La National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA) déclare un « évènement de mortalité inhabituelle » de petits rorquals le long de la côte est des États-Unis. Vingt-huit décès ont été confirmés au cours de la dernière année, soit plus du double de la moyenne annuelle. C’est la première fois que l’agence étatsunienne enquête simultanément sur la mortalité inhabituelle de trois grandes espèces de baleines (baleine noire, rorqual à bosse et petit rorqual) dans la même zone géographique. Observe-t-on une situation similaire dans le Saint-Laurent? L’équipe de Baleine en direct enquête à son tour.

Aux États-Unis

Entre janvier 2017 et janvier 2018, vingt-neuf petits rorquals ont été retrouvés échoués le long de la côte atlantique entre le Maine et la Caroline du Sud. Un seul de ces animaux a survécu. Celui-ci a été remis à l’eau et les chercheurs ont pu suivre ses déplacements grâce à un émetteur satellite posé sur l’animal. Quant aux animaux morts, dix-huit ont fait l’objet d’une nécropsie et six ont été photographiés et mesurés. Au moins onze de ces petits rorquals présentaient des signes d’interaction humaine : neuf avaient des marques d’empêtrement dans du matériel de pêche et deux présentaient des signes de traumatisme contondant, ce qui signifie pour des animaux de cette taille une collision avec un navire. Huit semblent avoir souffert de maladie infectieuse.

Les petits rorquals ne sont pas considérés comme une espèce menacée ou en voie de disparition aux États-Unis, mais ils sont protégés en vertu de la Loi étatsunienne sur la protection des mammifères marins (Marine Mammal Protection Act). On estime qu’entre 1400 et 2500 petits rorquals sont présents le long de la côte est étatsunienne, selon un relevé effectué en 2011. Malgré le nombre inhabituel de petits rorquals retrouvés morts au cours de la dernière année, « le nombre de cas observés jusqu’à présent n’est pas considéré comme une menace à la survie de la population », déclare Teri Rowles, coordonnateur du programme sur la santé et l’échouage des mammifères marins à la NOAA, lors d’une conférence de presse.

Il y a maintenant trois enquêtes en cours sur les mortalités inhabituelles de baleines dans l’Atlantique Nord-Ouest. Ces enquêtes tenteront de déterminer les causes de mortalité (communes ou non) afin de mettre en place des mesures de protection appropriées. La NOAA suggère que des changements environnementaux pourraient être en cause, entrainant les baleines dans des zones de l’océan où elles n’allaient pas auparavant et augmentant ainsi les risques d’empêtrement dans les engins de pêche et les risques de collisions avec les navires.

Dans le Saint-Laurent

Une mortalité inhabituelle de petits rorquals n’a pas été observée dans le Saint-Laurent au cours de la dernière année, selon les données du Réseau québécois d’urgences pour les mammifères marins (RQUMM). Quinze carcasses de petits rorquals (échouées et en mer) ont été répertoriées. Au cours des cinq années précédentes (2012 à 2016), entre huit et dix-neuf carcasses par année ont été rapportées, avec une moyenne de douze par année. « On ignore toutefois quelle proportion des mortalités réelles les cas rapportés représentent », précise Robert Michaud, directeur scientifique du Groupe de recherche et d’éducation sur les mammifères marins (GREMM) et coordonnateur du RQUMM.

Au Canada, des nécropsies ne sont pas systématiquement pratiquées sur les mammifères marins dont la population n’est pas considérée en péril. Les causes de mortalité ne sont donc pas toujours connues. « Les pressions exercées par le gouvernement étatsunien — pour que les pays souhaitant y exporter leurs produits de la pêche démontrent que leurs activités n’ont pas d’impact sur les mammifères marins — nous forcent aujourd’hui à revoir nos façons de faire », ajoute Robert Michaud. Les chercheurs estiment qu’environ 30 % des carcasses de petits rorquals rapportées entre 2012 et 2017 présentaient des traces de prises accidentelles dans du matériel de pêche.

Actualité - 15/2/2018

Béatrice Riché

Après plusieurs années à l’étranger, à travailler sur la conservation des ressources naturelles, les espèces en péril et les changements climatiques, Béatrice Riché est de retour sur les rives du Saint-Laurent, qu’elle arpente tous les jours. Rédactrice pour le GREMM de 2016 à 2018, elle écrit des histoires de baleines, inspirée par tout ce qui se passe ici et ailleurs.

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