Par Mathieu Marzelière et Albert Michaud
Lundi 27 aout 2018. Nous quittons le port de Tadoussac à bord du BpJAM à la recherche de bélugas pour continuer le suivi régulier de photo-identification. Malgré la présence de brouillard sur le Saint-Laurent, les conditions météo semblent propices à de bonnes observations. Naviguant dans un premier temps entre les lames de brouillard, nous finissons par trouver au large de la bouée K54 un secteur découvert. Après plusieurs dizaines de minutes à scruter l’horizon à la recherche de dos blancs, nous en repérons enfin.
Au même rythme que le brouillard se dissipe, le portrait du troupeau se dessine pour arriver à un total d’une trentaine d’individus. Après avoir photographié plusieurs petits groupes d’individus, un groupe d’une dizaine de gros bélugas attire notre attention. Alors que la majorité du troupeau avance à un rythme modéré, ces gros bélugas sont beaucoup plus actifs et nagent serrés les uns contre les autres. Mais nous avons à peine eu le temps de prendre leurs flancs en photo que ceux-ci se perdent à nouveau dans la brume qui reprend du terrain.
Nous sommes sur le point de mettre un terme à notre rencontre, au milieu d’une éclaircie, mais une vive activité en surface (gerbes d’eau, nageoires caudales, nageoires pectorales) attire notre attention. En nous rapprochant du groupe de bélugas qui en est à l’origine, nous prenons la décision de garder nos distances et de lancer le drone afin de pouvoir documenter la scène. Une fois le drone arrivé au-dessus de ces derniers, plus de doute possible, il ne s’agit pas d’un ballet, mais d’une scène de reproduction.
On retrouve un groupe de mâles reconnaissables à leurs pénis chassant une femelle. Contrairement aux rorquals à bosses qui vont mener une confrontation entre mâles afin d’avoir la chance de se reproduire par la suite avec une femelle, la compétition chez les bélugas pourrait avoir lieu après la copulation via la quantité de sperme introduite dans la femelle.
Il se pourrait aussi que ces séances au cours desquelles plusieurs mâles contraignent une femelle soient un exemple d’alliance entre mâles afin d’avoir accès à des opportunités de reproduction.
Mais en aout, la saison de la reproduction devrait être terminée depuis longtemps ! Ce n’est pas la première fois que les membres de notre équipe observent ces comportements en dehors de la saison de reproduction. Ces séances sont-elles une sorte d’entrainement ? Ou la saison de reproduction est-elle plus étendue que nous ne le croyions ? Assurément, nous avons encore beaucoup à apprendre sur la vie des bélugas du Saint-Laurent.
Pour en savoir plus sur la reproduction du béluga : La reproduction