Le bateau Le Bleuvet est maintenant au sec pour l’hiver. Au cours des deux dernières semaines, l’équipe était à bord du bateau, non pas en mer, mais sur le plancher des vaches, afin de l’abriter pour l’hiver. La saison sur l’eau s’était toutefois terminée au début octobre à cause d’un bris. Pendant ce temps, le BpJAM, second bateau du GREMM, est demeuré à quai pour permettre à l’équipe de compléter sa saison en mer. Le projet ECB (écologie comportementale des bélugas) vise à définir la nature sociale des groupes, à élucider comment ils se distribuent et utilisent leur habitat, à identifier les habitats critiques et leur vulnérabilité aux activités humaines. Il vise aussi à évaluer le succès reproducteur des femelles et d’étudier la dynamique de la population.
Quatre mois plus tôt, fin juin, l’équipe prend le large pour ces premières journées de terrain. Ils retrouvent des troupeaux de bélugas familiers et fidèles à leur territoire. Ils travaillent particulièrement dans le fjord du Saguenay, abrité du vent. Ils y voient deux veaux, nageant tout près de leur mère. C’est le début de la saison des naissances des bélugas qui s’étirera jusqu’en septembre.
Au cours de la saison, plusieurs veaux sont vus en compagnie de femelles bien connues comme Marjo, DL1757 surnommée Boursouffle et Miss Frontenac. Il s’agit d’ailleurs, pour Miss Frontenac, d’un premier veau connu. Boursouffle est vue de nouveau avec un veau, sa fille surnommée Marguerite aussi; ainsi, la mère et la fille sont mères en même temps. Une journée, l’équipe note la présence de six veaux lors d’un même contact. Un autre jour, l’équipe suit les premiers moments d’un nouveau-né qui se fait imposer un rythme de nage très rapide par des jeunes bien plus gros que lui. Le 25 juillet, l’équipe se rend tout près de la bouée K54, à l’embouchure du Saguenay, pour découvrir la femelle Marjo entourée et maintenue à la surface par une dizaine de mâles. Les corps roulent en surface et l’équipe voit plusieurs pénis roses en érection à travers les vagues et l’écume. Quand ils se rapprochent, la femelle se sert même du bateau comme d’un écran, un refuge. Le 30 juillet, c’est le mâle Dance-Sea, connu depuis 1989, qui est reconnu alors qu’il somnole, complètement immobile à la surface de l’eau. L’équipe avait même reçu un appel pour valider s’il s’agissait d’une carcasse.
Puis, au mois de septembre, l’équipe collabore au projet de recherche de la chercheuse Véronique Lesage (Pêches et Océans Canada), en collaboration avec le GREMM, Saint Mary’s University en Nouvelle-Écosse et Harbor Branch Oceanographic Institute, Florida Atlantic University, pour tenter de déterminer la proportion de femelles gestantes et de la comparer à celle attendue chez une population en santé. Cette deuxième année du projet est un franc succès. Tous les secteurs fréquentés par les bélugas ont été visités et le nombre de biopsies réalisées a doublé comparativement à l’année précédente : 53 contre 22 en 2013. Un franc succès.
D’ailleurs, les conditions météo ont été « bonnes » cet été. Même si la brume envahit parfois le Saint-Laurent, l’équipe réussit généralement à poursuivre le travail, parfois accompagnée de la sirène des cornes de brume des cargos.
La saison de terrain est maintenant terminée, mais les analyses se poursuivent afin d’en savoir un peu plus sur l’état de la population de bélugas du Saint-Laurent, pour comprendre les raisons de son déclin et imaginer des solutions pour son avenir.
Des photos de la saison :
L’équipe 2014 du projet ECB:
Supervision scientifique : Robert Michaud, chercheur et fondateur du GREMM
Michel Moisan et Marie-Hélène D’Arcy: techniciens séniors; Tim Perrero et Renaud Pintiaux : assistants de recherche et photographes au GREMM;
Mélissa Tremblay: assistante de recherche.
Pour en savoir plus sur leurs journées en mer : retrouvez nos chercheurs et photographes dans leurs carnets de terrain.