Un spécimen de baleine à bec s’est échoué à Rivière-au-Tonnerre le 17 septembre. Les premières photos de la carcasse ont tout de suite intrigué le Réseau québécois d’urgences pour les mammifères marins. Patron de coloration peu commun, présence de ce qui ressemble à un rostre fin et allongé, absence d’échancrure au niveau de la queue, autant d’éléments qui suggèrent que ce cas est particulier. Avec l’aide du Smithsonian National Museum of Natural History (NMNH) et de l’Université de Dalhousie, la carcasse a été identifiée comme étant celle d’une baleine à bec de Sowerby, une espèce rare dans cette aire du Saint-Laurent.
Une identification laborieuse
Ce cas aura su tenir le Réseau en haleine. Le témoin ayant trouvé la carcasse lors d’une promenade a rapidement contacté le 1-877-7baleine afin de signaler sa trouvaille. Intrigué, il ne savait pas vraiment à quoi il était confronté du fait de l’allure de la baleine et de son état de décomposition avancée. Au vu des premières photos transmises, il était clair qu’il ne s’agissait pas d’une carcasse de marsouin ou de dauphin. Nous suspections une baleine à bec, mais à quelle espèce appartenait-elle (il existerait 23 espèces de baleines à bec)?
Un bénévole s’est rendu sur les lieux rapidement. Après plusieurs heures de recherche dans une zone peu habitée et difficile d’accès, le bénévole a retrouvé la carcasse avant qu’elle ne reparte avec la marée. Les informations récoltées (taille, sexe, photos) durant l’intervention du bénévole ont été transmises à plusieurs spécialistes des baleines à bec. Kerri J. Smith du NMNH et Laura J. Feyrer de l’Université de Dalhousie ont apporté leur aide et ont confirmé que le spécimen retrouvé correspondait à une baleine à bec de Sowerby.
Une espèce bien mystérieuse
Il existe peu d’information sur la baleine à bec de Sowerby, et les observations de spécimens vivants sont rares. Ce que l’on sait sur cette baleine est essentiellement dû à l’échouage et aux carcasses retrouvées. Des baleines à bec de Sowerby avaient déjà été retrouvées mortes au Québec dans le passé : au parc Forillon en 2006, sur l’ile aux Pommes en 2013 et à Escuminac en 2016. Dans les eaux canadiennes, on pense que cette espèce vit principalement en eaux profondes (500 m et plus), le long de la pente continentale de la Nouvelle-Écosse, à proximité du chenal nord-est et des canyons de Gully, Shortland, et Haldimand, ce qui rend ces découvertes particulièrement intéressantes pour l’étude de leur aire de répartition.
Des échantillons de la carcasse de Rivière-au-Tonnerre ont été récupérés afin de procéder aux analyses génétiques. La peau, du gras et du muscle ont été récoltés et un deuxième échantillonnage aura lieu pour récupérer la mâchoire de l’animal. Les échantillons récoltés sur la carcasse seront partagés avec le NMNH et l’Université de Dalhousie. Comme c’est une femelle, la seule paire de dents n’est pas visible, mais selon Laura J. Feyrer, les dents chez les femelles baleines à bec sont plus petites et ne percent pas, Si la paire de dents se situe à l’avant de la mâchoire, il s’agit d’une baleine à bec de True et si elle est au milieu de la mâchoire, ce serait une baleine à bec de Sowerby.
Pour en savoir plus :
Baleine à bec de Sowerby (Pêches et Océans Canada, mis à jour en septembre 2018)
Des baleines à bec, espèce rarissime, s’échouent aux Îles-de-la-Madeleine (Baleines en direct, 2017)
Le dernier voyage d’une baleine à bec de Sowerby (Baleines en direct, 2016)