Ce plan prévoit dès l’automne prochain le dépôt d’une loi miroir, calquée sur celle du gouvernement fédéral, pour encadrer les activités d’exploration pétrolière dans le golfe du Saint-Laurent. Cet empressement est jugé dangereux par des organisations environnementales qui réclament plus de sécurité et de garanties.
Le gouvernement du Québec élu au printemps 2014 a déposé son Plan sur la filière des hydrocarbures le 30 mai dernier. « Nous agirons avec prudence, transparence et de façon ordonnée, dans le meilleur intérêt de la population québécoise, déclare Pierre Arcand, ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles et ministre responsable du Plan Nord. Le potentiel des hydrocarbures devra tout d’abord être confirmé, la rentabilité économique évaluée et les meilleures pratiques appliquées. »
« Avant que ne soit autorisée l’exploitation, celle-ci devra être encadrée et contrôlée. Plus important encore, les promoteurs des projets devront susciter l’adhésion des populations concernées, a ajouté David Heurtel, ministre du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques. Le gouvernement s’engage à être à l’écoute des préoccupations des citoyens, à les informer et à agir de manière responsable. »
Ouvrir le golfe au plus vite
Pour la partie marine de la filière, le gouvernement québécois prévoit d’accélérer les négociations avec le gouvernement fédéral pour déposer, à l’automne 2014, un projet de loi miroir sur les hydrocarbures semblable à celle déposée simultanément par ce dernier. Ces lois miroirs visent à encadrer les divers aspects de la gestion conjointe des hydrocarbures extracôtiers entre les deux paliers de gouvernement, et notamment à créer un office Canada-Québec des hydrocarbures en milieu marin.
Cet empressement a été vivement dénoncé par plusieurs organismes environnementaux. Pour la Fondation David Suzuki, il « risque de compromettre les efforts qui doivent être faits pour donner au Québec un régime moderne qui tient compte des enseignements de la catastrophe du golfe du Mexique. Partout dans le monde, l’accident de Deepwater Horizon a mené à des réformes majeures, réformes qui se font toujours attendre au Canada. Québec a une chance de se donner un régime moderne et sécuritaire. En procédant à la hâte, il se contentera de copier un régime canadien dangereux et dépassé ».
Des points concrets demandés pour les hauts standards promis
La Coalition Saint-Laurent réclame du gouvernement québécois qu’il intègre dans cette loi miroir les plus hauts standards et les meilleures pratiques qu’il promet en ce qui concerne la sécurité et la protection de l’environnement et des communautés côtières, « sans se soumettre aux normes fédérales constamment revues à la baisse », précise-t-elle dans un communiqué.
En cas de déversement pétrolier, la responsabilité financière des compagnies devrait être illimitée, comme en Norvège et au Danemark, et non pas plafonnée à un milliard de dollars avec la possibilité pour le gouvernement d’abaisser au besoin cette limite, comme le propose le gouvernement Harper. Tous les forages exploratoires et levés sismiques devraient être soumis à des évaluations environnementales et non pas uniquement les premiers forages. Le véto actuel des compagnies pétrolières sur les informations environnementales et sécuritaires, véto préconisé par le gouvernement fédéral, devrait être rejeté en faveur d’une complète transparence. Le gouvernement du Québec devrait exiger la présence d’observateurs indépendants sur les plateformes de forage en mer. Le litige frontalier avec la province de Terre-Neuve-et-Labrador devrait être réglé avant tout forage en mer, ceci concernant particulièrement la structure géologique d’Old Harry.
Ces organisations pointent le fait que le plan ne mentionne pas ce qu’il adviendrait du moratoire instauré depuis 1997 sur l’exploration pétrolière dans le golfe du Saint-Laurent et les modalités de sa levée. Ils considèrent comme une lacune du plan le fait que la tenue d’un Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) et d’une consultation interprovinciale ne soit pas évoquée.
Empressement non justifié
« Si Terre-Neuve exploite Old Harry : nous assumons les risques, sans les bénéfices économiques », peut-on lire dans le Plan d’action du gouvernement. La Coalition Saint-Laurent relativise l’imminence de ces premiers forages dans la province de Terre-Neuve-et-Labrador qui sert à justifier l’empressement du gouvernement québécois. Elle rappelle que le projet de forage sur le site Old Harry est en cours d’évaluation environnementale et que Terre-Neuve-et-Labrador « est encore loin d’avoir autorisé le projet ».
« Le golfe du Saint-Laurent est un écosystème unique, d’une grande fragilité, partagé par cinq provinces côtières, déclare Sylvain Archambault, porte-parole de la Coalition Saint-Laurent. Le Québec devrait assumer un leadership dans le golfe et travailler de concert avec les autres provinces côtières à la mise en place d’un moratoire général sur les activités pétrolières dans tout le golfe ainsi qu’à la tenue d’un vaste examen public. »
Sources
Sur le site du ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles:
Plan d’action gouvernemental sur les hydrocarbures (mai 2014)
Pour en savoir plus:
Sur le site de la Fondation David Suzuki:
Plan d’action sur les hydrocarbures: des lacunes à corriger
Sur le site de Médiaterre:
Les québécois seront mieux protégés en attendant un virage vert
Sur le site de Baleines en direct:
Pétrole dans le golfe du Saint-Laurent (archives des Actualités d’ici et d’ailleurs)