugas nous parait familier. Alors qu’il plonge, nous le reconnaissons : c’est DL9095, que nous avons surnommé «Moignon» ! Nous l’avons rencontré pour la première fois en aout 2018 au large de Trois-Pistoles.
Après une heure avec eux, nous n’avons toujours pas réussi à déposer notre petit mouchard (notre balise) sur le dos d’un béluga. Nous décidons de changer de groupe en espérant y trouver des individus plus coopératifs pour la science.
Un deuxième groupe d’une trentaine d’individus, dont une majorité à la peau grise, est repéré en aval de ce premier site d’observation. Parmi ceux-ci, nous rencontrons quelques individus connus de notre équipe, dont deux bélugas au dos déformé : Pascolio (adoptée en 1990 par les Commerçants de Tadoussac) et Dimitri. Nous croisons aussi DL9039 (en cours d’adoption par des élèves de la Polyvalente Chanoine Armand Racicot).
Et après seulement 30 minutes d’approche, la balise est rapidement déposée sur le dos d’un petit curieux venu inspecter le bateau de recherche.
S’ensuit donc un suivi à distance. Notre petite balise est munie d’un émetteur nous diffusant des séries de petit «BIP», «BIP», «BIP» (via des ondes hertziennes) lorsqu’elle fait surface. À l’aide d’une antenne et d’un récepteur, nous cherchons donc des yeux le béluga dont les ventilations, c’est-à-dire les remontées à la surface, concordent avec les signaux sonores de notre récepteur. Défi supplémentaire, nous essayons de garder une certaine distance pour ne pas interférer avec le comportement de l’animal.
Puis, après quelques heures d’espionnage, une série de «BIP» continus vient nous démontrer que notre mouchard s’est retiré du dos de notre béluga sur écoute. La balise est par la suite localisée en suivant dans un premier temps l’intensité du signal, puis par contact visuel, et enfin récupérée afin d’y extraire les précieuses données qu’elle contient. L’équipe de Véronique Lesage de Pêches et Océans Canada pourra alors avancer dans ses recherches.