Pourquoi les femelles de cette espèce vivent une cinquantaine d’années après l’arrêt de leurs capacités à se reproduire? Pour quelle utilité? Des scientifiques proposent une réponse : maximiser les chances de survie de leurs descendants mâles et ainsi augmenter la diffusion de leur patrimoine génétique au sein de la population.

L’étude dirigée par Emma Foster et Darren Croft de l’University of Exeter (Royaune-Uni) a été publiée le 14 septembre 2012 sur le site Internet de la revue Science (Adaptative Prolonged Postpreproduction Life Span in Killer Whales).

Chez les femelles épaulards (Orcinus Orca), dont la longévité peut atteindre 90 ans, la ménopause intervient entre 30 et 50 ans. Après les humains, elles présentent donc une des plus longues périodes de vie postreproductive. Ces chercheurs ont tenté de comprendre quel rôle cette longue ménopause pouvait jouer chez cette espèce, et d’un point de vue évolutif, quel avantage elle présente.

Propager le patrimoine génétique

Ils ont analysé les données récoltées pendant 36 ans sur les membres de deux populations du Pacifique Nord, fréquentant les zones côtières des États-Unis et du Canada. Grâce à la photo-identification qui permet de reconnaître les individus et les suivre sur le long terme, les biologistes ont pu repérer les âges de naissance et de mort de 589 épaulards.

Selon les résultats de l’étude, les descendants mâles ont à partir de l’âge de 30 ans, 14 fois plus de risques de mourir dans l’année suivant la mort de leur mère. On sait qu’une mère et ses descendants (mâles et femelles) restent ensemble au sein d’un même groupe toute leur vie. Pour les femelles du même âge, le risque de mourir suite à la mort de leur mère n’augmente que par trois, et il ne change pas pour les femelles âgées de moins de trente ans.

Pour les scientifiques, la présence de la mère auprès de ses descendants mâles, même s’ils sont adultes et matures sexuellement, accroit leurs chances de survie. De ce fait, les mâles ont plus de temps de vie pour se reproduire et propager leurs gènes, et donc ceux de leur mère, au sein de la population. Pourquoi les mères n’adopteraient-elles pas la même stratégie avec leurs filles? Parce que les filles et leurs descendants restent auprès de la matriarche, ce qui augmente la compétition au sein du groupe. Les rejetons des mâles, eux, ne « coûtent » rien à la grand-mère, puisqu’ils sont élevés au sein d’autres groupes familiaux.

La vie sociale de ces épaulards

Regardons d’un peu plus près la dynamique et les structures sociales de ces épaulards, bien connues des biologistes. Ils vivent en groupes familiaux matrilinéaires stables pouvant atteindre une cinquantaine d’individus, dans lesquels on peut trouver jusqu’à quatre générations (la mère, ses fils et filles, et les petits de ses filles). En effet, le mâle s’accouple avec une femelle d’un autre groupe, et après l’accouplement, ils ne restent pas ensemble pour former une cellule familiale, ils demeurent chacun avec les membres de leur filiation matrilinéaire. Les descendants des mâles sont donc pris en charge par d’autres femelles que celles de son groupe familial formé autour de sa mère.

Pour les chercheurs, leurs résultats représentent une découverte fascinante, mais ils ne savent pourtant pas comment les mères accroissent les chances de survie de leurs fils, et espèrent poursuivre leur étude pour le savoir. Des observations sporadiques suggèrent que les mères aident leurs fils adultes à capturer leur nourriture et qu’elles leur apportent du soutien pendant les interactions agressives.[BBC Nature, Science, Le Temps, Futura-Sciences, LiveScience, Science 2.0]

En savior plus

Sur le site de BBC Nature Killer whales live on after menopause to protect sons

Actualité - 20/9/2012

Christine Gilliet

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