La première sortie de la saison est très certainement une des plus grisantes. La fébrilité de se retrouver sur l’eau après une longue saison hivernale y est pour beaucoup. Stimulés par cette exubérante nature printanière, nous attendons nerveusement notre premier souffle. Va-t-on voir des baleines aujourd’hui?

Parti d’Anse-à-Brillant le midi, je suis passé prendre mes équipiers à Grande-Grave de l’autre côté de la baie de Gaspé à midi trente. J’avais eu vent qu’on avait vu des souffles en face de Cap-aux-Os, ce qu’ils m’ont confirmé. Nous avons donc mis le cap vers le fond de la baie.

Tout juste une demi-heure après notre départ, nous apercevons un beau souffle de baleine à bosse très loin dans la baie… puis un plus petit… puis un autre grand souffle. Ce n’est pas une baleine qui s’y trouve, mais bien trois. Même après plus de quinze ans sur l’eau à les observer, je suis excité comme un enfant qui reçoit sa première bicyclette. L’enthousiasme de les retrouver fait vite place à l’énervement de savoir qui elles sont.

Est-ce des animaux connus de la Station de recherche des îles Mingan (MICS)? Les ai-je déjà observés? Très rapidement, il devient évident que nous observons une mère avec son baleineau, mais il n’est pas possible d’identifier cette femelle qui ne sort pas ou très peu la queue. Nous nous tournons donc vers le troisième individu qui, dès la première plongée, nous fait voir son patron de sous-caudale que je revois pour la neuvième année consécutive. Il s’agit de la très fidèle H626 BBR, que l’on nomme Gaspar dans l’estuaire. C’est une baleine à bosse toujours très active, ce qu’elle me prouvera le lendemain avec quelques sauts hors de l’eau. Elle semble chaperonner l’autre femelle et son veau en les suivant de près. Il me faudra au moins une heure avant de pouvoir photographier suffisamment bien la sous-caudale de cette mère pour pouvoir identifier H008 Pseudo, qui a cette caractéristique frustrante de traîner la queue sur l’eau lors de ses plongées. Je l’avais observée la première fois en 2012 à Percé, alors que j’avais dû la suivre sur plusieurs milles avant de pouvoir prendre une photo suffisante pour l’identification. Pseudo est l’une des premières femelles à avoir été observée avec un veau, par les chercheurs du MICS, dans le golfe, en 1982. Cette observation n’est rien pour apaiser mon excitation. Ce trio est resté très profondément dans la baie durant tout mon séjour de 4 jours là-bas. Chanceux ces gens de Cap-aux-Os de pouvoir assister à ce spectacle de baleines à partir de leur balcon.

Durant le reste de mon séjour, j’ai pu observer plusieurs phoques (gris et communs) ainsi que cinq petits rorquals dans le secteur et, bien évidemment, une multitude de magnifiques oiseaux marins.

Voici quelques photos de cette sortie printanière.

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RenéRené Roy est un cétologue amateur, passionné de la mer et des baleines, résidant à Pointe-au-Père, dans le Bas-Saint-Laurent. Depuis plusieurs années, il entreprend des expéditions de photo-identification pour le compte de la Station de recherche des îles Mingan (MICS), principalement en Gaspésie. Il est également bénévole pour le Réseau québécois d’urgences pour les mammifères marins.

Carnet de terrain - 30/5/2016

René Roy

René Roy est un cétologue amateur, passionné de la mer et des baleines, résidant à Pointe-au-Père, dans le Bas-Saint-Laurent. Depuis plusieurs années, il entreprend des expéditions de photo-identification pour le compte de la Station de recherche des iles Mingan (MICS), principalement en Gaspésie. Il est également bénévole pour le Réseau québécois d’urgences pour les mammifères marins.

 On peut voir ses photos sur Facebook

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