Le marsouin commun se nourrit jour et nuit, tentant de capturer jusqu’à 550 poissons de petite taille par heure, avec un taux de succès de plus de 90 %, selon une étude publiée le 6 juin 2016 dans la revue scientifique Current Biology. Le marsouin cible des poissons plus petits que ceux d’intérêt commercial. Afin de combler ses besoins métaboliques avec de si petites proies, il doit se nourrir presque continuellement.

Marsouin commun / Harbor porpoise © GREMM

Le marsouin commun est le plus petit cétacé vivant dans les eaux tempérées froides de l’hémisphère Nord. Comparativement aux autres baleines à dents, il atteint la maturité plus rapidement, se reproduit plus fréquemment et a une durée de vie plus courte. Sa petite taille et l’eau froide dans laquelle il vit entraînent une perte de chaleur relativement élevée et limitent la quantité d’énergie qu’il peut stocker par rapport à son métabolisme, le rendant vulnérable à la famine. Le marsouin, comme les autres baleines à dents, utilise l’écholocalisation pour trouver, suivre et intercepter ses proies. Lorsqu’il approche une proie, le marsouin émet des clics répétés et distinctifs.

Nous détenons, pour de nombreuses espèces sauvages et particulièrement les espèces aquatiques, encore peu d’information à petite échelle concernant leurs comportements de prédation. Au cours des dernières décennies, le développement de balises permettant d’enregistrer et de transmettre des données biologiques et physiques a permis d’étudier les comportements de chasse de plusieurs prédateurs, mais il est rarement possible d’obtenir simultanément de l’information sur le comportement des proies. Dans cette étude, les chercheurs ont réussi à obtenir des informations sur les interactions entre les marsouins et leurs proies en utilisant les signaux d’écholocalisation produits par les marsouins eux-mêmes lorsqu’ils suivent une proie. Les chercheurs ont posé sur cinq marsouins communs, à l’aide de ventouses, des enregistreurs de mouvements et de sons, numériques et de haute résolution, appelées DTAG (Digital Acoustic Recording Tag). Le faible bruit ambiant, dans la bande de fréquences utilisées par les marsouins, ainsi que les clics distinctifs et répétés — plus de 500 clics par seconde — émis par le marsouin lorsqu’il approche une proie, ont permis une visualisation détaillée de chaque rencontre marsouin-proie.

Marsouin commun / Harbor porpoise © GREMM
Marsouin commun / Harbor porpoise © GREMM

Les résultats de cette étude démontrent que les marsouins s’alimentent presque continuellement, chassant des petites proies (3 à 10 cm) avec un taux de réussite remarquablement élevé. Comparativement aux grandes baleines à dents qui ont fait l’objet d’études similaires, le nombre de proies capturées par les marsouins est exceptionnel: sur une base quotidienne, le nombre de proies capturées est d’un ordre de grandeur plus élevé que ceux rapportés pour les cachalots, les baleines à bec et les globicéphales. Le métabolisme élevé du marsouin (résultant de sa petite taille et de son habitat en eau froide) et la petite taille de ses proies font en sorte que le marsouin doit chasser et capturer des milliers de poissons par jour. Le besoin du marsouin de s’alimenter presque continuellement lui procure, selon les auteurs de cette étude, une faible résilience au dérangement. Même un niveau modéré de dérangement par des activités humaines dans l’habitat du marsouin commun peut avoir de graves conséquences sur l’état de santé de l’individu et de la population.

Source:

Ultra-High Foraging Rates of Harbor Porpoises Make Them Vulnerable to Anthropogenic Disturbance

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Marsouin commun

Actualité - 10/6/2016

Béatrice Riché

Après plusieurs années à l’étranger, à travailler sur la conservation des ressources naturelles, les espèces en péril et les changements climatiques, Béatrice Riché est de retour sur les rives du Saint-Laurent, qu’elle arpente tous les jours. Rédactrice pour le GREMM de 2016 à 2018, elle écrit des histoires de baleines, inspirée par tout ce qui se passe ici et ailleurs.

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