Dans le bureau du Groupe de recherche et d’éducation sur les mammifères marins (GREMM) à Tadoussac, les employés planchent sur leurs projets le 27 novembre. Vers 14h30, le téléphone sonne. Renaud Pintiaux s’écrit au bout du fil: «Un cachalot devant le camping de Bon-Désir! Je l’ai vu respirer, puis plonger. J’ai vu sa crête, j’ai vu sa queue, pas de doute, c’en est un!» Il reste un peu moins de deux heures de luminosité, il faut compter une vingtaine de minutes de voiture pour se rendre à Bergeronnes et un cachalot peut plonger plus d’une heure. Les chances d’observation sont minces, mais avec une collègue, nous décidons de partir à la «chasse au cachalot».
Nous voilà sous le vent, une dizaine de degrés sous zéro, les pieds dans la neige croutée. Les yeux rivés dans les lentilles de nos jumelles, nous balayons l’horizon du regard. Au large, l’évaporation de l’eau trouble la visibilité. Un ornithologue passionné qui s’est joint à nous repère un petit rorqual à des kilomètres de la côte. Mes jumelles ne sont pas assez puissantes pour le voir. Nous trépignons pour conserver notre chaleur tandis que le soleil décline. Nous rentrons bredouilles, mais heureux d’avoir observé la beauté brute du Saint-Laurent sous la neige.
Renaud a une chance incroyable avec les cachalots (ou est-il simplement plus patient que nous?): il en voit un à nouveau le 1erdécembre! Le plus gros des cétacés à dents est un visiteur rare de l’estuaire. Renaud repère également deux rorquals à bosse. Sont-ce les mêmes individus qui sont observés au large de l’ile aux Pommes le 3 décembre par un matelot? C’est possible.
Notons aussi au cours des derniers jours des observations de bélugas, de petits rorquals et de phoques communs et du Groenland dans le secteur du parc marin du Saguenay–Saint-Laurent.
Du côté de Sept-Îles, le collaborateur de la Station de recherche des iles Mingan Jacques Gélineau décide de braver le froid et la glace naissante pour sortir au large le 3 décembre. «Il faut être prudent pour aller sur l’eau ces temps-ci», confirme-t-il. En sortant de la baie, il croise des phoques communs sur la glace mince. Une heure plus tard, il repère son premier souffle : un rorqual bleu. Près de sa nageoire dorsale, des marques blanches. Sont-elles des vestiges d’un frottement avec de la glace? René Roy parle de ce type de blessure justement dans son carnet de terrain de la semaine. Jacques Gélineau croise plus loin deux rorquals à bosse : la femelle Hockey et son baleineau. Un rorqual commun et un petit rorqual se trouvent aussi dans le secteur.
Pendant ce temps, en Gaspésie
En descendant en voiture la côte qui mène à Cap-aux-Os, en Gaspésie, un capitaine de croisières aux baleines note un grand souffle dans la baie de Gaspé le 29 novembre. Le grand rorqual souffle à nouveau un peu plus loin avant de disparaitre dans les vagues. «Il n’y a pas encore de glace de ce côté de la baie, on pourra peut-être voir encore d’autres souffles», constate-t-il. Du côté de la ville de Gaspé, en revanche, la glace commence à prendre. «Depuis quelques jours, une vingtaine de phoques se hissent sur la glace face à l’hôpital pour se chauffer au soleil. Toujours fascinant de voir des phoques en plein centre-ville!», s’exclame un Gaspésien.