Alors que la première neige s’abat sur le Saint-Laurent, certaines baleines continuent de faire comme si la saison estivale ne s’était jamais terminée. Les observateurs se font plus rares, mais pour les plus assidus aux abords de l’estuaire, l’attente en vaut la chandelle.
On rapportait encore la semaine dernière deux rorquals à bosse entre Les Bergeronnes et Les Escoumins, tantôt devant le quai des pilotes, tantôt devant le cap de Bon-Désir. Il y a un peu plus de dix jours, un observateur posté aux Dunes de Tadoussac a même pu repérer la grande bleue qui évoluait lentement au centre de l’estuaire. Les phoques du Groenland, arrivés du Nord, sont aussi bien présents, au travers de quelques marsouins communs et des petits rorquals bien actifs. Qu’y avait-il dans cette zone d’eau agîtée au matin du 28 novembre, aux abords du cap? Des dauphins? Des phoques en déplacement? Impossible de le confirmer, mais la vie était bien là!
Plus en aval, dans le secteur de Franquelin, la diversité est aussi au rendez-vous; à la mi-novembre, jusqu’à quatre rorquals à bosse ont plongé sous les yeux de notre observatrice assidue. Puis, à sa plus grande surprise, une centaine de dauphins sont passés par-là, « une première depuis que je participe comme observatrice des Nouvelles du large » raconte-t-elle, visiblement enthousiaste! Sinon, les espèces plus communes telles le petit rorqual, le marsouin commun et les phoques font aussi partie des mammifères marins observés à l’aube de l’hiver.
L’équipe du GREMM, en poste dans les bureaux du Centre d’interprétation, rapporte quant à elle presque quotidiennement des bélugas qui nagent à l’embouchure du Saguenay. Puis le lundi 28 novembre, un observateur a vu défiler un groupe d’une cinquantaine de cette petite baleine blanche devant les rochers des Bergeronnes.
On connaît peu de choses sur l’endroit où les bélugas se concentrent l’hiver, mais on sait qu’ils ne quittent pas les eaux du Saint-Laurent. Des survols aériens ont déjà mené́ à la conclusion que les bélugas sont absents de la portion de l’estuaire en amont de la rivière Saguenay pendant les mois d’hiver et se concentreraient plutôt entre l’embouchure de la rivière Saguenay et Pointe-des-Monts. Cette distribution coïncide d’ailleurs avec les dires du chercheur Vladykov, actif dans les années 1940, basés sur des observations effectuées par des riverains. Lors de survols hivernaux, des bélugas ont pu être observés le long de la côte gaspésienne jusqu’à Cloridorme et dans la portion nord du golfe jusque dans la région de Sept-Îles et du passage Jacques Cartier entre l’ile d’Anticosti et la rive nord. Ce déplacement vers l’aval en automne et à l’hiver pourrait être relié à la migration vers l’Atlantique de certaines proies privilégiées par le béluga telles que le hareng et l’anguille ou à la recherche de secteurs où l’agitation intense de l’eau prévient la formation de glace.