Les analyses génétiques confirment les observations surprenantes des chercheurs et des chasseurs : un petit rorqual de l’hémisphère sud a migré jusqu’en Arctique et un hybride a résulté d’un croisement entre un petit rorqual de l’Antarctique et un de l’Atlantique Nord. C’est le premier cas documenté d’une migration entre les deux hémisphères et d’une hybridation entre les deux espèces. Le rapport a été publié le 22 décembre 2010 dans le journal PLoS One dont l’auteur principal est le chercheur norvégien Kevin Glover.

Portrait de deux espèces migratrices

Les petits rorquals sont classés selon deux espèces, le petit rorqual de l’Antarctique (Balaenoptera bonaerensis) dont l’aire de répartition est limitée à l’hémisphère sud, et le petit rorqual (Balaenoptera acutorostrata), une espèce cosmopolite subdivisée en trois sous-espèces.

Le petit rorqual de l’Atlantique Nord (Balaanoptera acurostrata acurostrata), une des trois sous-espèces, s’alimente en été jusqu’à la limite des glaces de l’Arctique. Si son aire hivernale n’est pas précisément connue, il est probable qu’il migre à l’automne vers les eaux plus chaudes des tropiques pour se reproduire en hiver.

Selon le même schéma saisonnier, le petit rorqual de l’Antarctique quitte son aire d’alimentation des basses latitudes de l’hémisphère sud pour entamer sa migration vers les eaux tropicales ou tempérées où il se reproduit, lui aussi.

Leur rencontre n’est pas au programme, pourtant…

Les mouvements migratoires de ces deux espèces sont donc synchronisés selon les saisons de chaque hémisphère, saisons qui sont inversées, l’hiver austral correspondant à l’été boréal. De ce fait, elles ne se rencontrent pas dans leur zone commune de reproduction proche des tropiques, puisqu’elles ne s’y trouvent pas en même temps. Ainsi, les espèces ne peuvent pas, à priori, se mélanger.

Mais en 1996, un petit rorqual de l’Antarctique a été observé dans les eaux boréales de l’Atlantique Nord-Est, et ainsi pour la première fois au nord des tropiques. Puis, en 2007, c’est la mention d’un hybride de ces deux espèces qui intervient dans la même région. Les analyses de leur ADN ont permis de confirmer ces observations visuelles, surtout pour le rorqual de l’Antarctique qui ne présentait pas la bande blanche sur les nageoires pectorales, caractéristique des petits rorquals de l’Atlantique. Quant à la mère de l’hybride, elle est bien venue de l’Antarctique.

Les analyses des prélèvements sur ces deux cétacés ont pu être comparées à celles figurant dans le registre des cétacés capturés pour la chasse commerciale, un registre tenu par la Norvège depuis 1996. Ce pays chasse le petit rorqual depuis les années 1920, avec une période d’interruption due au respect du moratoire international.

Pourquoi changer son patron de migration?

Ces résultats révèlent pour la première fois que les petits rorquals de l’Antarctique ont effectué une migration exceptionnelle entre les deux hémisphères et que les deux espèces peuvent se reproduire entre elles. Cependant, avec les données génétiques datant seulement de 1996, les auteurs de l’étude estiment pour l’instant qu’il s’agirait de cas isolés plutôt qu’un comportement avéré de ces espèces.

Dans une actualité du National Geographic, Kevin Glover cite l’hypothèse d’un collègue pour expliquer une telle migration de la part de petits rorquals de l’Antarctique. Les études japonaises montrent que leurs populations ont diminué de manière importante pendant la décade située entre1980 et 1990, en même temps que le stock de krill, la nourriture favorite de ces cétacés. Les petits rorquals ont peut-être cherché leur nourriture en dehors de leur territoire habituel, et certains d’entre eux auraient trouvé leur chemin vers l’Arctique.[PLoS One, National Geographic]

Pour en savoir plus:

Sur le site de PLoS One (en anglais seulement)

Actualité - 3/2/2011

Christine Gilliet

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