Le 10 mai, le téléphone du Centre d’appels Urgences Mammifères Marins sonne. On rapporte un jeune phoque commun sur la plage Haldimand à Gaspé, qui a encore son cordon ombilical. Les témoins sont curieux et touchés par ce jeune animal qu’ils croient en détresse: le phoque est manipulé et flatté. Il s’agit là, pour le Réseau québécois d’urgences pour les mammifères marins, d’un cas désigné de «harcèlement». Il est illégal de manipuler un mammifère marin, si on ne possède pas de permis pour le faire. Plus encore, si le petit n’est pas sevré, sa mère est probablement à l’eau à proximité, attendant le retour de la marée pour venir le récupérer. La présence d’humains dans les parages ou une odeur humaine sur le petit pourraient inciter la mère à l’abandonner définitivement. Le petit serait alors destiné à la mort.
La situation n’est pas nouvelle: une vingtaine de cas similaires sont rapportés chaque année. Le Réseau veille ainsi à sensibiliser les témoins aux consignes à respecter: garder ses distances, tenir les animaux domestiques éloignés, minimiser le bruit et l’achalandage et, surtout, ne pas le manipuler. Les phoques sont des animaux sauvages, ils peuvent mordre et transmettre des maladies.
Des bénévoles d’Urgences Mammifères marins ont assuré le suivi de la situation: des affiches ont été posées, des photos ont été prises pour suivre l’état de l’animal, et de la sensibilisation auprès des riverains a été faite. Le phoque n’a pas été revu le 11 mai, mais a été signalé de nouveau à l’autre extrémité de la plage, le 14 mai. Le jeune est vigoureux mais ne craint pas les gens. L’achalandage est de plus en plus élevé, et les chiens sont nombreux à se promener sur la plage. On nous signale que les passants s’approchent trop près de l’animal, puis des gens remettent le phoque à l’eau à deux reprises, sans avoir communiqué avec le 1-877-7baleine. Le phoque revient s’échouer sur la berge.
En fin de journée le 18 mai, le phoque ne montre plus aucun signe de vigueur et est visiblement amaigri. L’analyse de la situation et des photos prises par le vétérinaire conseil du Réseau, Stéphane Lair du Centre québécois sur la santé des animaux sauvages (CQSAS) de la Faculté de médecine vétérinaire de l’Université de Montréal, conduisent à constater que les chances de survie de l’animal sont très faibles et que celui-ci est par conséquent condamné. L’option de l’euthanasie a donc été retenue, ce que les agents des pêches ont fait le 19 mai. L’animal ne fera pas l’objet de nécropsie.
Crédit des photos: Alexandre Côté, 11 mai 2015 (image à la une); Julien Houle, 18 mai 2015 (image ci-bas à droite)