L’onirisme des bords de mer

À Tadoussac, les petits rorquals sont présents chaque jour, tout comme les bélugas, les phoques communs et les phoques gris. Des marsouins communs se sont aussi fait remarquer malgré leur petite nageoire dorsale, pas toujours facilement repérable parmi les vagues. Au clair de lune, une nord-côtière écoutait les souffles apaisants de bélugas et autres animaux marins depuis la Pointe de l’Islet. Elle s’est même fait surprendre par ce qui semblait être un gros phoque éclabousser les eaux à quelques mètres!

Les géants reviennent timidement dans le coin de Tadoussac et des Escoumins. Aux quelques rorquals à bosse qui sillonnent le parc marin du Saguenay–Saint-Laurent s’ajoutent un rorqual commun, deux rorquals bleus et une poignée de marsouins communs!

Jumelles, appareil photo ou télescope en main, les observateurs et observatrices sur les rives s’arment de patience pour espérer voir un souffle, un aileron, un museau, fendre les eaux. Chaque personne a sa manière de s’occuper! Certaines restent les yeux rivés sur l’eau alors que d’autres profitent des doux vents d’automne pour lire ou même tailler du bois entre deux coups d’œil au large. Ce paisible passe-temps semble vieux comme le monde et pourtant si les baleines nous émerveillent, voir nous obsèdent, aujourd’hui et depuis des millénaires, ce n’a pas toujours été de la même manière. Selon les cultures et les époques, les baleines ont incarné des monstres, des déités, et de nos jours des animaux rares qu’on veut protéger. Quelle chance inouïe donc de pouvoir les voir depuis les rives du Saint-Laurent!

À Pointe-des-Monts, les dauphins à flancs blancs sont arrivés. Un résident en a compté une vingtaine à la fois, mais difficile de savoir si c’était les mêmes individus qui défilaient sous la fenêtre de son chalet. Selon lui, le groupe aurait très bien pu dépasser la centaine! Le nord-côtier a aussi dénombré de 15 à 30 phoques gris et 5 à 6 petits rorquals sur une mer calme.

À Franquelin, une passionnée des mammifères marins nous partage son observation :

« Les marsouins communs étaient bien nombreux cette semaine dans le secteur de Franquelin. Au moins trois petits rorquals s’y trouvaient aussi. En plus des habituels phoques gris plutôt solitaires et dispersés, il y a eu le passage d’un petit troupeau d’une vingtaine d’individus. Les femelles formaient la marge en surveillant les alentours, alors que les plus jeunes progressaient rapidement… c’était fascinant à voir! »

La riveraine a aussi eu l’occasion de voir un rorqual à bosse, un espèce peu observée ces derniers temps dans ce secteur. Se déplaçant rapidement vers l’ouest entre Franquelin et Baie-Comeau, « il effectuait des respirations à intervalles irréguliers et parcourait parfois d’assez grandes distances entre elles. J’ai pu observer ce scénario sur trois séquences avant de perdre complètement sa trace! » raconte-t-elle.

À Gallix, deux petits rorquals ont été aperçus proches du rivage et des scientifiques ont vu deux groupes de dauphins à flancs blancs, cinq rorquals bleus, deux rorquals communs et deux rorquals à bosse au large de Sept-Îles!

Aux iles Mingans, les phoques gris et communs, les marsouins communs et les petits rorquals sont toujours au rendez-vous. Une naturaliste a même pu entendre les « loups-marins hurler ». Le terme loup-marin est une très vieille appellation et désigne différentes espèces de pinnipèdes de l’estuaire et du golfe du Saint-Laurent selon les régions. Le cri des phoques, gris ou commun, s’apparente à celui du loup.

Dans les eaux de Matane se sont trois rorquals communs, deux rorquals bleus, deux rorquals à bosses et une vingtaine de bélugas qu’un cétologue amateur a pu documenter. Parmi ces individus, les rorquals à bosse Splinter, observé en juillet dernier à Gaspé, et Chalk, rencontré à la mi-aout cette année, dans ce même secteur. Pour les deux rorquals bleus, « c’était Jaw-Breaker, une femelle bien connue dans l’estuaire, et B488 que je connais depuis 2013, mais que je n’avais pas revu depuis 2018 », rapporte le navigateur.

Les oiseaux sont aussi bien présents ces temps-ci. Petits pingouins, macareux moines, macreuses à front blanc, goélands, grands hérons, sternes, balbuzards, guillemots, eiders à duvet, plongeons huards, limicoles de toutes sortes et autres oiseaux marins tapissent les airs et les flots du Saint-Laurent. Le long de l’Île Fantôme dans l’archipel Mingan, les naturalistes ont rencontré un groupe d’une quarantaine de petits pingouins jeunes et adultes. « On entend les cris rauques, mais aussi de petits cris des jeunes et des sifflements de guillemots », raconte l’une des naturalistes.

Aux dunes de Tadoussac, les migrations battent leur plein! Farandole de passereaux, de rapaces, de petites nyctales et un record historique de goélands bruns ne représentent qu’une partie de ce que l’Observatoire des Oiseaux de Tadoussac a observé cette saison.

C’est un paysage au milles couleurs qui se dessine avec les jours d’automne qui s’égrènent. Le rythme du ressac envoutant des eaux du Saint-Laurent bercent les observateurs, observatrices, touristes, riverains et riveraines. Les mammifères marins continuent de parsemer le Saint–Laurent, dans les reflets flavescents des flots toujours en mouvement. Le Saint-Laurent, l’estuaire comme le golfe, c’est le début de l’océan. On peut décrire cette eau qui change constamment de couleur de bien des manières : des eaux métalliques faites de plomb fondu ou de bronze coulé, parfois des aquarelles, avec des reflets orangés. Le Saint-Laurent passe de tons pastels, irisés et nacrés à des eaux indigos, vibrantes, et parfois ténébreuses et grisâtres en quelques heures. Dans cette aquarelle immobile, les mammifères marins nous apparaissent aussi différemment. À chacun sa manière d’apprécier et d’aimer ce fleuve ondoyant.

Merci aux collaborateurs et collaboratrices!

Merci aux observateurs et observatrices qui partagent avec nous leur amour pour les mammifères marins! Vos rencontres avec les cétacés et les pinnipèdes sont toujours un plaisir à lire et à découvrir.

Ce sont vos yeux, sur l’eau ou depuis la berge, qui permettent à cette rubrique de voir le jour.

Anik Boileau
Odélie Brouillette
Lyse Brunet
Marie-Andrée Charlebois
Guylaine Côté
Michel Comeau
Catherine de Cotret
Laetitia Desbordes
Audrey Leblanc
Kevin Maltese-Crottier
Laure Mardnt
Yael Medav
Diane Ostiguy
Renaud Pintiaux
Chloé Pazart
Pascal Pitre
Jean Roy
René Roy
Andréanne Sylvain
Marielle Vanasse

Et à tous les autres!

Merci aussi aux équipes qui partagent leurs observations :

Centre d’éducation et de recherche de Sept-Îles (CERSI)
Groupe de recherche et d’éducation sur les mammifères marins (GREMM)
Réseau d’observation des mammifères marins (ROMM)
Réseau québécois d’urgence pour les mammifères marins (RQUMM)
Station de recherche des Îles Mingan (MICS)

Vous souhaitez vous aussi partager vos observations?

Vous avez observé des mammifères marins dans le fleuve Saint-Laurent? Qu’il s’agisse d’un souffle au large ou de quelques phoques, écrivez-nous et envoyez-nous vos photos à [email protected]!