Pour les riverains et riveraines de la Gaspésie, les baleines offrent encore à l’occasion de beaux moments, tandis qu’ailleurs les observations deviennent de plus en plus rares.
Le 28 novembre, vers 14h, une habitante de Cap-des-Rosiers note le passage de quatre rorquals communs. «Je dirais qu’il y avait un veau avec eux», dit-elle. La même journée, de l’autre côté de la pointe gaspésienne, dans la baie de Gaspé, deux rorquals à bosse se reposent à la surface, semblables à d’immenses troncs d’arbre flottants. Puis, les baleines s’activent et plongent. Un troisième rorqual à bosse apparait, il claque ses nageoires pectorales à la surface. Quelle énergie!
Devant trois villages différents, les rorquals à bosse s’élancent! Un saute devant Cap-des-Rosiers à au moins trois reprises le 28 novembre. Le 29 novembre, c’est plutôt du côté de L’Anse-au-Griffon, mais aussi de Percé, où une personne faisant des courses à la pharmacie a toute une surprise: il peut y observer de la fenêtre un rorqual à bosse claquer de la queue. Voilà un excellent remède pour retrouver le moral!
Est-ce demandant, pour un rorqual à bosse, de sauter? Une étude a calculé qu’un seul saut de rorqual à bosse adulte équivaut à environ 10,3 mégajoules, soit la dépense énergétique qu’effectue un humain adulte lorsqu’il court un marathon!
En termes relatifs, toutefois, c’est plus difficile à calculer, mais le constat reste que cela demande un fort effort physique pour réaliser l’exploit de sortir un corps de plusieurs tonnes hors de l’eau.
Pourquoi dépenser autant d’énergie à sauter peu de temps avant une migration, alors qu’on pourrait croire que les baleines voudraient en stocker au maximum? Difficile à dire. Une étude s’est intéressée aux sauts chez différentes espèces. Ils ont été surpris de voir des mères et leurs petits de quelques semaines seulement sauter à répétition. Ils lancent donc l’hypothèse que les sauts répétés ont un rôle social suffisamment important pour valoir la dépense énergétique et que, peut-être, ils serviraient aussi au développement de certaines fonctions chez les baleineaux ou encore qu’ils donnent un signal clair de la vigueur de l’adulte.
À Pabos, un petit rorqual nage vigoureusement. Les petits rorquals sont eux aussi reconnus pour leurs sauts. La même étude a suivi 22 sauts effectués par deux petits rorquals munis d’une balise. Par rapport aux autres espèces étudiées (rorqual à bosse, rorqual de Bryde, baleine grise, baleine noire et cachalot), le petit rorqual parvient à obtenir la vitesse et l’impulsion nécessaire à sa propulsion hors de l’eau avec une moyenne de 7 mètres. Il peut même le faire à partir de seulement 2 mètres de profondeur!
Pour d’autres habitants des mêmes villages, aucune observation! Repérer une baleine à l’horizon demande d’être attentif à ce qui se passe au large au bon moment. Ce n’est donc pas parce qu’on sait que des baleines sont dans secteur qu’on va nécessairement les voir. Mais plus on regarde, et plus on a de la chance!
Petits rorquals et bélugas sur la Côte-Nord
Sur la Côte-Nord, où les baleines se font plus rares, il faut être encore plus attentif pour glaner des observations. Le 30 novembre, deux assistants de recherche du Groupe de recherche et d’éducation sur les mammifères marins (GREMM) profitent de leur pause diner à Tadoussac pour regarder un petit groupe de bélugasnager à l’embouchure du fjord. Aux Bergeronnes, un ornithologue repère aussi des bélugas et un petit rorqual, le 2 décembre.
À Baie-Comeau, deux petits rorquals s’agitent dans les vagues. Pour éviter de boire la tasse, ils doivent sortir la tête plus haute hors de l’eau lorsqu’ils viennent respirer, les rendant bien visibles pour le promeneur.
À Port-Cartier, un rorqual commun passe au large. « Rien d’autre à signaler », se désole un observateur.
Se prélasser sur la glace
L’hiver, l’observation des phoques est parfois facilitée par la présence des glaces en bordure de mer. Le 27 novembre, à l’embouchure de la rivière York dans la baie de Gaspé, une cinquantaine de phoques communs se prélassent sur la glace. Deux jours plus tard, une quinzaine de phoques se reposent. Cette fois, l’observatrice croit voir des phoques du Groenland parmi les phoques communs. «Est-ce possible que les deux espèces se côtoient?», demande-t-elle. Ce n’est pas impossible, mais peu probable. Les espèces de phoques n’ont pas tendance à partager leurs échoueries.
Dans l’eau, les phoques sont plus difficiles à repérer, surtout lorsqu’ils ne sortent que brièvement leur tête pour respirer. Les phoques du Groenland, par contre, peuvent se démarquer, lorsqu’ils nagent sur le dos. Leur tête en l’air ressemble alors à une bouteille flottant à la surface et le ventre blanc permet de bien le repérer. Sur le traversier reliant Saint-Siméon à Rivière-du-Loup, un chanceux en voit trois au cours de la traversée.