Si cette pollution est identifiée dans le Pacifique et l’Atlantique depuis les années 1960, les premières recherches sur les Grands Lacs révèlent que la concentration de microplastiques dans le lac Érié est plus importante que dans ces océans.

Selon les travaux de l’océanographe Lorena Dios Mendoza de l’University of Wisconsin-Superior, qui ont débuté en 2011 sur les Grands Lacs, une très forte concentration de débris de plastiques de toutes tailles a été observée dans ces lacs nord-américains, flottant à la surface ou entre deux eaux.

Dans le lac Érié, certainement le plus pollué des cinq lacs, 85 % de ces plastiques mesurent moins de cinq millimètres et la plupart sont seulement détectables au microscope. Ils échappent à la filtration effectuée par les usines de traitement des eaux. Cette concentration est évaluée à 1,5 à 1,7 million de particules par mille carré (1 mille = 1,6 km), représentant une pollution de 24 % supérieure à celle des tourbillons de déchets plastiques de l’Atlantique Sud.

En 2012, l’étude s’est déroulée dans les lacs Supérieur, Huron et Érié. Des échantillonnages sont réalisés dans les lacs Michigan et Ontario cet été. Les travaux sont prévus se poursuivre en 2014. Lorena Dios Mendoza travaille en collaboration avec la professeure Sheri Mason et son équipe de la State University of New York.

Impacts sur la chaîne alimentaire

L’équipe de l’océanographe a collecté des échantillons avec des filets à mailles ultrafines tirées par des voiliers. D’après les nécropsies pratiquées sur des espèces aquatiques, ces plastiques sont ingérés par les oiseaux et poissons – qui les confondent avec leur nourriture – et causent des blessures et des mortalités par occlusion. Sur ces débris se fixent des toxines et des polluants organiques persistants, tels que les HAP et BPC qui sont des molécules dont certaines sont reconnues pour être cancérigènes et mutagènes, qui mettent de quatre à cinq décennies à se dégrader. Ces polluants sont absorbés par le zooplancton et s’accumulent dans tous les maillons de la chaîne alimentaire, incluant les humains qui mangent du poisson.

Selon la chercheuse, la production mondiale de plastiques a augmenté de 500 % depuis 1980 et ces matières représentent 80 à 90 % de la pollution des océans. On pense bien sûr à tous les objets utilisés au quotidien comme les sacs jetables, les bouteilles, mais aussi les fibres vestimentaires, les mégots de cigarette, les cordes et filets de pêche, les particules abrasives de certains cosmétiques et dentifrices.

Les Grands Lacs constituent la plus grande ressource en eau douce du monde et 40 millions de personnes, aux États-Unis et au Canada, y puisent leur eau potable. Le fleuve Saint-Laurent y prend sa source et abreuve presque la moitié des huit millions des habitants du Québec. Le Saint-Laurent, avec ses parties fluviale et maritime, abrite des écosystèmes riches et complexes, du plancton aux plus grands mammifères marins de la planète.

Moins de plastiques à la source

Dans les pays occidentaux, gros consommateurs de plastiques, le taux de recyclage des déchets plastiques varie de 5 à 30 %. Une grande partie de ces plastiques non recyclés sont stockés dans des hangars pour une durée indéfinie ou envoyés vers des pays, comme l’Inde, qui les traitent et les recyclent dans des conditions déplorables pour l’environnement et les personnes travaillant sur les dépotoirs; une partie se retrouve dans l’environnement sans être passée par le bac de recyclage.

Si des industries retirent certains composants plastiques de leurs produits, que d’autres innovent pour le recyclage des plastiques et même la fabrication de plastiques végétaux, la réduction de la quantité de plastiques dans l’environnement passe avant tout par la sensibilisation des consommateurs et le changement de leurs comportements, selon l’avis de l’océanographe.

Sources: Bulletins-électroniques ADIT, Le Devoir, Dailymotion, Atlantic Cities, MLive.

En savoir plus:

Actualité - 15/8/2013

Christine Gilliet

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