Le 6 mai dernier, le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC) se réunissait à Saint-Jean, à Terre-Neuve-et-Labrador, pour évaluer ou réévaluer le statut de trois espèces ou populations de baleines, le rorqual boréal, le rorqual commun et la baleine à bec de Sowerby. Le comité constate que les principales menaces pour les baleines sont le trafic maritime et le bruit associés aux activités humaines.
Le COSEPAC est composé de 43 scientifiques indépendants qui ont pour tâche d’évaluer la situation de chacune des espèces. Leurs recommandations seront transmises à l’automne au ministre de l’Environnement et des Changements climatiques du Canada. Si ce dernier les accepte, elles seront ajoutées au registre public des espèces en péril, en vertu de la Loi sur les espèces en péril.
Rorqual boréal : tout près de s’éteindre
Le COSEPAC recommande d’attribuer le statut d’espèce «en voie de disparition» au rorqual boréal fréquentant l’Atlantique, en raison du faible nombre d’individus observés. «Le rorqual boréal est devenu rare dans les eaux canadiennes depuis la fin de la chasse à la baleine dans les années 1970. Il n’a plus été vu du côté pacifique et seulement à quelques occasions en Atlantique», souligne Hal Whitehead, spécialiste des cétacés et coprésident du Sous-comité de spécialistes des mammifères marins du COSEPAC. Actuellement, la population du Pacifique seulement figure parmi les espèces listées par la Loi sur les espèces en péril, comme en voie de disparition.
Le rorqual boréal est une espèce cosmopolite : il visite les eaux du Labrador, mais également les Açores et la côte ouest de l’Afrique. Les menaces qui pèsent sur l’animal varient donc selon l’endroit qu’il visite. Dans les eaux terre-neuviennes, le bruit sous-marin créé par la prospection sismique l’affecte
Rappelons qu’une espèce « en voie de disparition » est au seuil de l’extinction. Au Canada, selon la Loi sur les espèces en péril, le rorqual bleu, la baleine noire de l’Atlantique Nord, l’épaulard résident du sud du Pacifique Nord-Est et le béluga du Saint-Laurent ont le statut «en voie de disparition».
Rorqual commun : remonter la pente
Deuxième plus grand animal au monde, tout juste après le rorqual bleu, le rorqual commun n’est pas dans une situation aussi alarmante que celle du rorqual boréal. Au contraire, la population de rorquals communs du Pacifique semble aller de mieux en mieux et se rétablir depuis la fin de la chasse. Le COSEPAC propose donc de revoir le statut de cette population, passant ainsi de «menacée» à «espèce préoccupante». Pour la population de l’Atlantique, le statut d’«espèce préoccupante» est maintenu.
«Nous croyons que la situation des rorquals communs s’améliore, mais nous ne sommes cependant pas prêts à les déclarer sortis d’affaire», explique Hal Whitehead. «Ils sont toujours vulnérables au trafic maritime, particulièrement aux collisions avec les navires.»
Baleine à bec de Sowerby : éviter le vacarme
Contrairement aux rorquals, la baleine à bec de Sowerby n’a pas été fortement impactée par la chasse aux baleines. Bien que leur nombre soit à la hausse dans l’Atlantique ces dernières années, le COSEPAC suggère de maintenir son statut d’espèce «préoccupante».
Cette précaution vient de sa sensibilité au bruit. En effet, la baleine à bec de Sowerby se repère à la manière d’une chauve-souris : le son lui permet de naviguer et de chasser. C’est ce qu’on appelle l’écholocalisation. Une grande quantité de bruit sous-marin peut compromettre sa capacité à communiquer, à se déplacer et à s’alimenter.
Heureusement, les baleines à bec de Sowerby au large de la Nouvelle-Écosse auraient trouvé un endroit pour fuir le bruit dans le canyon sous-marin de Gully, une aire marine protégée depuis 2004. Hal Whitehead croit que : «C’est une indication que les aires marines protégées fonctionnent. Ces refuges offrent une lueur d’espoir pour toutes ces espèces, et ils devraient être élargis, et ce, jusque dans les eaux internationales.»