Au matin du 26 juillet dernier, le Bleuvet quitte le port de Tadoussac pour étudier les bélugas. La cabine est bien remplie; 6 personnes sont à bord. La chercheuse Valeria Vergara, d’Ocean Wise (Colombie-Britannique) a traversé le continent avec son assistante de recherche Marie-Ana Mikus afin d’étudier la communication entre les bélugas du Saint-Laurent. Véronique Lesage de Pêches et Océans Canada est également à bord afin d’étudier les impacts du bruit de la navigation sur les bélugas. Finalement, Michel Moisan, le capitaine, ainsi que Sophie Bédard et Noémie Roy du Groupe de recherche et d’éducation sur les mammifères marins (GREMM) complètent le groupe.

Aujourd’hui, trois projets de recherche se déroulent en parallèle. Valeria Vergara teste l’hypothèse que chaque béluga possède une signature acoustique unique. Si cela était confirmé, chaque individu pourrait être reconnu par son cri de contact, ou son « nom ». Afin de vérifier son hypothèse, la chercheuse enregistre les cris des bélugas du Saint-Laurent pour ensuite les analyser. De son côté, Véronique Lesage tente de mieux comprendre les effets du bruit de la navigation sur les comportements de plongée, la communication et l’alimentation des bélugas. De plus, lorsque l’occasion se présente, Sophie Bédard photographie les bélugas afin de contribuer au projet de photo-identification du GREMM.

L’objectif de la journée : poser une balise sur le dos d’un béluga. Elle enregistrera durant les heures où elle tient une foule d’information sur le comportement de plongée du béluga, les bruits qu’il émet ainsi que les bruits présents dans son environnement. Ces données prises sous l’eau s’ajouteront à celles prises de la surface par les chercheuses au cours de la journée.

En direction de l’ile Rouge, nous trouvons un troupeau de bélugas à étudier. Un permis de recherche nous permet de les approcher. Vers 9 h 10, un béluga nage vers nous. Il passe quelques fois sous le bateau, puis s’éloigne. Debout sur le pont, Michel Moisan tient une longue perche afin de poser la balise sur le dos du béluga. Quelques minutes plus tard, le béluga s’approche à nouveau. Et voilà! La balise est posée.

S’amorce alors la phase d’observation. Le bateau s’éloigne à 400 m du béluga et chacun se met à la tâche. Michel Moisan prend la barre alors que la récolte de données se met en branle pour les deux projets de recherche.

À l’avant du bateau, Valeria Vergara et Marie-Ana Mikus observent les déplacements du béluga par rapport au groupe. Chaque fois qu’il se retrouve seul, elles notent l’heure. Lorsqu’elles écouteront les sons enregistrés par la balise, elles sauront que si un cri de contact a été entendu à une des heures notées, c’est probablement celui du béluga qui porte la balise.

À l’arrière du bateau, Véronique Lesage observe le dynamisme du béluga ainsi que son comportement de surface. De plus, elle note entre autres la présence de bateaux dans le secteur, leur type, leur angle et leur distance avec le béluga et son groupe.

Pendant ce temps, debout sur le toit, Sophie Bédard fait des relevés détaillés du troupeau. Les bélugas sont souvent observés en grands troupeaux, divisés en petits groupes. Toutes les trente minutes, Sophie note si de nouveaux individus s’ajoutent au troupeau ou le quitte, le rayon du troupeau et la direction de ses mouvements. Ces données permettront de comparer le comportement du béluga portant la balise avec celui du troupeau en général.

La balise est équipée d’un émetteur et notre bateau, d’une antenne et d’un récepteur. Lorsqu’on dirige l’antenne dans une direction, la fréquence et l’intensité des signaux sonores — des « bips » — nous indiquent si la balise se trouve dans cette direction.

À 11 h 45, les signaux sonores se font plus rares. La balise aurait-elle glissé? Une balise plus basse sur le dos du béluga émettra des signaux moins forts et moins fréquents, car son antenne sort de l’eau moins haut et moins longtemps lorsque le béluga vient à la surface.

Quelques minutes plus tard, nous revoyons notre béluga nageant avec trois ou quatre congénères. Sa balise a bel et bien glissé. Le béluga s’est-il frotté au fond marin ou un autre béluga a-t-il touché la balise? Dans tous les cas, elle tient encore.

À 12 h 36, le signal sonore devient très fréquent. « Bip, bip, bip, bip, bip! » La balise s’est détachée. Nous la retrouvons flottant à la surface de l’eau et récupérons ainsi les données précieuses qu’elle contient.

La journée est terminée et des prédictions de forts vents nous encouragent à rentrer rapidement au port. Nous faisons tout de même de magnifiques observations sur le chemin du retour. Un petit rorqual s’alimente à quelques centaines de mètres du bateau. Puis, un groupe de petits pingouins et un groupe de cormorans volent au-dessus de nos têtes. Finalement, un fou de Bassan plane près du phare du haut-fond Prince.

Les bélugas identifiés récemment :

Amalena, adoptée par Tadoussac Elderhostel

Delphi, confiée au premier ministre du Québec

Hector, adopté par les Cowboys Fringants et leurs fans

John A. Macdonald, adopté par The Fairmont Hotel Macdonald

Marjo, adoptée par La grande séduction : 10e Congrès médical sur la médecine d’urgence en région du CSSS de la Haute-Côte-Nord-Manicouagan

Pacalou, adoptée par Pascale Cauchi

Pascolio, adoptée par les commerçants de Tadoussac

Polynix, adopté collectivement

Pure Laine, adoptée par Cynthia Fish

Yogi, adopté par Bell Canada

Carnet de terrain - 8/8/2019

Noémie Roy

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