Une étude menée par des chercheurs de l’Université d’Aberdeen, en collaboration avec le Scottish Marine Animal Stranding Scheme, a récemment démontré le phénomène de bioaccumulation de certains métaux lourds chez une vingtaine de globicéphales noirs de l’Atlantique (Globicephala melas) échoués dans la région du Fife en Écosse en septembre 2012. Leurs résultats ont été publiés dans la revue Science of the Total Environment.

Un échouage collectif devient une opportunité de recherche

Des 31 globicéphales échoués, 10 ont survécu et 21 sont morts. L’équipe a profité de cet échouage massif, où les animaux morts d’âge différent (1 à 36 ans) appartenaient à un même troupeau, pour prélever plusieurs échantillons (foie, rein, muscle et cerveau). Qu’ont-ils découvert?

Tout d’abord, des concentrations de mercure ont été trouvées dans tous les organes des spécimens échoués; le produit toxique est diffusé dans le corps par le réseau sanguin. Les concentrations de mercure augmenteraient aussi avec l’âge. Trois des neuf globicéphales âgés de plus de neuf ans présentaient même dans leur cerveau des concentrations de mercure plus élevées que celles qui induisent des dommages neurologiques graves chez l’homme. Selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), des niveaux élevés de mercure dans le corps humain peuvent causer des tremblements, une perte de mémoire, des maux de tête, des troubles de la motricité, un dysfonctionnement cognitif, de l’insomnie et des problèmes neuromusculaires. Toutefois, les effets chez les baleines demeurent à ce jour inconnus. Dans les océans, la principale source de mercure provient des activités humaines. Ces concentrations auraient même triplé depuis la révolution industrielle du 18e siècle.

Autre découverte des chercheurs écossais documentée pour une première fois: la présence de cadmium dans le cerveau des spécimens adultes échoués et son augmentation avec l’âge dans cet organe ainsi que dans le foie. L’accumulation de cadmium dans l’eau, l’air et le sol se produit particulièrement dans les zones industrielles. Les effluents et boues d’épuration sont entre autres des sources importantes de cadmium dans les milieux marins.

La cause de l’échouage?  

L’équipe n’a pu démontrer une corrélation entre la présence de ces métaux lourds dans le cerveau des baleines échouées et une possible désorientation ayant pu causer l’échouage du troupeau. Selon les chercheurs, d’autres avenues demeurent à explorer. Les grands groupes de globicéphales sont animés par une très forte cohésion sociale. Des échouages collectifs impliquant des centaines d’individus ne sont pas rares. Plusieurs hypothèses tentent d’expliquer ces échouages collectifs. Sont-ils causés par une erreur de navigation, une maladie infectieuse ou parasitaire au sein du groupe, un comportement de solidarité extrême envers un membre du groupe, malade, blessé ou en détresse?

Source :

Sur le site Science Direct: Possible link between Hg and Cd accumulation in the brain of long-finned pilot whales (Globicephala melas)

Pour en savoir plus :  

Sur le site The Guardian: Toxic chemicals found in beached pilot whales in Scotland

Sur Baleines en direct:

Les échouages collectifs

Les globicéphales noirs de l’Atlantique Nord

Actualité - 24/2/2016

Marie-Sophie Giroux

Marie-Sophie Giroux s’est jointe au GREMM en 2005 et y a travaillé jusqu’en 2018. Elle détient un baccalauréat en biologie marine et un diplôme en Éco-conseil. Chef naturaliste, elle supervise et coordonne l’équipe qui travaille au Centre d’interprétation des mammifères marins et rédige pour Baleines en direct et Portrait de baleines. Aux visiteurs du CIMM ou aux lecteurs, elle adore « raconter des histoires de baleines ».

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