Activités pétrolières et gazières
L’exploration gazière et pétrolière est en expansion sur le plateau néo-écossais. Plusieurs sources commercialement exploitables ont été trouvées près du Gully; la plateforme pétrolière la plus proche se trouve à environ 35 km dans des eaux peu profondes. Pour détecter de potentielles sources de gaz ou de pétrole, des relevés sismiques sont effectués. Ces relevés utilisent de puissantes détonations à intervalles réguliers. Le forage et les autres opérations liées à l’exploitation contribuent aussi à augmenter le bruit ambiant. Les déversements, les matériaux rejetés et l’augmentation du trafic maritime sont d’autres menaces pour les baleines à bec. Pour le moment, le Gully n’est ni exploré ni exploité. Depuis 2004, il profite d’un niveau élevé de protection puisqu’il a été désigné Zone de protection marine (ZPM). Par contre, d’autres canyons sous-marins à proximité, occasionnellement utilisés par les baleines à bec communes, ne possèdent aucune protection.
Empêtrement dans les engins de pêche
Plusieurs baleines à bec communes photo-identifiées portent des marques de rencontres avec des engins de pêche, et d’autres observations de baleines empêtrées dans des filets ont été faites. Les zones peu profondes près du Gully ont été fortement draguées dans le passé pour la pêche aux poissons de fond tel le flétan. Ce type de pêche a grandement diminué au cours des dernières années, en raison de la chute des stocks de poissons de fond, mais pourrait s’y étendre de nouveau dans l’avenir, selon la situation des espèces ciblées et d’autres facteurs. Aussi, la pêche au thon (à la palangre) et à l’espadon (au harpon ou à la palangre) se poursuit dans le secteur du Gully, sauf dans les zones profondes, où toute activité halieutique est interdite et où l’on retrouve une grande partie de l’habitat et de la population des baleines à bec communes du plateau néo-écossais.
Bruit
Il n’est pas encore clair comment la pollution sonore affecte les baleines à bec, mais les effets pourraient comprendre l’accoutumance, des perturbations du comportement, des déficiences auditives temporaires ou permanentes, le masquage acoustique et même des blessures, l’échouage et la mort. Au nombre des sources possibles figurent les activités de prospection et d’extraction du pétrole et du gaz, les exercices militaires, dont l’utilisation de sonars mis en cause lors d’événements fatals d’échouages de baleines à bec ailleurs dans le monde, les travaux de recherche scientifique qui font appel au son, le trafic maritime et le trafic aérien à basse altitude, et la construction. De plus, il est possible que par leurs habitudes de plongée en eau très profonde, les baleines à bec soient plus vulnérables au bruit sous-marin; le son se concentre dans les couches d’eau profonde et se propage ainsi plus loin.
Contamination
Les débris flottants constituent une importante source de pollution du Gully. Ces débris, comme des sacs de plastique, des filets de pêche et des courroies, peuvent représenter une menace pour les baleines à bec qui y vivent.
La contamination est un autre type de pollution qui pourrait affecter les baleines à bec communes. Le développement des activités de forage pourrait contribuer à l’augmentation de la contamination du Gully avec les déblais alentour des plateformes pétrolières, l’eau extraite, les déversements accidentels d’hydrocarbures et la hausse du trafic maritime. Toutefois, rien n’indique clairement qu’il y ait eu une pollution nuisible dans l’habitat des baleines ces dernières années.
De récentes études montrent aussi que les baleines à bec communes du plateau néo-écossais présenteraient des niveaux de DDT supérieurs aux années passées, sans que la cause soit déterminée, et que ces niveaux seraient supérieurs à ceux mesurés dans la population du détroit de Davis. Toutefois, dans l’ensemble, les teneurs en contaminants parmi la population du plateau néo-écossais sont comparables à celles qu’on trouve chez d’autres cétacés de haute mer et qui ne seraient pas suffisamment élevées pour causer des problèmes de santé.
Changement dans les sources alimentaires
L’accès à de bonnes sources de nourriture semble être un élément déterminant dans la répartition
de la baleine à bec commune sur le plateau néo-écossais. On retrouverait une quantité impressionnante de proies dans le Gully et dans les canyons adjacents, ce qui inciterait les baleines à bec communes à se concentrer à cet endroit. Toutefois, toute perturbation dans les sources alimentaires au sein de cet habitat pourrait les amener à abandonner les lieux. Comme peu d’autres endroits semblent leur offrir pareilles possibilités alimentaires, cela pourrait avoir une incidence phénoménale sur la population. De plus, toute pêche commerciale future de l’encornet, principale proie des baleines à bec communes, constituerait aussi une nouvelle menace pour ces baleines.
Collisions avec les navires
Plusieurs baleines meurent chaque année de collisions avec des navires au large de la Nouvelle-Écosse, mais aucun cas rapporté n’impliquait des baleines à bec communes. Toutefois, comme ces animaux évoluent loin au large, il est peu probable qu’on découvrirait les restes des baleines à bec mortellement blessées dans des collisions graves avec des navires; il y a donc là une menace possible qui ne peut être écartée. Des baleines avec des cicatrices, pouvant être causées par de telles collisions, ont été d’ailleurs observées.
Objectifs de rétablissement
1. Avoir une meilleure connaissance de l’écologie de la baleine à bec commune
Les connaissances sur l’écologie des baleines à bec communes comportent de nombreuses lacunes que ce soit en matière d’habitat, de reproduction, d’alimentation, d’échanges avec d’autres populations ou de mortalités. C’est pourquoi des études, sur les proies, la reproduction et les déplacements, doivent être entreprises ; la photo-identification, des baleines à bec communes du Gully, des canyons Haldimand et Shortland, poursuivie ; des méthodes acoustiques de surveillance développées ; et une base de données sur les baleines échouées, incluant les résultats des autopsies subséquentes, tenues.
2. Avoir une meilleure connaissance de l’effectif, de la tendance et de la répartition de la population
En poursuivant l’identification photographique de manière à pouvoir déterminer, avec une
précision de plus ou moins 5 %, quelle tendance suit la population ; en surveillant systématiquement toute présence visible de baleines à bec communes dans leur habitat connu ; et en étudiant leur répartition dans les zones adjacentes à cet habitat.
3. Avoir une meilleure connaissance des menaces humaines qui pèsent sur cette population, surveiller ces menaces et les réduire si nécessaire
- Évaluer les effets possibles de mise en valeur des hydrocarbures sur les baleines à bec communes ; voir à ce que des mesures pertinentes d’atténuation soient en place ; et continuer à élaborer et à adopter des pratiques optimales.
- Suivre et documenter les contacts avec les engins de pêche et à partir de ces résultats, élaborer des protocoles pour libérer les baleines empêtrées. Advenant de nouvelles pêches ou des pêches reconduites, déterminer quels sont les risques et étudier la faisabilité, les coûts et les avantages de la modification des engins de pêche ou d’autres mesures d’atténuation qui seraient jugées nécessaires. Finalement, envisager d’autres mesures de gestion spatiale si besoin.
- Cerner les sources de bruit dans l’habitat des baleines à bec communes et voir à ce que des mesures d’atténuation ou de gestion soient appliquées à chacune d’elles. Étudier les seuils à utiliser dans la gestion du bruit sous-marin et évaluer leurs effets possibles.
- Recueillir systématiquement des échantillons et les analyser pour y déceler d’éventuels contaminants. Établir un moyen de garder et d’archiver ces échantillons et résultats d’analyse pour qu’on puisse procéder à des comparaisons des teneurs en contaminants au fil du temps. Étudier les sources possibles et les trajets des contaminants et surveiller la qualité de l’eau et des sédiments dans l’habitat des baleines à bec communes.
- Surveiller les activités humaines autres (touristiques, scientifiques, etc.) se déroulant dans l’habitat de la baleine à bec commune et si nécessaire, voir à ce que des mesures d’atténuation des effets de ces activités soient mises en place. Utiliser l’expérience acquise en rapport avec d’autres espèces pour élaborer des protocoles applicables à la recherche scientifique et au tourisme.
4. Amener les intervenants concernés et le public à s’investir dans le rétablissement par l’éducation et la gouvernance
Par l’éducation auprès des groupes d’intervenants concernés et du grand public. Cerner les possibilités de gérance et diffuser de l’information à leur sujet aux publics pertinents.
Autre stratégie de conservation : La protection du Gully
Le Gully (ou Goulet de l’île de Sable) constitue un habitat unique et complexe de l’Atlantique Nord-Ouest. Ce canyon sous-marin abrite une grande variété d’espèces, des coraux aux baleines, incluant la population de baleines à bec communes en voie de disparition. Pour protéger cet habitat particulier, le ministère des Pêches et Océans du Canada (MPO) l’a désigné Zone de protection marine (ZPM) en mai 2004. L’établissement d’une ZPM à cet endroit vise à protéger cet écosystème unique tout en permettant une utilisation durable de ses ressources. Cette désignation survient six ans après avoir élaboré, en 1997, la Stratégie de conservation du Gully.
En 1994, le MPO déclarait le Gully comme sanctuaire de baleines pour tenter de diminuer les collisions avec les navires et le dérangement potentiel par le bruit pour les baleines de cette zone. Ainsi, le MPO recommande d’éviter la navigation dans le Gully. Si cela est impossible, il recommande de diminuer la vitesse, de poster un observateur et de manœuvrer pour éviter toutes activités de mammifères marins. Enfin, le MPO demande de rapporter toutes observations ou collisions par l’intermédiaire du service de communication ou de trafic local. Plusieurs compagnies qui voyagent dans ce secteur ont accepté d’éviter le Gully.
Enfin, d’autres décisions ont été prises du côté du secteur privé pour favoriser la protection du Gully. Entre autres, en 1990, la compagnie pétrolière Lasmo déclarait un secteur incluant le Gully comme « zone d’exclusion des pétroliers » pour que le trafic maritime associé à ses activités n’interfère pas avec les baleines. À cette époque, Lasmo commençait l’exploitation pétrolière à 110 km à l’ouest du Gully.
Plusieurs travaux de recherche sont entrepris pour déterminer si l’habitat essentiel devrait s’étendre jusqu’aux canyons Shortland et Haldimand, selon les déplacements des baleines à bec communes.