«Difficile de trouver une belle fenêtre météo cette semaine!», peste René Roy, collaborateur de la Station de recherche des îles Mingan (MICS). Entre les vagues, la pluie et le mur de brume qui semble prendre ses quartiers dans l’estuaire du Saint-Laurent, les observateurs ont été mis au défi. Mais leur patience a parfois été magnifiquement récompensée.

Mardi, René profite d’un temps relativement clément pour faire une sortie en mer entre Matane et Pointe-des-Monts et repère… son premier rorqual bleu de la saison! «Impossible de l’identifier, on était très au large, au cœur d’une brume épaisse, et au milieu du trafic maritime, je n’ai pas pu m’attarder», confie-t-il. Mais quelle excitation d’assister au retour de ces incroyables géants dans l’estuaire. Quelques heures plus tard, proche de Matane, un autre spectacle magique s’offre à lui: la migration d’une centaine de bélugas en direction de l’amont du fleuve. Pendant une demi-heure, le fleuve est rempli de dos blancs à perte de vue. Il est rare d’assister à un rassemblement aussi important.

Le même jour, au large de Les Bergeronnes, le photographe Renaud Pintiaux suit, à l’aide d’une petite embarcation, un rorqual à bosse dans la brume, dans l’espoir de le photographier. Soudain, au large, le voile blanc se lève, le soleil vient illuminer la scène, et d’immenses pectorales blanches s’élancent vers le ciel bleu. Le rorqual à bosse effectue un ballet aérien pendant plusieurs minutes, roulant dans l’eau et claquant des nageoires sur la surface. L’individu en question est bien connu des chercheurs: il se nomme Chewbacca, et c’est la première fois qu’il est identifié cette année dans le parc marin.

Bélugas dans la brume ou dans la baie

À Cacouna et Rivière-du-Loup, les bélugas sont aussi présents en bon nombre tous les jours, s’approchant des rives, venant s’alimenter contre les quais. Tous les jours… ou presque! «Cette semaine, il y a eu trois jours où la brume était collée à nous, offrant à peine une visibilité de quelques centaines de mètres. On entendait les souffles, mais on ne voyait rien!», souligne une observatrice du Réseau d’observation des mammifères marins (ROMM). «Et dimanche, il y avait tellement de vagues, qu’il était impossible de distinguer des dos blancs au milieu de l’écume!»

Mais si tu ne vas pas voir les bélugas, les bélugas viendront à toi! Dimanche 27 juin, environ trois heures après le début de la marée montante, un groupe de 70 à 80 bélugas entrent dans la baie de Tadoussac et y batifolent une dizaine de minutes, nageant dans toutes les directions. Certains s’approchent à une vingtaine de mètres des quais et à 100 mètres de la plage, au grand étonnement des riverains, qui affirment ne jamais les voir vus aussi aventureux. Les plus observateurs notent que les cormorans remontent de leur plongée avec de petits capelans dans le bec. Ceci explique probablement cela!

Du côté des iles de Mingan, de nombreux petits rorquals sont signalés, ainsi qu’un jeune rorqual à bosse non identifié. Un observateur posté à Pointe-des-Monts établit le bilan de sa semaine: deux rorquals à bosse le samedi, de nombreux petits rorquals et quelques phoques gris. Le 25 juin, à Baie-des-Sables, un petit rorqual vient se nourrir à environ 300 mètres du bout du quai. «Il a passé un bon 15 minutes devant moi à se trémousser de gauche à droite. C’est toujours plaisant de les voir glisser sur l’eau et disparaitre pour quelques secondes puis réapparaitre», raconte un observateur.

Gaspésie, corne d'abondance

Chaque matin à l’aube, Jean Roy, croisiériste gaspésien, va observer les baleines depuis le cap Bon Ami. Cette semaine encore, il est impressionné par la présence de nombreux grands rorquals. «Il y a beaucoup, beaucoup de lançons le long de la côte. Et dans cette ligne de poissons, j’ai dénombré un matin jusqu’à 25 baleines, rorquals à bosse et rorquals communs mélangés!» Vendredi, une observatrice postée au même endroit repère des milliers d’oiseaux en plein festin. Patiente, elle attend que les baleines se joignent au repas et est récompensée par deux breach magistraux.

Parmi cette foule de dorsales et de caudales qui se pressent autour de la pointe de Gaspé, il se chuchote qu’on aurait reconnu la baleine à bosse nommée BBR, aussi appelée Gaspar, accompagnée d’un veau! Il s’agirait du deuxième petit de cette fidèle de l’estuaire, connue des chercheurs depuis sa naissance, en 2005.

La région de Percé n’est pas en reste. Le 23 juin, trois rorquals à bosse se trouvent à 200 mètres du rocher Percé. «Ils ont tourné autour de nous pendant plus d’une heure», confirme le capitaine d’un bateau d’excursion. «Il y avait aussi deux communs à la hauteur de la bouée, à l’entrée de Percé, ainsi que cinq petits rorquals et de nombreux phoques.»

Les dents du fleuve

Le 26 juin, un adepte de motomarine fait une rencontre impressionnante. Alors qu’il se pratique au large de Grande-Vallée, il aperçoit un aileron triangulaire sortir de l’eau . Sous son engin, il voit distinctement passer un requin pèlerin, bouche grande ouverte. Long d’une dizaine de mètres de long, le requin pèlerin est le deuxième plus gros requin au monde. C’est aussi un filtreur, qui se nourrit de plancton un peu de la même manière qu’une baleine. Le requin pèlerin est l’une des sept espèces de requins présentes dans le Saint-Laurent. Apprenez-en plus sur le site de l’Observatoire des requins du Saint-Laurent.

Où sont les baleines cette semaine? Voilà ce que nos collaborateurs et collaboratrices ont vu!

Ces observations donnent une idée de la présence des baleines et ne représentent pas du tout la répartition réelle des baleines dans le Saint-Laurent. À utiliser pour le plaisir!

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Observations de la semaine - 1/7/2021

Laure Marandet

Laure Marandet est rédactrice pour le GREMM depuis l'hiver 2020. Persuadée que la conservation des espèces passe par une meilleure connaissance du grand public, elle pratique avec passion la vulgarisation scientifique depuis plus de 15 ans. Ses armes: une double formation de biologiste et de journaliste, une insatiable curiosité, un amour d'enfant pour le monde animal, et la patience nécessaire pour ciseler des textes à la fois clairs et précis.

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