Une première carcasse de béluga pour l’année 2018 a été signalée au 1-877-7baleine le 26 mars dernier à Coin-du-Banc en Gaspésie. La carcasse était entière, mais en état de décomposition avancée, comme c’est souvent le cas lorsqu’une carcasse est trouvée après la fonte des glaces. L’animal a été attaché par des bénévoles pour éviter qu’il ne reparte avec les grandes marées. Des échantillons ont pu être prélevés, pour poursuivre le programme de suivi des carcasses de bélugas, et ce, pour une 35e année.
C’est à peu près à pareille date l’année dernière que la première carcasse de béluga avait été trouvée, aussi en Gaspésie, à L’Anse-à-Valleau. C’était le début d’une autre année noire quant aux mortalités pour cette espèce en voie de disparition.
2017 : Une autre année noire pour les bélugas
Au total, 22 carcasses de bélugas ont été retrouvées et échantillonnées sur les rives du Saint-Laurent l’année dernière. Bien que le nombre soit un peu plus élevé que la moyenne des dernières années (environ 15), c’est surtout l’âge des bélugas retrouvés qui inquiète Robert Michaud, le directeur scientifique du GREMM : « Encore cette année, le nombre de nouveau-nés retrouvés morts est très élevé. C’est une ponction importante sur le potentiel de rétablissement des bélugas.» En effet le nombre de carasses de nouveau-né est passé d’une moyenne annuelle de 1 entre 1983 et 2007 à plus de 7 depuis 2008.
Deux des 10 carcasses de jeunes bélugas ont été transportées à la Faculté de médecine vétérinaire de Saint-Hyacinthe où l’équipe du Dr Stéphane Lair poursuit son enquête à long terme sur les causes de mortalité des bélugas. «L’examen des deux veaux suggère un problème de séparation mère-veau», décrète-t-il. Il est plutôt rare de récupérer des nouveau-nés en bon état pour des nécropsies, car la petitesse de la baleine fait en sorte qu’elle surchauffe et se décompose très rapidement, laissant peu d’indices sur l’histoire de ses quelques jours, voire heures, de sa vie.
Selon les résultats des nécropsies pratiquées par l’équipe du Dr Lair depuis 1983, la majorité des nouveau-nés retrouvés morts sont âgés d’à peine quelques heures ou quelques jours. Ils ne présentent pas de signe de maladie, mais plutôt des signes de déshydratation et de débalancements électrolytiques. Ceci suggère que ces veaux meurent sans avoir été nourris par leur mère. La cause de ces séparations pourrait être liée à la condition physique des femelles. Deux des trois femelles transportées à Saint-Hyacinthe présentaient d’ailleurs des signes de mise bas récente ou d’allaitement en cours suggérant que leurs veaux n’ont probablement pas survécu à la mort de leur génitrice.
La mortalité des nouveau-nés et celle des femelles autour de la mise bas risquent d’accélérer le déclin de la population initié il y a 20 ans. Pour Véronique Lesage, chercheuse scientifique de l’Institut Maurice-Lamontagne de Pêches et Océans Canada, cette situation «coïncide avec des changements importants dans leur écosystème, des changements qui créent des conditions environnementales défavorables. On n’a peut-être pas de contrôle direct ou immédiat sur ces conditions, mais on peut agir sur les stresseurs qui résultent de nos activités, comme le trafic maritime, le dérangement dans les aires sensibles pour les mères et les jeunes, la contamination, les atteintes aux habitats et la compétition avec les pêcheries».
Pour en savoir plus
- L’énigme des bélugas