Par Christine Gilliet
Qualifié par le gouvernement fédéral comme trésor écologique d’importance mondiale, cette AMNC doit être délimitée géographiquement en consultation avec le Nunavut et les Inuits. Si l’exploitation des hydrocarbures y sera interdite, le trafic maritime traversera la zone. Ce sera la quatrième AMNC du réseau Parcs Canada et la première en Arctique.
Le 6 décembre, le gouvernement fédéral a annoncé son intention de créer une aire marine nationale de conservation (AMNC) dans une partie du détroit de Lancaster qui devrait couvrir une superficie de 44 500 kilomètres carrés. Dans l’Arctique, le détroit de Lancaster se situe entre les îles de Baffin et l’île Devon, au Nunavut, un territoire du Grand Nord canadien. La prochaine étape consiste à définir les limites géographiques exactes en consultation avec le gouvernement du Nunavut et la population inuite, notamment par l’entremise de la Qikiqtani Inuit Association.
Une région arctique très productive pour les écosystèmes
Dans son communiqué de presse, le gouvernement canadien considère que « le détroit de Lancaster est une aire écologique extrêmement importante, en raison de ses caractéristiques biologiques et océanographiques ». Cette région est fréquentée par plusieurs espèces de mammifères marins, tels que le béluga, la baleine boréale, le narval, le morse, l’ours polaire et des phoques. Il abrite certaines des plus grandes colonies de nidification d’oiseaux de mer en Arctique, regroupant des centaines de milliers d’oiseaux.
Du point de vue des écosystèmes marins, c’est une région des plus productives du cercle polaire pour la chaîne alimentaire, du phytoplancton aux mammifères marins. Pour les Inuits, c’est un territoire de chasse et de pêche garant de leur mode de vie traditionnel.
Un potentiel d’hydrocarbures, mais pas de forages
Lors d’un point de presse à Ottawa, le ministre Baird de l’Environnement a rappelé que la prospection et l’exploitation du sous-sol et des hydrocarbures étaient interdites dans les sanctuaires marins. Le 8 août dernier, les Inuits avaient, par voie de justice, bloqué le projet germano-canadien de relevés sismiques dans le détroit de Lancaster. La décision de la juge Susan Cooper du tribunal du Nunavut, une injonction temporaire, était intervenue la veille de la date prévue pour les premiers relevés effectués par le navire allemand Polarstern. Les Inuits stipulaient que les canons à air comprimé utilisés pour ces relevés pouvaient causer des dommages irréversibles à la vie des mammifères marins et des cinq communautés de la baie de Baffin.
Le trafic maritime traversera la zone
Le ministre Baird a toutefois indiqué que les limites désignées n’empêcheraient pas les navires commerciaux de traverser la zone de conservation. Dans cette région, le trafic maritime représente un enjeu important puisque le détroit de Lancaster est situé à l’entrée du Passage du Nord-Ouest. En raison de la fonte de la banquise, il est envisagé que les navires empruntent à l’avenir ce passage, en tant que voie maritime dans l’Arctique, afin de raccourcir considérablement leur route entre l’Asie et l’Europe.
Cette AMNC fera partie du réseau de Parcs Canada. La création de ces aires a pour but de « sauvegarder et de commémorer le patrimoine naturel et culturel des Canadiens ». Jusqu’à maintenant, trois AMNC ont été créées: le parc marin du Saguenay–Saint-Laurent au Québec, l’AMNC du Lac-Supérieur et le parc marin national Fathom Five dans la baie Georgienne en Ontario.