Par voie de justice, les Inuits viennent de remporter une victoire importante: le projet germano-canadien de relevés sismiques dans le détroit de Lancaster en Arctique est bloqué. Leurs argumentations stipulaient que les canons à air comprimé utilisés pour ces relevés pouvaient causer des dommages irréversibles à la vie des mammifères marins et des cinq communautés de la baie de Baffin.

Le 8 août, dans le tribunal du Nunavut, un territoire du Grand Nord canadien, la décision de la juge Susan Cooper, une injonction temporaire, intervient la veille de la date prévue pour les premiers relevés effectués par le navire allemand Polarstern.
À Ottawa, le gouvernement canadien n’a pas indiqué s’il voulait faire appel.

Des ondes sonores dangereuses

En opération, ces canons à air comprimé émettent des ondes sonores puissantes, de basses fréquences et répétitives, nuisibles pour les bélugas, narvals, baleines boréales, ours polaires, phoques et morses. Cette pollution sonore peut causer des lésions auditives permanentes, affecter leurs capacités de détection des proies, de reproduction, de communication, de navigation et modifier leur patron de migration. Les répercussions sur la chasse de subsistance pratiquée par ces communautés et le maintien de leurs pratiques culturelles traditionnelles ont été prises en compte dans la décision de la juge Cooper. D’autre part, cette région fait l’objet d’un projet de création d’une zone marine protégée, l’Arctic Serengeti, en raison de la richesse de sa biodiversité et de la fragilité de certaines espèces.

Après l’injonction temporaire

Le programme à long terme de géocartographie ECASE (Eastern Canadian Arctic Seismic Experiment) a pour objectif de mieux connaître la géologie de cette région sous-marine. Il est conduit par le ministère des Ressources naturelles et l’Institut Alfred Wegener en Allemagne. Si le projet ECASE est du domaine de la recherche scientifique, les informations recueillies pourraient être utiles aux compagnies d’exploration et d’exploitation en hydrocarbures.

Avec le couvert de glace de l’automne, le navire de recherche Polarstern sera donc bientôt contraint de quitter les eaux de l’Arctique. Selon l’avocat des Inuits, même si le gouvernement fait appel et obtient gain de cause, ce qui n’est pas acquis, la procédure sera trop longue pour que l’expérience puisse se dérouler cette année. Le navire pourra cependant continuer ses recherches de routine, telles que des prises de données bathymétriques et magnétiques. Mais dans les eaux du Groenland, toutes les autorisations vont lui permettre de procéder à ces relevés sismiques, le Groenland se positionnant en dehors de la controverse.

Dans le passé, des explosifs avaient été utilisés pour effectuer des relevés sismiques et quelques baleines avaient été tuées, tandis que beaucoup d’autres avaient déserté la région. Aujourd’hui, pour le projet ECASE, les Inuits disent ne pas avoir été consultés au préalable et que leur opposition au projet a été ignorée. Cependant, ils ne ferment pas entièrement la porte à ce projet et se disent ouverts à la discussion. Selon eux, le développement économique est bon, mais pas au prix leur mode de vie qui dépend des ressources marines.[AFP, Globe and Mail, Nunatsiaq]

En savior plus

Sur le site de l’AFP : Les Inuits bloquent en justice une expérience sismique

Sur le site du Globe and Mail (en anglais seulement) : Nunavut judge blocks seismic testing in Lancaster

Actualité - 12/8/2010

Christine Gilliet

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