Marsouins, phoques, requins, petits poissons et oiseaux marins… même quand les grands souffles manquent à l’appel, le Saint-Laurent est une pépite de biodiversité. Cela fait plusieurs jours que les quelques rorquals à bosse qui fréquentaient l’archipel de Mingan semblent avoir déserté la zone. Seule une baleine solitaire possédant une étonnante nageoire caudale au lobe replié a été repérée par l’équipe de la Station de recherche des iles Mingan (MICS).

Malgré cette absence remarquée, au retour d’une sortie sur le Saint-Laurent, à voguer entre les iles, le navigateur Jacques Gélineau s’exclame: «C’est très vivant ici!». Au fil de l’eau, il a pu croiser une dizaine de petits rorquals, dont une femelle et son petit. Il a assisté aux attaques d’un groupe de marsouins et de phoques gris sur une boule de poissons qui tentaient de fuir ces avides prédateurs. Il a aussi noté la présence de milliers de méduses Aurelia, reconnaissables aux quatre organes en forme de fer à cheval visibles au centre de l’ombrelle. Il a croisé enfin un macareux, content de rentrer au nid, un juteux poisson dans son bec multicolore. Le golfe grouille de vie pour qui sait regarder.

Requins, dauphins et baleines partagent les mêmes eaux

Au large de Sept-Îles, les chercheurs du CERSI dénombrent eux aussi plusieurs petits rorquals et quelques marsouins mais aucun grand rorqual. Un peu découragés, ils ont tout de même l’incroyable visite d’un requin maraiche, venu tourner quelques minutes autour de leur bateau. Ce petit requin gris-bleu considéré comme en danger d’extinction fait partie des sept espèces qui fréquentent le Saint-Laurent en été, au même titre que le requin pèlerin.

C’est d’ailleurs un requin pèlerin qui a attiré tous les regards en se nourrissant, lundi, entre le Rocher Percé et l’ile Bonaventure. Comme les baleines, ce requin s’alimente par filtration, nageant bouche grande ouverte au milieu du plancton. Le lendemain, une baleine noire de l’Atlantique Nord est détectée à quelques milles de là, au large de l’ile Plate. Même si la baleine noire est bien un mammifère et le requin pèlerin un poisson, cela ne les empêche pas de partager le même repas. C’est donc probablement l’afflux de petites proies, comme des copépodes, qui est responsable de leur présence commune.

Il y a quelques jours, un employé du phare de Pointe-des-Monts rapporte avoir observé des dauphins. Malheureusement, l’observation ne permet pas de déterminer s’il s’agit de dauphins à nez blanc ou de dauphins à flancs blancs. Ces deux espèces vivent dans les eaux tempérées froides de l’Atlantique Nord et sont fréquemment observées dans le Saint-Laurent. La forme de leur corps, leur coloration et leur mouvement de nage dynamique et bondissant sont assez similaires. Toutefois, il pourrait aussi s’agir de dauphins communs ou de dauphins bleu et blanc, plus rares en eaux froides mais aperçus ponctuellement dans le Saint-Laurent.

Côté bélugas, c’est plus calme cette semaine. Basés à Saint-Irénée, Rivière-du-Loup, Cacouna et aux Escoumins, les observateurs rapportent plutôt des individus solitaires ou de petites bandes éparses. Le capelan est peut-être moins présent, ou alors le gros vent et les vagues ont rendu les baleines blanches plus difficiles à repérer.

Au cœur d'une forêt de souffles

Assise sur une plage de la baie de Gaspé, une observatrice avoue n’avoir pas eu la chance de croiser la route des baleines cette semaine. Elle se console avec la vision hypnotique de fous de Bassan plongeant avec fracas au milieu d’un banc de poissons. Pourtant, les grands rorquals ne sont pas loin. Plusieurs rorquals à bosse et rorquals communs sont signalés au large du cap Gaspé, éparpillés dans les bancs de lançons, qui oscillent au gré des marées

Mardi, René Roy, collaborateur du MICS, s’élance le long de la côte nord de la péninsule gaspésienne. À six milles nautiques au large de la pointe à la Frégate, il découvre un regroupement de plus d’une cinquantaine de rorquals. «Une trentaine de communs, une vingtaine de bosses et de nombreux petits rorquals», évalue-t-il. «J’étais au cœur d’une véritable forêt de souffles». En habitué, il repère quelques vieilles connaissances comme Paloma ou Cédille, accompagnée d’un baleineau..

«Quand il y a de la bouffe quelque part, ça finit par se savoir. Les baleines attirent les baleines!» philosophe René Roy.

Un festin et du bonheur

Au cœur du parc marin du Saguenay-Saint-Laurent, l’activité de croisières aux baleines démarre à toute allure, avec l’arrivée dans l’estuaire de nombreuses dorsales bien connues. Parmi les rorquals communs, les assistants de recherche du GREMM ont ainsi pu identifier cette semaine Zipper, Ti-Croche, Piton et Bp935. On a reconnu aussi quelques rorquals à bosse, comme Chewbacca, H858, baptisée localement «Queen», H859, ou encore H909, surnommée parfois «Seventeen». On ne compte plus les nombreux petits rorquals, et on annonce l’arrivée des premiers marsouins, aux furtifs dos noirs.

Le 5 juillet, au large de Tadoussac et des Bergeronnes, le photographe Renaud Pintiaux s’émerveille: alors que le soleil scintille sur les vagues et que le vent fouette l’écume, il repère un troupeau d’une centaine de phoques gris en pleine activité. À la faveur de la marée montante, ces imposants pinnipèdes plongent au cœur d’un banc de capelans, partageant leur festin avec une myriade de goélands, de nombreux petits rorquals et une dizaine de rorquals communs. «Du vent, des vagues, du soleil, de l’action et du grand bonheur», résume l’observateur.

Où sont les baleines cette semaine? Voilà ce que nos collaborateurs et collaboratrices ont vu!

Ces observations donnent une idée de la présence des baleines et ne représentent pas du tout la répartition réelle des baleines dans le Saint-Laurent. À utiliser pour le plaisir!

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Observations de la semaine - 9/7/2021

Laure Marandet

Laure Marandet est rédactrice pour le GREMM depuis l'hiver 2020. Persuadée que la conservation des espèces passe par une meilleure connaissance du grand public, elle pratique avec passion la vulgarisation scientifique depuis plus de 15 ans. Ses armes: une double formation de biologiste et de journaliste, une insatiable curiosité, un amour d'enfant pour le monde animal, et la patience nécessaire pour ciseler des textes à la fois clairs et précis.

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