Dauphins et rorquals à bosse, les visiteurs inopinés de novembre
Novembre débute avec d’heureuses surprises dans le Saint-Laurent. Il se dit que des centaines de dauphins seraient venus jusqu’aux Escoumins avant de disparaitre au large, quelques rorquals à bosse se seraient déplacés jusqu’à Tadoussac, et des marsouins communs font irruption à Charlevoix. Les petits rorquals et les bélugas, qui parsèment encore les flots, maintiennent un sentiment d’allégresse avec l’hiver qui arrive. Des observations faites depuis la rive, malgré la brume et la pluie, par des observateurs et observatrices toujours plus fascinés par ce qui peuple nos eaux froides. Merci à leurs partages qui font vivre cette rubrique!
Des visiteurs visités à Port-au-Persil
Lors d’une sortie en kayak de mer début novembre à Port-au-Persil, une passionnée a eu la chance d’observer plusieurs espèces de mammifères marins, encore bien présents dans le Saint-Laurent. Elle a dénombré, à une bonne distance, « 5 à 10 marsouins communs, 2 à 3 phoques, des […] bélugas, dont une avec un veau, et un petit rorqual ». Petit rappel que les bélugas sont en voie de disparition et que plusieurs règles s’appliquent à nous lorsque nous les voyons sur l’eau.
Le lendemain aux Bergeronnes, toujours en kayak de mer, cette avide observatrice raconte : « Nous avons pu observer un béluga translucide à travers les vagues tout seul, et deux autres [groupes] de bélugas, deux petits rorquals, des phoques, et un rorqual commun qui prenait son souffle. » Une observation somme toute assez exceptionnelle, puisque peu de rorquals communs ont été remarqués dans cette zone cet automne!
Un béluga a aussi pointé le bout de son melon à Saint-Irénée, nous partage une résidente, quelque peu déçue de ne pas en avoir vu plus cette semaine. Pendant l’hiver, cette baleine résidente du Saint-Laurent semble préférer la glace libre avec des couverts de 70 % à 90 %. C’est pourquoi les scientifiques suggèrent que la population migre plus en aval dans l’estuaire, entre Forestville et Pointe des Monts, et peut-être même jusque dans le golfe. Des survols aériens ont dénombré plusieurs individus jusqu’à Sept-Îles, alors que d’autres petits groupes ont été aperçus dans l’estuaire jusqu’à Rivière‑du‑Loup.
Arrivée à brûle-pourpoint à Tadoussac
Sur la Côte-Nord, le mois de novembre nous a préparé de belles surprises, bienvenues certes, mais inattendues après un mois d’octobre plus calme. Par un frais matin, un amoureux de la nature a contemplé plus de 300 dauphins à flancs blancs durant des heures en face des Escoumins. Ces agiles cétacés nageaient en « plusieurs groupes plus ou moins importants » a-t-il remarqué.
Avec leur dos gris foncé qui tire sur le noir, les lignes blanches et jaunes joliment contrastées contre le gris de leurs flancs, et le blanc éclatant qui s’étend sur leur ventre et sous leur rostre, les dauphins à flancs blancs nous offrent un paysage bariolé. Ces cétacés fuselés restent souvent plus au large. En Atlantique Ouest, on peut les observer du sud du Groenland jusqu’à Cape Cod, mais les limites de leur répartition ne sont pas connues. Leur diète diversifiée, composée de harengs, maquereaux, d’éperlans, de merlus, et de calamars entre autres, influence probablement leur distribution saisonnière. Cela pourrait expliquer pourquoi ils ne s’aventurent qu’à l’automne dans l’estuaire.
Autre visite surprenante : quatre rorquals à bosse se sont immiscés dans le parc marin du Saguenay–Saint-Laurent, jusqu’au phare du Haut-Fond-Prince. Bien des yeux sont détournés du rivage ces derniers temps, mais une ornithologue a pu les observer pendant quelques jours depuis les dunes de Tadoussac. Cette espèce débute normalement sa migration vers le sud à cette période de l’année. Il est toutefois possible que certains individus ne migrent pas chaque année. Cela pourrait-il dépendre de leur sexe, de leur âge, de leur maturité sexuelle ou d’autres facteurs? Mystère et boule de lard!
En compagnie des baleines à Pointe-des-Monts
Fin octobre, une observatrice, alors sur le traversier de Godbout, a bravé la météo pour espérer voir un souffle ou une nageoire dorsale. Sa patience a été récompensée et elle nous partage ce qu’elle a vu : « Plusieurs marsouins, 2 petits rorquals proches du quai, 2 à 3 rorquals à bosse, dont un qui se tenait plus loin, et un rorqual commun qui, prenant la même direction que deux des rorquals à bosse, s’en allait vers le golfe à l’est. »
Mystères à Sept-Îles et douce fin d’automne en Gaspésie
Un Nord-Côtier signale la présence de deux petits rorquals ainsi qu’un souffle au loin d’un gros et mystérieux rorqual. Au même instant, mais beaucoup plus loin, une queue de baleine d’une espèce non identifiée émerge de l’eau. Deux jours plus tard, il remarque deux phoques communs qui, « durant plus d’une heure, sortent la tête pour sentir, le nez bien en l’air durant 2 minutes, avant de replonger et ressortir 4 à 5 minutes plus tard. » Le phoque commun peut plonger un maximum de 30 minutes jusqu’à 480 mètres de profondeur! Pour se le permettre, il réduit son pouls et emmagasine plus d’oxygène dans son sang et ses muscles.
En Gaspésie, une résidente raconte son observation du lundi 4 novembre : « J’ai aperçu dans la baie de Gaspé deux petits rorquals bien en vue, et un grand souffle au loin ». « Les phoques communs sont aussi encore présents à Haldimand et à l’Anse aux cousins », ajoute-t-elle.
Heureux hasards de novembre
En plus des marsouins communs, des phoques et des petits rorquals, des Nord-Côtiers ont pu apercevoir la même journée une chouette rayée, des petits pingouins, un guillemot à miroir, et même un coyote!
Où sont les baleines cette semaine? La carte des observations
Ces données ont été rapportées par notre réseau d’observatrices et observateurs. Elles donnent une idée de la présence des baleines et ne représentent pas du tout la répartition réelle des baleines dans le Saint-Laurent. À utiliser pour le plaisir!
Cliquez sur les icônes de baleine ou de phoque pour découvrir l’espèce, le nombre d’individus, des informations supplémentaires ou des photos de l’observation. Pour agrandir la carte, cliquez sur l’icône du coin supérieur droit. La carte fonctionne bien sur Chrome et Firefox, mais pas aussi bien sur Safari.
Pour faire apparaitre la liste des observations, cliquez sur l’icône du coin supérieur gauche.
Merci aux collaborateurs et collaboratrices!
Merci aux observateurs et observatrices qui partagent avec nous leur amour pour les mammifères marins! Vos rencontres avec les cétacés et les pinnipèdes sont toujours un plaisir à lire et à découvrir.
Ce sont vos yeux, sur l’eau ou depuis la berge, qui permettent à cette rubrique de voir le jour.
Marie-André Charlebois
Thalia Cohen Bacry
Clara Comeau
Laetitia Desbordes
Kevin Maltese-Crottier
Diane Ostiguy
Stéphane Pagès
Renaud Pintiaux
Andréanne Sylvain
Marielle Vanasse
Xinlan Yu
Et à tous les autres!
Merci aussi aux équipes qui partagent leurs observations :
Centre d’éducation et de recherche de Sept-Îles (CERSI)
Groupe de recherche et d’éducation sur les mammifères marins (GREMM)
Réseau d’observation des mammifères marins (ROMM)
Réseau québécois d’urgence pour les mammifères marins (RQUMM)
Station de recherche des Îles Mingan (MICS)
Vous souhaitez vous aussi partager vos observations?
Vous avez observé des mammifères marins dans le fleuve Saint-Laurent? Qu’il s’agisse d’un souffle au large ou de quelques phoques, écrivez-nous et envoyez-nous vos photos à [email protected]!
Thalia Cohen Bacry
Thalia Cohen Bacry est rédactrice scientifique pour le GREMM après avoir été naturaliste en 2023. Diplômée de UBC, elle a complété une maîtrise en études internationales à l’Université Laval et poursuit un apprentissage dans plusieurs domaines, dont la géographie, les sciences politiques et le comportement animal. Fascinée depuis toujours par la protection de l’environnement, elle a grandi en Savoie, entourée des lacs et des montagnes, avant d’immigrer au Canada et de découvrir des espaces encore plus grands et plus sauvages. Intrépide, curieuse, et persévérante elle aime apprendre, observer, et analyser afin de sensibiliser à la sauvegarde de nos océans et ainsi contribuer à leur protection.
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