Une fine analyse de l’évolution de la densité de navires, la première du genre, vient d’être livrée à partir de relevés effectués par des satellites. Connaître et suivre cette évolution est un enjeu majeur pour s’occuper de la santé des océans et de ses écosystèmes. L’augmentation de l’émission de polluants va de pair avec cette croissance.

Dans le monde, le trafic maritime a considérablement augmenté depuis le début des années 1990 et a connu une croissance sans précédent. C’est dans l’océan Indien que la plus forte hausse a été enregistrée: elle a dépassé les 300% en 20 ans. Dans l’Atlantique Nord, le Pacifique Nord et la Méditerranée, l’augmentation est estimée entre 100% et 200%. Ces données sont issues d’une étude menée par un chercheur océanographe physicien, Jean Tournadre, de l’Ifremer de Brest, en France. L’étude a été publiée dans les Geophysical Research Letters, le 14 novembre 2014.

Mesurer la hauteur de la mer pour repérer les navires

L’analyse du trafic maritime a été effectuée avec la technique de l’altimétrie satellitaire. Cette technique est généralement utilisée pour mesurer le niveau de la mer, le nombre et la taille des icebergs, la topographie de l’océan et les courants océaniques. Elle utilise un radar pour mesurer la hauteur de la mer par l’intermédiaire de satellites: toute variation de la hauteur de la mer, par exemple une variation créée par le passage d’un bateau, est ainsi détectée.

Dans cette étude, le terme «trafic maritime» correspond à la densité de bateaux, c’est-à-dire leur nombre sur mer par unité de surface; il n’est pas restreint au transport de marchandises et des passagers. Selon l’auteur de l’étude, les données satellitaires ont permis de suivre l’évolution de la densité des bateaux selon une analyse fine. Le rythme de croissance de la densité de bateaux a été de l’ordre de 6% par an entre 1992 et 2002, 8% à 10% par an entre 2002 et 2012. Il précise que le trafic maritime a presque stagné durant la crise économique de 2008-2009.

Pollutions et risques de collision accrus

Pour M. Tournadre, il est primordial de pouvoir quantifier l’évolution du trafic, son étude étant la première à présenter un état des lieux mondial de la navigation maritime sur une longue période. Cette explosion du trafic maritime génère une importante pollution atmosphérique au-dessus de l’océan. La grande majorité des navires utilisent encore des combustibles lourds très polluants. Ils émettent du dioxyde d’azote (NO2), un gaz généré par les moteurs à diesel (ou gazole), et du dioxyde de soufre (SO2) dû à la combustion de ce carburant de médiocre qualité. Ces polluants contribuent, notamment avec le CO2 (dioxyde de carbone ou gaz carbonique), à l’acidification des eaux des océans qui touche l’ensemble de la chaîne alimentaire. Le NO2 a augmenté de 50% entre 1997 et 2010 sur une des routes les plus fréquentées du monde, entre le Sri Lanka, Sumatra et la Chine.

L’augmentation du trafic maritime entraîne également celle de la pollution sonore qui perturbe le mode de vie des mammifères marins pour lesquels le son régit toutes les activités. À ces deux types de pollution s’ajoute le risque accru de collision pour les mammifères marins.

Sources

Sur le site de l’Ifremer:

L’évolution du trafic maritime mondial révélée par satellite (communiqué)

Sur le site de Wiley Online Library (en anglais seulement):

Anthropogenic pressure on the open ocean: The growth of ship traffic revealed by altimeter data analysis

Pour en savoir plus

Sur le site du Journal de l’environnement:

Le trafic maritime en plein boom

Sur le site de Baleines en direct:

Trafic maritime (archives des Actualités d’ici et d’ailleurs et des projet de recherche)

Actualité - 12/2/2015

Christine Gilliet

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