Par Christine Gilliet

Dans le Pacifique Nord, des sous-populations de rorquals à bosse ont recouvré leur nombre d’avant la chasse et sont en bonne santé. Sortir de la liste une sous-population permettrait à l’État de l’Alaska de relancer son industrie pétrolière.

Le rorqual à bosse (Megaptera novaeangliae) du Pacifique Nord figure sur la liste des espèces en voie de disparition depuis 1973, année d’instauration de l’Endangered Species Act. En 1966, au moment de l’arrêt de la chasse commerciale, la population avait atteint le seuil critique de 1 000 individus. Elle est aujourd’hui estimée à 21 800 individus, un nombre supérieur à celui de 15 000 d’il y a un siècle, avant que la pêche commerciale atteigne un pic pour le nombre de captures. C’est donc une population nombreuse, qui a bénéficié de la protection de son habitat pendant plusieurs décennies et qui n’est plus en danger.

Segmenter la population

C’est en s’appuyant sur ces arguments que l’État de l’Alaska a adressé le 25 février dernier une pétition à la National Oceanic and Atmospheric Administration, l’agence du gouvernement fédéral des États-Unis qui gère et protège les stocks des populations de baleines. Il demande que ce statut de protection soit retiré à la sous-population de la partie centrale du Pacifique Nord, estimée à 10 000 individus. Cette sous-population passe l’été à s’alimenter dans le golfe d’Alaska et Cook Inlet, et migre pour se reproduire en hiver dans les eaux chaudes d’Hawaï.

En retirant le rorqual à bosse de la liste, l’État de l’Alaska lèverait un obstacle lui permettant d’autoriser les compagnies pétrolières à explorer et possiblement à forer dans ses eaux de l’Arctique. L’exploitation pétrolière représente un pourcentage très important de son budget. Or, sa production de barils de pétrole a fortement chuté, passant de 759 millions en 1988 à 205 millions en 2013, les compagnies important du pétrole du nord du Dakota.

Le gouvernement fédéral a 90 jours pour évaluer si cette pétition requiert une étude approfondie des rorquals à bosse du centre du Pacifique Nord. Si c’est le cas, il devra ensuite décider dans les 12 mois suivants si cette population peut être traitée séparément des autres populations et si elle est suffisamment en bonne santé pour être retirée de la liste.

À Hawaï, les associations de pêcheurs commerciaux ont adressé en avril 2013 une pétition similaire au gouvernement fédéral pour classer les rorquals à bosse du Pacifique Nord comme un segment distinct et leur ôter le statut de protection. Les populations vivant plus à l’ouest, près du Japon de la Corée, ont augmenté bien plus lentement.

Prudence, autres dangers

Des associations de protection de l’environnement, notamment le Center for Biological Diversity, saluent le succès obtenu avec les mesures de protection mises en place pendant plusieurs décennies, mais appellent à prudence. Elles mettent en avant le cumul de nouvelles menaces qui pèsent désormais, après celle de la chasse, sur l’ensemble des rorquals à bosse du Pacifique Nord. L’acidification des eaux de l’océan, les changements climatiques et la pollution peuvent avoir un impact encore mal connu sur les stocks de leurs proies. Les rorquals sont victimes d’empêtrement dans des engins de pêche et l’augmentation de la pollution sonore de l’océan liée à celle du trafic maritime à un impact nuisible sur leurs capacités à communiquer entre eux.

Au Canada, le rorqual à bosse du Pacifique Nord est désigné comme espèce menacée et protégé en vertu de la Loi sur les espèces en péril (LEP) et du Règlement sur les mammifères marins. Deux fois par an, ces rorquals à bosse traversent les eaux canadiennes pendant leur migration entre l’Alaska et Hawaï.

Actualité - 20/3/2014

Christine Gilliet

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