Le mois de juillet et les chaudes journées d’été apportent-ils aussi l’action dans le Saint-Laurent? De plus en plus de grandes baleines arrivent dans l’estuaire, au grand plaisir des observateurs et observatrices, et certaines sont même identifiées! Les bélugas séjournent dans la baie de Gaspé et du côté de Sept-Îles, alors que les soirées au bord du fleuve offrent des surprises de couleur rorqual bleu et baleines blanches.
Les grandes baleines identifiées
Dans le parc marin du SaguenayーSaint-Laurent, les identifications de baleines se multiplient. Le rorqual à bosse H742, surnommé Chalk, a été observé le 2 juillet. Il s’agirait d’un individu ayant aussi été aperçu en 2021 et 2023 dans le secteur, de même qu’en 2011 et 2019. Du côté de Matane, l’animal a aussi été vu les deux dernières saisons.
Une navigatrice a croisé la route d’une femelle rorqual à bosse bien connue et observée presque tous les ans depuis 2006. Alors qu’elle longeait la côte, une baleine surgit : « […] j’ai capoté quand j’ai vu une caudale au moment de la plongée! […] J’avais un petit feeling que j’allais avoir une belle surprise! Elle est ressortie quelques minutes plus tard proche de mon bateau, et j’ai tout de suite compris à qui j’avais à faire en voyant sa belle dorsale crochue, mais je voulais en être certaine en voyant sa caudale. Comme pour faire monter l’excitation pendant encore quelques minutes, elle n’a pas montré la caudale sur cette plongée, et c’est seulement à la plongée suivante que j’ai pu confirmer que c’était bien elle! » Il s’agissait de Gaspar, facilement reconnaissable lorsqu’on peut voir le patron de coloration sur la face ventrale de sa nageoire caudale. Sur le lobe droit, on peut voir le profil du célèbre fantôme qui lui a valu son nom.
Une des autres célébrités de la semaine est le rorqual commun Bp918, alias Kashkan, observé pour la première fois en 2000. Il a été vu à plusieurs reprises depuis, ce qui fait de lui un résident saisonnier de l’estuaire du Saint-Laurent. Une biopsie permit de confirmer le sexe de l’animal : il s’agit d’un mâle. Son nom, Kashkan, signifie «vagues» en langue innu-aimun, la langue traditionnellement parlée par les membres de la communauté innue d’Essipit.
Du côté de Mingan et Sept-Îles, la saison bat aussi son plein. Lors de leurs sorties sur l’eau, les équipes du MICS ont repéré plus de 13 rorquals communs, trois rorquals à bosse et quelques petits rorquals, alors qu’un requin-pèlerin nage toujours dans le coin.
Avec toutes ses baleines identifiées dans la dernière semaine, un naturaliste a commenté : « Peut-être le vrai début de saison! »
Vita et les baleines blanches dans le golfe
La présence de bélugas dans la baie de Gaspé a bien fait jaser. Les observations sont multiples, on nous signale un groupe de quatre individus, dont un jeune se promenant au large de la rive du Parc National Forillon. Une autre journée, une passionnée en aperçoit cinq tandis que des résidents admirent un dos blanc dans le coin de Penouille.
Du côté de Sept-Îles, le scénario est similaire, mais les groupes semblent encore plus nombreux. Le Centre d’éducation et de recherche de Sept-Îles (CERSI) nous avise de la présence de plus de trente individus. « Certains avaient des marques importantes, dont un, qui je crois est Vita, » explique Anik Boileau, chercheuse pour le CERSI. L’identification sera par la suite confirmée par les équipes du Groupe de recherche et d’éducation des mammifères marins (GREMM), qui étudient l’espèce. Ce mâle se distingue par une longue cicatrice profonde présente sur son flanc gauche. La présence d’imposante bosse en avant de la crête, dont la taille a augmenté avec les années, est également distinctive. Connu depuis 1989, il fait partie d’un groupe d’une vingtaine de mâles adultes, appelé la bande du Saguenay, qui arpente généralement le fjord du Saguenay et son embouchure.
Pour Robert Michaud, directeur scientifique du GREMM, il est encore impossible de tirer des conclusions sur la présence des bélugas dans le golfe à cette période de l’année. En entrevue pour Radio-Canada, il se questionne : « Est-ce que ces visiteurs sont des précurseurs d’un changement dans la répartition des bélugas ou simplement des bélugas qui trainent un peu avant de revenir cet été dans le parc marin du Saguenay–Saint-Laurent? […] On sait que les bouleversements climatiques ont entrainé des modifications considérables dans l’habitat, particulièrement en raison de l’élévation de la température et ça c’est assez spectaculaire. Alors, on peut imaginer différents mécanismes qui pourraient entrainer des modifications dans les habitudes des bélugas.» On sait notamment que la diète du béluga évolue depuis quelques années.
Rorqual bleu et soirées familiales
Il n’y avait cependant pas que des bélugas dans la baie de Gaspé! Une passionnée s’émeut devant ses dernières observations « […] au moins 8 rorquals à bosse avec des spectacles époustouflants (sauts, pectorales dans les airs…), un commun […]. Les jeunes phoques communs se prélassent au soleil dans les colonies, parmi les adultes. » Lors d’une soirée au bord de l’eau, un résident est surpris par la présence de la plus grosse des baleines. Son objectif de départ était cependant de voir le rorqual à bosse Gaspar, qu’il a pu observer au loin, avant qu’elle s’éloigne.
« Puis, un son puissant retentit. Forcément, un souffle de grosse baleine. Cependant, Gaspar était bien trop loin pour que ça soit son souffle. J’ai pensé alors qu’il devait y avoir une autre grosse baleine. Quelques secondes plus tard, le son puissant retentit de nouveau et c’est à ce moment-là qu’on aura compris que ce n’était pas n’importe laquelle des grosses baleines, mais la plus grosse qu’il existe. Un rorqual bleu. » Une famille de Saint-Siméon a eu droit à un cadre charlevoisien magnifique. « Moment en famille passé à Port-au-Persil lundi soir. Nous avons eu la chance de voir à plusieurs reprises au large une maman béluga au côté de son bébé. »
Le billotage d’un béluga
Un nouveau résident de la Côte Nord a eu la chance de voir ses premiers bélugas! « À Pointe-Noire, il y en avait au moins une dizaine pendant l’après-midi, dont une maman qui semblait allaiter! J’ai dû rassurer quelques personnes qui semblaient absolument convaincues qu’elle était morte. Tout le monde a soupiré de soulagement quand nous l’avons vu faire quelques plongées. » Peut-être était-elle en train de faire du billotage? Ce comportement consiste à se laisser flotter en surface, rappelant un billot de bois qui flotte. Les bélugas peuvent le faire pendant 30 à 45 minutes. Il s’agit en fait simplement d’un comportement de repos
Où sont les baleines cette semaine? La carte des observations
Ces données ont été rapportées par notre réseau d’observatrices et observateurs. Elles donnent une idée de la présence des baleines et ne représentent pas du tout la répartition réelle des baleines dans le Saint-Laurent. À utiliser pour le plaisir!
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