Un texte d’Alexandre Bernier-Graveline

En septembre, j’ai effectué une partie de mon terrain pour mon projet de recherche de maitrise à bord du Bleuvet. De retour à l’Université du Québec à Montréal, j’ai maintenant 18 échantillons de gras de bélugas à analyser. Lors des moments creux du travail de bureau, je peux repenser avec un grand bonheur à mon travail sur l’eau. L’observation des mammifères marins reste pour moi un privilège et un cadeau inestimable.

Pour les deux prochaines années, mon projet réalisé en collaboration avec le GREMM vise à mieux cerner certains problèmes de santé amenée par la pollution qui affecte le rétablissement des bélugas de l’estuaire du fleuve Saint-Laurent. Ce projet contribuera aux connaissances et à l’avancement de la science et profitera aux nombreux chercheurs associés des ministères et des universités du Québec et probablement d’ailleurs. Considérant le statut d’espèce en voie de disparition des bélugas du Saint-Laurent, une meilleure connaissance de leur contamination pourra permettre de mieux axer les mesures de conservation.

L’étude des mammifères marins ne remonte pas à hier ni à avant-hier…

L’étude des mammifères marins remonte à aussi loin que certaines dynasties chinoises et à l’époque d’Aristote, soit à plus de 2000 ans avant notre ère, selon le chapitre History of Marine Mammal Research de l’Encyclopedia of Marine Mammals. L’acquisition de connaissances sur ces animaux s’est faite progressivement, suivant globalement quatre différentes phases non exclusives. La première période est axée principalement sur les caractères morphologiques des mammifères échoués et dure jusqu’aux années 1900. La seconde phase chevauche la fin de la première et a permis de nombreux apprentissages sur le comportement, l’anatomie et la distribution des baleines dans le monde. La recherche se développe grâce à un intérêt grandissant pour la chasse et les activités d’observations.

La troisième phase se met en place avec l’apparition d’animaux en captivité vers les années 1950, et permet l’accroissement rapide des connaissances sur le plan comportemental et physiologique, malgré plusieurs problèmes éthiques et de réciprocité des résultats en nature. La dernière phase inclut les 50 dernières années, marquées par une croissance importante de la recherche dans le domaine de l’écologie de ces animaux et de la qualité de leur environnement.

Mais pourquoi étudier les baleines ?

L’acquisition de ces connaissances sur plusieurs centenaires a permis aujourd’hui de mieux comprendre la place et le rôle de ces magnifiques créatures dans notre monde en changement. En plus de leur pouvoir d’émerveillement, les baleines jouent un rôle essentiel dans les écosystèmes marins et aquatiques du monde entier.

Généralement, elles se retrouvent au haut de la chaine alimentaire en tant que prédateur, permettant ainsi de réguler la dynamique des populations de rang inférieur de la chaine alimentaire comme les poissons, planctons et végétaux et indirectement d’autres animaux supérieurs comme les requins. Leur bénéfice écologique est encore bien plus grand selon de nombreuses études, malgré que toujours peu connues. On peut ajouter à cette liste leur rôle de facilitateur pour l’alimentation d’autres animaux, dont les oiseaux marins, et le fort déplacement de nutriments au sein d’un écosystème. Étudier les bélugas, en 2017, c’est donc encore tout à fait d’actualité, et même nécessaire.

Carnet de terrain - 20/11/2017

Alexandre Bernier-Graveline

Alexandre Bernier-Graveline s’est joint à l’équipe du GREMM en 2015 comme naturaliste. Il est aujourd’hui diplômé d'un baccalauréat en sciences biologiques et écologiques et plus récemment d'une maîtrise en biologie durant laquelle il étudiait les bélugas de l'estuaire du fleuve Saint-Laurent. De l'Université du Québec à Montréal, en collaboration avec le GREMM, Pêches et Océans Canada et la Faculté de médecine vétérinaire, son projet de recherche s'intéressait aux contaminants et lipides mesurés dans le lard des carcasses de bélugas au cours des 20 dernières années et leurs relations avec la condition physique des bélugas. Il s'est joint plus formellement à notre équipe de recherche en janvier 2020. Il est actuellement responsable du projet de recherche photogrammétrie. Ce projet consiste à mesurer les bélugas à partir de photographies prises par drone afin d'évaluer leur réserve en énergie et leur état de santé, mais aussi de déterminer le sexe des animaux et le statut reproducteur des femelles.

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