Parmi ses multiples missions, le Réseau québécois d’urgences pour les mammifères marins (RQUMM) s’occupe de la gestion des cas de mammifères marins dits « hors secteur », c’est-à-dire une baleine ou un phoque observé hors des limites de son habitat. Ces signalements peuvent mener à des actions de conservation et de prévention, même si l’animal se trouve en parfaite santé.
Ainsi, lorsqu’une espèce aussi vulnérable et précieuse que la baleine noire de l’Atlantique Nord a été signalée dans l’estuaire du Saint-Laurent à la fin septembre – une zone qu’elle fréquente très rarement-, le Réseau s’est mobilisé. L’objectif : tout mettre en œuvre pour que cette étonnante visiteuse passe un séjour le plus sécuritaire possible.
Informer pour agir
Le réseau d’urgences joue un rôle important de diffusion de l’information. S’il n’a pas de pouvoir direct sur la pêche ou la navigation, il agit auprès des différents acteurs du milieu qui, eux, peuvent poser les gestes de prévention nécessaires.
Par exemple, dès que la présence d’une baleine noire de l’Atlantique Nord a été confirmée aux abords du parc marin du Saguenay–Saint-Laurent, le Réseau a pu contacter Pêches et Océans Canada qui a procédé à l’annonce de fermeture des zones de pêche situées à proximité. Si la majorité des activités de pêches étaient déjà terminées dans le secteur, les pêches utilisant du matériel qui pourrait poser un risque d’empêtrement, comme la pêche au turbot et la pêche au buccin, ont été suspendues temporairement.
Côté navigation, un avis à la navigation marchande a été émis. Bien qu’il existe déjà une zone de ralentissement volontaire à 10 nœuds dans le secteur où la baleine a été observée, Parcs Canada a élargi la zone et a rappelé aux capitaines l’existence de cette mesure. Un avis aux capitaines de croisières d’observation a également été envoyé, afin de les sensibiliser à la présence de cette baleine et à l’importance de naviguer lentement en sa présence.
Ces différentes mesures de protection dynamiques font partie d’un plan de protection fédéral mis en place depuis quelques années dans le Saint-Laurent afin de protéger les baleines noires de l’Atlantique Nord, une espèce en voie de disparition particulièrement sensible aux collisions et aux empêtrements. Ces mesures sont régulièrement mises en œuvre dans le golfe, mais étaient activées pour la première fois dans l’estuaire.
Un effort collectif
Localement, le Réseau s’appuie aussi sur plusieurs canaux de communication afin de sensibiliser à la vulnérabilité de l’espèce et aux règles à appliquer, comme une distance minimale obligatoire de 400m pour l’observation.
Prévenus et sensibilisés, les pilotes du Saint-Laurent ont fait preuve d’un grand respect des consignes de vitesse et de vigilance, et ont signalé chaque observation de baleine noire.
Lever les mesures temporaires
Jusqu’à quand appliquer ces mesures restrictives ? C’est là où les signalements réguliers jouent un rôle essentiel ! La baleine noire de l’Atlantique Nord nommée Wolf a ainsi été observée 11 jours d’affilée entre Tadoussac et Les Escoumins, avant de disparaitre, probablement repartie en direction du golfe. La présence d’au moins une deuxième baleine noire a été confirmée durant cette période dans le même secteur.
Grâce aux observations quotidiennes – à distance ! – des croisiéristes, aux photographies et aux survols aériens menés par Pêches et Océans Canada, le RQUMM a pu renouveler régulièrement ses alertes et ses consignes. Après plusieurs jours sans aucun signalement, quand il a semblé raisonnable de penser que la ou les baleines avaient quitté la zone, les restrictions temporaires ont enfin pu être levées.
Pourquoi s'inquiéter d'un animal hors secteur ?
Hors de son habitat habituel, l’animal court parfois des risques différents. L’individu lui-même connait moins bien le secteur et les risques qu’il comporte (couloirs de navigation, risques d’échouages à marée basse, etc.) ; et les habitués du secteur ne sont pas familiers avec le comportement de cette espèce, ce qui peut mener à des accidents.
Lorsqu’il s’agit d’un animal en bonne santé, ou d’une espèce qui ne fait pas l’objet d’une attention particulière, une simple diffusion d’information et un appel à la vigilance peuvent suffire. Bien entendu, quand il s’agit d’un animal en difficulté ou d’une espèce en péril, des mesures particulières doivent être prises.
Il ne reste à l’heure actuelle qu’environ 400 baleines noires de l’Atlantique Nord, ce qui en fait l’une des espèces de baleine les plus menacées dans le monde.
Comment puis-je aider ?
Signalez le plus rapidement possible toute observation d’une espèce rare ou inhabituelle dans le secteur au Réseau québécois d’urgences pour les mammifères marins (RQUMM) , en appelant au 1 877 722-5346.
N’oubliez pas de documenter au maximum votre signalement avec des photos et des vidéos. Ces images seront des témoins essentiels pour valider l’identification de l’espèce. Elles permettront aussi de documenter l’état de santé de l’animal. Est-il simplement en train d’explorer une zone inhabituelle ou est-il en détresse ? Selon le cas, le plan d’action du RQUMM pourra être différent.