Il faudra attendre un stage vétérinaire au Québec en 2003 pour que Marion Desmarchelier, originaire de France, voit sa première baleine. Rêvant de cétacés depuis toujours, elle ne peut s’imaginer quitter la province à la fin de son stage sans en avoir aperçu au moins un. «On était en juin, les croisières n’avaient même pas commencé. Un bateau de recherche est passé, j’ai convaincu les chercheurs de m’embarquer avec eux. Et j’ai vu un rorqual bleu sortir la queue. À ma première sortie!» Elle ressort de cette expérience avec la certitude qu’elle travaillera un jour pour les baleines.

Après une formation de cinq ans avec le Dr Stéphane Lair, sa première expérience de travail auprès des mammifères marins sauvages a lieu à l’Île-du-Prince-Édouard, où elle enseigne à l’Atlantic Veterinary College entre 2010 et 2014. À cause des fonds marins peu profonds, les échouages vivants sont beaucoup plus fréquents dans les maritimes que dans l’estuaire. Marion Desmarchelier est donc confrontée à plusieurs cas de baleines échouées, et s’occupe de monitorer l’état clinique de ces individus, afin d’aider les intervenants à prendre les meilleures décisions pour les baleines.

De retour au Québec, elle complète sa formation de clinicienne avec une seconde résidence, cette fois en médecine du comportement animal. Elle commence également à collaborer avec le Réseau québécois d’urgence pour les mammifères marins, en tant que consultante. Par exemple, en 2020, elle a contribué au suivi du rorqual à bosse de Montréal, en mettant au point un protocole d’observation, que les bénévoles pouvaient remplir sur une application mobile. Documentés, les comportements des baleines – comme la fréquence respiratoire – aident à surveiller le niveau de bienêtre d’une baleine. «Obtenir plus d’informations objectives sur les baleines vivantes qui ne vont pas bien, ça aide à prendre des décisions. Généralement, on se fie surtout à l’état corporel de la baleine, à savoir si elle est émaciée ou non. Le but serait d’inclure plus de paramètres dans notre évaluation de l’état des mammifères marins en détresse. » explique-t-elle.

Aujourd’hui, Marion Desmarchelier est professeur à la faculté de médecine vétérinaire de l’Université de Montréal. Cela lui permet d’enseigner, de pratiquer la médecine clinique, de collaborer avec le Réseau, et surtout de mener des recherches sur les comportements des mammifères marins. Avec ses étudiants, elle travaille actuellement à découvrir de nouveaux marqueurs de stress chronique chez les cétacés, et à trouver une façon d’utiliser des échantillons de souffle pour évaluer leur bienêtre. Elle pense que mieux comprendre les comportements des baleines nous aidera à évaluer notre impact sur elles et à mieux les protéger.