Par Christine Gilliet
L’objectif de l’expédition est de chercher à comprendre comment le plancton va réagir aux changements climatiques. À bord du voilier Tara, les scientifiques se relaient depuis deux ans pour prélever des échantillons dans la colonne d’eau. Tara Océans, c’est aussi un vaste programme éducatif destiné à faire rêver.
L’expédition à bord du voilier Tara est partie de Lorient en France en septembre 2009 et a déjà parcouru la Méditerranée, la mer Rouge, l’océan Indien, l’Atlantique Sud et, cet été, le Pacifique Sud, soit plus de 115 000 km. Elle prévoit boucler sa mission au printemps 2012.
Son objectif est de décrire les grandes formations planctoniques marines et les coraux. Des virus et bactéries aux minuscules vertébrés, en passant par les larves de poissons, tous les petits organismes prélevés jusqu’à 2 000 mètres de profondeur sont destinés à être analysés avec des techniques de pointe dans des laboratoires de génétique et de biologie moléculaire. Les données océanographiques de leur proche environnement y seront associées, telles que la salinité, la température, le taux d’oxygène. La mission étudie aussi le piégeage des molécules de gaz carbonique (CO2) par les micro-organismes marins.
Éric Karsenti, biologiste moléculaire et cellulaire, senior scientist au Laboratoire européen de biologie moléculaire (EMBL), est responsable de la partie scientifique du projet. Il explique dans le Journal n°7 de l’expédition que « les organismes planctoniques sont à la base de la chaîne alimentaire, et si ces groupes bougent, il est probable que les niveaux trophiques supérieurs bougent aussi », et « si une augmentation plus substantielle des températures se confirme d’ici 2100 (entre 1,4 et 5,8 °C), des modifications inattendues et de grandes magnitudes ne sont pas à exclure. »
Faire rêver le public pour mieux le sensibiliser
« Combiner une aventure maritime sur un voilier avec une recherche scientifique de pointe, dans l’esprit des grandes expéditions naturalistes depuis le 18e siècle, permet de faire rêver le public et donc de l’amener à des questions fondamentales sur la vie des océans et la biodiversité en général », explique Eric Karsenti. Pour le grand public, Tara Océans a réalisé une série de quatre documentaires, mis sur pied un programme éducatif interactif pour les écoles, lycées et collèges. À bord de Tara, 19 journalistes et cinq artistes ont travaillé à la diffusion de la vie à bord et de l’avancée de la mission. Sur le site www.planktonchronicles.org, une série de courtes vidéos d’une grande valeur esthétique et pédagogique ont été développées en partenariat avec le Centre national de la recherche scientifique (CNRS).
Le financement de l’expédition repose sur un partenariat privé-public de grande ampleur, dont le principal partenaire est agnès b., la marque de haute couture, avec son directeur général Etienne Bourgeois.
Un voilier mythique, engagé dans l’exploration et la défense de l’environnement
Tara, une goélette en aluminium de 36 mètres, est moins onéreux qu’un bateau océanographique, étant plus petit et naviguant aussi à la voile. Avec son faible tirant d’eau, il peut à la fois analyser le plancton et s’approcher de très près des coraux. De 2006 à 2008, il a servi à l’expédition polaire Tara Arctic, qui s’est laissé prendre par les glaces et partir à la dérive pour étudier la fonte de la banquise et le réchauffement climatique. Construit en 1989 à l’initiative du médecin explorateur Jean-Louis Etienne, il a parcouru, sous le nom Antarctica toutes les mers du globe jusqu’en 1996.[Tara expéditions, CNRS]
Pour en savoir plus:
Sur le site de Tara Océans